En salle

21 février 2013

Classes populaires et politique fiction

Mon billet de ce matin reprenait une chronique du Monde quifaisait un terrible constat. Quand on évoque les classes populaires, on pense souvent aux habitants des quartiers dans les métropoles mais on oublie beaucoup ceux qui habitent la campagne ou les petites ou les moyennes villes de province. 60% de la population.

Pourtant, les habitants des quartiers sont relativement protégés, proches des bassins d'emplois actifs, avec une capacité d'accès à la santé, à l'école, l'université, aux services publics. "La vraie classe populaire",celle qui est éloignée des métropoles est la plus fragile, exposée aux fermetures d'usines, aux plans sociaux, sans vraiment espoir de s'en sortir,...

La classe politique s'adresse-t-elle à elle ? Je vais évidemment défendre la formation politique dont je suis le plus proche et dire qu'elle agit pour les régions, pour les PME,.. Seuls espoirs réels de création d'emploi, de croissance,... Mais est-ce parlant pour les classes populaires ? Quelles formations politiques s'adressent à eux ?

J'imagine bien mes camarades blogueurs s'écrier : "nous ! On se bat pour maintenir les emplois, pour reprendre lesusines,..."  Plus à gauche, on va se battre pour augmenter les salaires, pour fustiger ces fumiers de patrons et ses salauds d'actionnaires ! A droite, on ne défend rien. On va dire qu'il faut former les chômeurs, lutter contre les fraudes ou je ne sais quoi, je ne suis pas de droite ! On entend les cadres de l'UMP dénoncer le cancer de l'assistanat. Alors qu'on s'adresse à des gens dont la seule perspective est de vivre de l'assistanat et qui assistent au développement des métropoles, pleines de problèmes, aussi. Du chômage, de l'immigration, de l'insécurité...

Depuis des années, les partis politiques ne s'adressent plus aux classes populaires. Ils croient le faire "on défend les usines !"  Tu parles, comme si les classes populaires ne pouvaient pas imaginer qu'on ne produira plus de voitures en France !

Depuis des années, il fait pourtant reconnaître que seule une personne s'estadressée à elle, au cours d'une superbe campagne, en 2007 : Nicolas Sarkozy.

Non ! Je ne plaisante pas ! Rappelez-vous le sketch ! "Travaillez plus pour gagner plus". Il allait chercher la croissance avec les dents. Il faut que l'état aide les gens à devenir propriétaires. Il faut que les parents puissent aider les enfants, nous devons réduire les droits de succession. Il faut que ceux qui veulent travailler plus gagnent plus d'argent sans payer plus d'impôt.

On connait le résultat économique et social : un fiasco. La pure foirade. La France affaiblie comme jamais (ou presque...). On mettra des années à nous en remettre. Sarkozy lui-même est revenu sur une partie des mesures au cours deson mandat...

Mais on connait aussi le résultat électoral, en 2007. Une parfaite réussite.

Le coup ne pouvait pas fonctionner à nouveau en 2012. Les braves ont voté pour l'éliminer. Trop de foirades. Trop d'outrances.

Par contre, depuis « après 2002 », la gauche a gagné toutes lesélections intermédiaires sur fond d'absentéisme croissant. Elle risque de perdre les prochaines à cause des votes de protestations. Elle peut quand même sauver les meubles. Elle a sa réputation de bon gestionnaire. Pas de raison de changer. On verra.

Le même discours lui a permis de gagner toutes les élections sauf les deux de 2007 (tout le monde se fout des européennes de 2009 : plus personne ne comprendl'enjeu, sauf celui pour Jean-Mélenchon, l'an prochain…). Pourquoi changerait-elle avant 2015 et les élections départementales et Régionales. De toute manière, elle pourra très bien tout gagner grâce aux triangulaires avec le FN. Elle perdra dans ses fiefs, je pense à mon canton natal, où le FN est peu présent mais qu'importe ?Les Côtes d'Armor resteront à gauche.

Et on aura alors 2017 en ligne de mire... J'imagine que François Hollande sait tout ça. Moi j'oublie. Je vis au quotidien. Loi par loi. Information par information. 2015 ? Le pic de la crise aura bien fini par se montrer derrière nous. Les premières mesures du Gouvernement auront commencé à avoir de l'effet. Le Chômage aura affiché quelques mois de baisses consécutifs, la croissance sera revenue à 1,5%.

2017. La France ira mieux. C'est cyclique. Ce pauvre Nicolas Sarkozy aura réussi une campagne, 10 ans avant. Non seulement sa politique économique était mauvaise mais, en plus, il s'est pris une crise économique sur le dos.

La droite traditionnelle se sera refait une vague santé. Ils auront bénéficié d’un vote de rejet de la politique Gouvernementale et auront gagné quelques villes de province et quelques départements et régions. Sa guerre des chefs aura été enterrée par une primaire qui aura probablement fait des ravages, mais peu importe. Elle se sera donné l’illusion d’avoir trouvé les classes populaires et d’avoir le bon ton. Elle va se vautrer aux présidentielles. Défoncée par les classes populaires qui ont auront à dire : « on ne va pas nous la faire deux fois ». On sera là pour le rappeler.

La gauche de la gauche se sera vautrée. Elle aura fait unbon score aux Européennes, un pur vote de protestation. Elle aura perdu du terrain aux autres scrutins. Elle aura continué à taper sur la gauche socialiste : « Ah ! Les cons !Ils n’ont pas donné le droit de vote aux immigrés aux élections locales… »Comme si quelqu’un en avait quelque chose à foutre, parmi les électeurs non acquis à la gauche,… à part les électeurs bien à droite qui veulent à tout prix lutter contre. Le mariage pour tous sera dernière nous, entré dans les mœurs, il y en aura 3000 par an. La gauche socialiste pourra au moins dire :« ben vous voyez, avec  nous, la société avance ». Même au bord du gouffre. Le pragmatisme, la méthode, …

La gauche de la gauche se sera vautrée de bout en bout. Elle aura promis une meilleure redistribution, une meilleure solidarité, ce que j’approuve, d’ailleurs, mais personne ne veux vivre de solidarité ou de redistribution, personne ne veut vivre en attendant un coup de pouce sur les allocations chômage pour avoir un espoir pour ses enfants.

Elle se sera plantée aussi à force de parler d’écologie, typiquement le truc de bobo qui ne risque pas de perdre son boulot. Elle aura lutté contre des investissements locaux, comme Notre-Dame-des-Landes, pour bien expliquer aux gens que l’on n’investira pas par chez eux, qu’on continuera à tout centraliser à Paris,… Ah ! Elle criera bien haut et fort qu’elle s’adresse pourtant à l’intelligence des électeurs. Elle aura été bernée par le bon score de Jean-Luc Mélenchon aux élections Européennes, persuadée que ce sont des« classes populaires » qui ont voté pour lui alors que ce ne seront que quelques fonctionnaires déçus de ne pas avoir été augmenté et quelques autres socialistes dépités.

La droite traditionnelle sera empêtrée dans ses éternelles âneries à peine bonnes à faire rire les blogueurs malveillants. Elle aura trop voulu garder l’équipe qui perd.

Les centristes seront à l’ouest. Ils seront bien obligés deconstater que la politique budgétaire de François Hollande aura porté ses fruits, qu’il aura retrouvé « une bonne note » de la part des agences de notation, même si le chômage reste aux alentours de 10%.

François Hollande, après une belle déconvenue de la gauche annoncée aux régionales et aux départementales bien que légèrement sauvée par des triangulaires avec le FN, aura décidé de changer de Premier Ministre, en 2005. Il aura pris quelqu’un de poids, Martine Aubry, peut-être. Il se mettra en retrait comme Chirac ou Mitterrand avec tous leurs Premiers Ministres. Il ne sera pas en première ligne et n’aura pas fait l’erreur de Nicolas Sarkozy de ne pas changer de Premier Ministre deux ans avant les élections. François Hollande se sera mis en « cohabitation » avec son propre camp !Pas fou ! Vous connaissez des Présidents qui ont été réélus alors qu’ils n’étaient pas en cohabitation, depuis 40 ans ?

Jean-Marc Ayrault aura un "bon bilan mitigé". Il aura fait une partie des mesures structurelles qui s’imposaient, comme l’acte III de la décentralisation, la régionalisation de l’aide aux régions. Martine Aubry pourra s’appuyer dessus pour mener une politique plus en faveur des défavorisés.

Alors l’élection arrivera.

Et on trouvera des cabinets et fondations experts en politique qui diront à François Hollande, encore une fois, que les classes populaires sont perdues pour le PS et qu’il faut s’adresser aux classes moyennes.

Comme s’il y avait une différence.

17 commentaires:

  1. Hey Nicolas !

    C'est un remake de Blanche neige au pays des nounours blancs en peluche, couchés sur de la ouate rose que tu nous as pondu là !

    Manque plus que la Pastorale en musique de fond...

    Crois tu sincèrement à un tel scénario que même les studios Disney n'auraient osé écrire ?

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    1. J'ai dit que c'était une fiction...

      Cela étant tu me m'expliquer ce que tu juges le plus gros ?

      Qu'Ayrrault saute en 2015 ? Que le PS s'en tire pas trop mal aux municipales, Régionales et départementales grâce à des triangulaires avec le FN ? Que Melennchon et le FdG feront des bons scores aux européennes ?

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    2. Je crains que le FdG se fasse beaucoup d'illusions. C'est triste à dire à mes potes du FdG mais Mélenchon passe mal auprès de beaucoup de gens.

      Et je crois à une branlée monumentale du PS au municipales avec une abstention record.

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    3. Non. L'abstention aux municipalesn'est jamais élevée. Elle sera terribles aux européennes, Régionales et départementales.

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    4. De toute façon, le grand problème des scrutins de 2014 à 2017 sera l'abstention.

      On peut au moins être d'accord sur ce constat, non ?

      Et cette abstention risque de bouleverser les rapports de force.

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    5. Non. On est pas d'accord. L'abstention n'est pas un problème mais une conséquence ou un résultat. Le problème est que les gens n'aient pas envie d'aller voter. Il faut arrêter avec ces conneries du genre "l'abstention est le premier parti en France". Ça ne veut rien dire. La nuance est faible mais si les gens connaissaient les enjeux des élections, ils voteraient autrement.

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  2. Attention Nicolas, tu vas finir par énerver notre ami GdC.
    Attention.

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  3. "La gauche de la gauche se sera vautrée de bout en bout. " --> Cela serait merveilleux pour notre République...

    Après ton scénario reste plausible. Je crains, pour la droite républicaine, que 2012 soit le miroir de 2002...

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  4. très bon billet!

    Mais serais-je donc une blogueuse malveillante?

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  5. "Elle peut quand même sauver les meubles. Elle a sa réputation de bon gestionnaire. Pas de raison de changer. On verra."

    Humour, quand tu nous tiens !

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