En salle

16 août 2014

L'heure du souvenir

Finalement, on connait peu l’histoire de France. Dans l’esprit de beaucoup, la fin de la guerre en France s’arrête au débarquement en Normandie et aux images de la libération de Paris, le tout agrémenté de quelques tragédies, comme Oradour-sur-Glane et quelques histoires familiales qui ressortent des années après. Tiens ! Dimanche dernier, j’étais chez ma mère et il y avait ma sœur et sa fille, 10 ans. Pour l’anniversaire de ma sœur, nous avons un peu amélioré le repas et surtout l’apéritif. Je ne sais pas pourquoi, les conversations ont tourné vers cette guerre.

Ma mère, née en 1931, est arrivée avec ses parents à Loudéac pendant la guerre. Ils résidaient auparavant à Saint Nazaire, bien touchée par les événements. Mon grand-père était originaire de villages aux alentours. Il était malade. Ma grand-mère qui travaillait à la Poste a obtenu sa mutation dans ce qui deviendrait ma ville natale, le berceau de la famille.

Ma mère a commencé à raconter quelques souvenirs à sa petite fille. Elle en parle rarement si bien qu’elle ne donne pas l’impression de radoter, d’autant que les histoires sont souvent pleines d’émotion, d’anecdotes,… qui nous rappellent des choses que nous avons en mémoire, des histoires de marché noir, le grand-père qui allait chercher de quoi manger dans sa famille,…

Ca y est ! Je me rappelle de quoi est partie la conversation. Nous parlions de l’actualité et de la situation à Gaza et ma nièce nous posait des questions sur la vie des gens. C’est alors que ma mère lui a raconté sa vie à Saint-Nazaire, la sirène qui les réveillait, qui les forçait à aller à la cave, les fois où ils y passaient des nuits entières. Je me répète mais elle en parle vraiment très rarement, c’était peut-être la troisième  ou quatrième fois depuis que je suis en âge de m’intéresser à ça alors qu’elle parle "souvent" de sa jeunesse à Loudéac.

C’est à ce sujet d’ailleurs, que je l’ai entendue, dimanche, pour la première fois décrire l’horreur de certains moments d’occupation dans cette ville de Centre Bretagne, la peur qu’elle avait à 12 ou 13 ans quand elle devait faire une course toute seule en ville et qu’elle passait devant les soldats allemands, en arme, devant les guérites, autour de l’hôpital. Le centre de Loudéac a, somme toute, relativement peu changé. Le vieil hôpital est toujours là, transformé en « long séjour ». Bien sûr, depuis une clinique a été construite juste à côté, puis un nouvel hôpital qui a fini par fermer mais ces vieux bâtiments forment toujours le cœur de la cité. Bien sûr, le bureau de poste où bossait la grand-mère a fermé, un nouveau a été ouvert. Elle y a fini receveuse principale. Une femme, à l’époque, c’était exceptionnel. Je ne sais même plus quand elle a pris sa retraite. Vers 1960 probablement. Elle est morte en 2001, elle aurait eu 100 ans après. Mon grand-père est mort de sa maladie en 1946. Tiens ! Quitte à citer des dates, mon père aurait eu 80 ans avant-hier. Avec ma mère, ils se sont mariés en 1962 et ont toujours habité Loudéac, où ma mère avait fait construire, avec la sienne, la maison familiale en 1959, qui a été agrandie une petite dizaine d’années après, quand la famille a commencé à croitre.

C’est ainsi que de cette guerre, j’ai surtout des souvenirs – indirects, évidemment – qui datent d’après, de la reconstruction. Tout ça forme une espèce d’objet informe dans mon crâne : la fin de la guerre à Loudéac et les années qui ont suivi.

Hier, on commémorait le débarquement en Provence, événement peu connu, surtout de la part d’andouilles proches de Vire et de Guémené. Des abrutis se moquent de François Hollande qui est « le président des commémorations », comme s’il était coupable d’être président en 2014. Je lisais des crétins qui expliquaient qu’il accumulait des cérémonies pour retrouver de la popularité, comme si les Français oubliaient la situation économique, comme s’ils ne voyaient pas, en ouvrant un journal, que la guerre est à nouveau à nos portes.

Le président a fait un beau discours, hier.

« Voilà pourquoi je tenais à être ici, en ce 15 août 2014, pour saluer tous ces héros célèbres ou plus souvent anonymes qui ont contribué à la résurrection de notre pays. Ils étaient l’armée de toute la France, ils étaient même une armée du monde. Il y avait là les forces françaises libres qui, depuis 1940, avaient décidé de poursuivre la guerre ; il y avait les évadés de métropole qui avaient traversé la Manche ou qui étaient passés par l’Espagne pour répondre à l’appel du général DE GAULLE ; il y avait les volontaires qui avaient continué le combat malgré l’armistice en Afrique et au Moyen-Orient ; il y avait ces soldats qui avaient préféré la France libre à Vichy ; il y avait les dissidents des Antilles qui avaient déjà risqué leur vie en quittant leur île dans des embarcations très fragiles et qui, avec d’autres embarcations heureusement, avaient réussi à débarquer à Cavalaire dans la nuit du 16 au 17 août.

Il y avait des Guyanais, il y avait des Réunionnais, il y avait les Tahitiens et les Néo-calédoniens du bataillon du Pacifique, le fameux "bataillon des Guitaristes", qui a payé un lourd tribut aussi pour la libération de notre pays, à tel point que le général DE GAULLE lui décerna la croix de Compagnon de la Libération en 1945. Et puis il y avait les Français d’Afrique du Nord, ceux qu’on a appelés plus tard « les pieds noirs », et qui s’étaient engagés pour constituer une part des soldats de l’armée d’Afrique, parce que l’armée d’Afrique a été décisive. Beaucoup de ses soldats étaient algériens, marocains, tunisiens - on les appelait encore « des indigènes ». Il y avait aussi à leur côté les tirailleurs sénégalais et les goumiers, les Tabors, les Spahis, les zouaves, tous ceux-là formaient les contingents de l’armée, de la première armée, de l’armée B du général DE TASSIGNY. La moitié de ces 200.000 hommes était d’origine africaine.

Par leur sacrifice, ces hommes ont noué entre notre pays et l’Afrique un lien de sang que rien ne saurait dénouer, et j’aurai l’occasion de le rappeler tout à l’heure, cet après-midi sur le Porte-avions Charles de Gaulle, à tous les représentants des pays d’Afrique qui nous ont fait l’amitié et l’honneur de participer à ces cérémonies. Et puis s’ajoutait à cette armée une autre, celle de l’ombre, tous ces hommes, toutes ces femmes qui sortaient avec le brassard aux 3 couleurs pour participer à la libération de notre pays, pour restaurer la démocratie. »  

Alors que Nicolas Sarkozy avait expliqué que l’homme africain n’était pas assez entré dans l’histoire, François Hollande a probablement fait un des plus beaux discours montrer comme les Africains et, d’une manière générale, tous ceux qui ont fait l’histoire de France, ont contribué la libération de ce qui était « la mère patrie » et qui ont fait en sorte que la France puisse être ce qu’elle est aujourd’hui. Ce qu’elle est ? Il l’a rappelé, aussi…

« La France, cinquième puissance économique du monde et qui entend le rester par les réformes qu’elle engage. La France, une nation qui compte dans le monde, sur la scène internationale, une nation qui prend ses responsabilités pour assurer la sécurité, la sécurité de l’Europe mais aussi la sécurité dans le monde, et pour agir partout où nous sommes appelés pour la paix. »

Voila pourquoi ces commémorations sont importantes, alors que le personnel politique – et les blogueurs du même métal – se laissent aller vers une sorte de déclinisme. J’ai été absent de mon blog depuis une semaine mais j’ai continué à lire ceux des autres. Il m’amuse beaucoup de lire des blogueurs militants proches de l’UMP critiquer, à la petite semaine, le chef de l’Etat et le gouvernement, partant d’une photo du président et du premier ministre en costume, étudiant des dossiers à Brégançon.  Ils ont oublié les années Sarkozy, celles où il a voulu faire rentrer Kadhafi dans l’histoire, par la petite porte.


Il reste tant de combats à mener pour redresser la France, l’Europe,… et préserver la paix, autant que possible, dans le monde, défendre les populations opprimées et baisser le coût de la bière, qu’il faut bien quelques cérémonies pour rappeler le poids de notre histoire et ce qu’a fait l’Afrique, avec nous, souvent malgré elle, pour l’avenir du pays.

Alors je vois encore les yeux de ma nièce quand elle écoutait ma mère raconter comment elle avait vécu à son âge, 70 ans plus tôt.

67 commentaires:

  1. « Hier, on commémorait le débarquement en Provenance, événement peu connu »

    C'est sûr ! Le débarquement à Provenance, moi-même je n'en avais jamais entendu parler !

    Pour le reste, très bon billet… jusqu'à ce que qu'on débouche sur la phraséologie pompeuse de votre président, et le bourrage de crâne qui va avec (les indigènes-qui-sauvent-la-France, bla bla bla). Il ne faudrait quand même pas oublié que toute la logistique de ce débarquement, comme de l'autre, était anglo-américaine. Ce qui, bien entendu, n'ôte rien à la valeur du sacrifice consenti par les troupes africaines (et asiatiques : on les oublie toujours, ceux-là ! Ils doivent être trop calmes : ça finit par leur nuire…).

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    1. Merci !

      J'ai mis le discours de pépère en rouge (comme toutes les citations de ce blog) pour que vous puissiez le sauter...

      Quant aux participants, on ne va pas chinoiser.

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  2. Didier, ce n'est pas bien d'être obligé de reconnaître que les indigènes ont UN PEU sauvé la France

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  3. Nicolas, ma maman a également vécu la même époque et les mêmes peurs à Saint Barnabé et elle n'en parle que très peu

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    1. La plupart des vieux que je connais ne parlent que ça.

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  4. Beau discours en effet et un réel progrés par rapport à ceux de Sarkozy certes...Mais la présence des dictateurs: camerounais Paul Biya, burkinabé Blaise Compaoré ou gabonais Ali Bongo illustrent que la suite de l'Histoire fut moins glorieuse pour notre pays.
    http://survie.org/billets-d-afrique/2014/235-mai-2014/?lang=fr
    http://survie.org/billets-d-afrique/2014/232-fevrier-2014/?lang=fr
    http://survie.org/billets-d-afrique/2014/231-janvier-2014/?lang=fr

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    1. Ben non. Je ne vois pas en quoi, plus de cinquante ans après les décolonisations, les dictateurs africains seraient à porter à notre passif. Endosser ce genre de chose, en fait, c'est une autre manière de dire que les Africains ne sont et ne seront jamais responsables de ce qui leur arrive.

      Bref, c'est dire qu'ils ne sont pas entrés dans l'histoire, ou au moins qu'il n'en maîtrisent rien : bravo !

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    2. Certes, j'en parlais encore avec Djibril, hier soir... Mais je ne crois pas qu'on "endosse". Les faits sont là : on les a envahis. Depuis notre départ, ils n'ont pas trouvé la voie de la démocratie : ce n'est pas grave.

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    3. Pas vous, sans doute. Mais les Spire, les Rosaelle et les Céleste (pour faire bref) ne supporte pas qu'il se passe quoi que ce soit dans le monde sans que ce soit de notre faute, soit celle du méchant homme blanc à grandes dents et à griffes venimeuses.

      C'est-à-dire qu'ils se veulent omnipotents et indispensables (mais dans le Mal, quand leurs arrière-grands-parents pensaient la même chose d'eux-mêmes mais dans le Bien). Ils sont, en quelque sorte, des colonialistes à rebours : rien compris, rien appris.

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    4. Spire n'est qu'un commentateur occasionnel que je ne vais pas juger sur quelques lignes. J'ai renoncé à lire Céleste et je m'amuse de la lecture de Rosa qui ne comprend rien : voir son billet de ce matin.

      Pour ce qui me concerne, je n'endosse pas du tout, au contraire. Les imbéciles qui essaient de nous faire croire que nous sommes responsables du passé me gave. Surtout certains qui confondent commémoration et lois mémorielles.

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    5. D'autres évènements liés sont longtemps restés dans l'ombre des commémorations comme les massacres du camp de Thiaroye (1er décembre 1944), à Sétif (8 mai 1945), ou encore Haiphong (23 novembre 1946). Et c'est tout à l'honneur d'Hollande d'avoir reconnu officiellement en 2012 au Sénégal, la tragédie de Thiaroye. Certains de nos "grand-pères libérateurs" ont une part d'ombre, le rappeler ne nous rend absolument pas (nous: les petit-enfants) responsables du passé mais lucides. Lucide comme le sens de votre billet à la gloire de ceux à qui nous devons d'avoir une vie plus facile et de continuer la tâche résumée dans votre conclusion.

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    6. Ça n'a pas trop de sens de reconnaître officiellement. Il ne revient pas aux officiels d'écrire les livres d'histoire (sauf dans la mesure où ils y participent).

      À force de reconnaître, on se rend coupables. Le meilleur exemple est peut-être le génocide arménien puisque nous n'y sommes pour rien. C'est un "fait reconnu". Ça rime à quoi de rendre sa reconnaissance obligatoire ?

      Ça rend suspect toutes les actions visant à empêcher le révisionnisme.

      Au 19ème siècle, des types ont rédigé des manuels d'histoire. Il fallait des trucs précis que puissent comprendre les gamins, comme 732, Jeanne d'Arc (pour citer deux emblèmes) qui ne sont que des anecdotes (voire des romans).

      Je diverge... Désolé... Toujours est-il que reconnaître des trucs pour se donner bonne conscience me gave. C'est ce que je disais plus tôt (mais plus bas dans les commentaires) à Didier à propos des livres d'histoire.

      Sans compter pour en revenir à ce qu'il disait à propos de ton commentaire et des blogs des deux grosses : certains ont tendance à occulter une partie l'histoire).

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    7. Le génocide arménien, je suis d'accord avec vous. Pas besoin de loi. Les politiques n'ont pas à écrire l'Histoire mais le fait de reconnaitre une injustice me semble une démarche normale. Aprés à chacun de faire son opinion. Personnellement je ne ressent aucune culpabilité à connaitre les exactions de nos ainés, c'est juste instructif. Chercher des infos à différentes sources permet d'échanger sans prétention . Pour cela, nul besoin de se balancer à la figure des anathèmes, du moins en ce qui me concerne.

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    8. Le problème est de savoir combien de connards voudraient faire de nous des responsables...

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    9. Je ne sais pas si vraiment s' il y a des gens qui veulent faire de nous des responsables, par contre beaucoup s'expriment comme s'ils avaient la connaissance infuse.

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  5. Merci pour ce billet qui m'a beaucoup ému, mon grand-père ayant été un des officiers "dissidents" qui ont continué le combat en Afrique du Nord. Il avait sous ses ordres des Marocains qui étaient ses frères et le sont restés après la guerre. Mon propre père est né au Maroc en 1943, et je suis fier et heureux que le président de mon pays ait rendu un tel hommage, ni pompeux ni déplacé, à tous ces combattants dont on ne parle presque jamais et qui ont cependant rendu d'immenses services, au sens militaire, à la France.
    Cet héritage familial a certainement beaucoup contribué à la construction de ma personnalité. Cela me laisse par exemple... agacé (pour le moins) par un commentaire comme celui de 10h42, que je ne peux comprendre que comme un désir systématique de dénigrer.

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    1. Il ne dénigre pas, il rappelle simplement qu'il ne faut pas avoir la commémoration trop partielle ou hâtive...

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    2. Évidemment que je ne dénigrais pas, mais ça ne vaut pas la peine de répondre. En revanche, il faudrait arrêter de faire comme si on découvrait seulement maintenant le rôle des contingents coloniaux dans la Seconde Guerre mondiale : ce rôle n'a jamais été occulté : simplement, il n'était pas exalté sans mesure, pour des raisons de basse politique, comme on le fait depuis quelques années. J'ai la flemme de chercher, mais il est facile de voir que, dès la seconde moitié des années quarante, ces troupes étaient bel et bien représentées dans les diverses cérémonies commémoratives.

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    3. Oui, elles étaient représentées. Hollande rappelle d'ailleurs des propos de de Gaulle. Par contre, le rôle a été occulté par la manière avec laquelle ont été faits les livres d'histoire.

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    4. Dans les années cinquante et soixante, sans doute. Mais c'est assez logique, en somme, et pour deux raisons se renforçant l'une l'autre :

      1) la "geste" gaullienne voulait que la France se soit libérée elle-même,

      2) les troupes issues de l'AEF et de l'AOF étaient, du fait de la colonisation justement, des troupes françaises ; il n'y avait donc pas lieu de souligner leur "différence".

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    5. Oui...

      Je vais ajouter une précision en réponse à Seb Haton (outre le fait qu'il peut mettre des majuscules à son nom), quitte à la décevoir et pour faire suite à une réponse que je fais plus haut à Didier : si on commémore quelque chose, c'est bien par rapport aux gens qui y ont participé pas à leurs descendants.

      C'est un truc avec lequel on déconne souvent, avec Tonnégrande, descendant d'esclaves "Guyanais", quand il m'explique qu'il porte le poids des chaînes : il le fait en déconnant, lui...

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    6. Mais je suis bien d'accord avec vous, c'est d'ailleurs pour cela que je parle de mon grand-père et des hommes qui servaient sous ses ordres. C'est à eux que je pense, pas à mon ressenti sur la question mémorielle. Mon grand-père était un livre d'histoire vivant, avec toutes les approximations subjectives que cela suppose.
      Je me réjouis du reste de m'être trompé quant à mon interprétation du commentaire de monsieur Goux. Il est vrai qu'être "un descendant" peut rendre un peu soupe au lait (et trop réactif) sur certaines questions. :-))

      En outre, j'appuie le fait qu'effectivement il n'était nul besoin autrefois d'insister sur le rôle de troupes françaises, fussent-elles françaises d'Afrique. Je pense néanmoins que le discours de François Hollande a son importance dans un contexte de tensions inter-communautaires et internationales. C'est en cela que je trouve moi aussi ce discours très bon.
      Quant aux minuscules à mon nom, elles proviennent du fait que mon compte gougoule est enregistré ainsi, ce n'est pas une marque de modestie ni de tentative de modestie :-)

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    7. Ouf ! Corrige ton compte Google.

      Quant aux livres d'histoire sur pieds, je m'en méfie beaucoup. Je connais un type à Bicètre, du même âge que ma mère, qui limite l'histoire de la guerre à ce qu'il a connu. Ce qui fait qu'il ultra fermé sur le reste. Et particulièrement raciste, ce qui est le cas de tous ceux qui font une fixation sur leur propre sort.

      J'ai un âge où les parents ont fait la guerre d'Algerie (pas mon père, il était mobilisé ailleurs). J'ai entendu beaucoup de conneries quand j'étais môme.

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    8. C'est certain... J'appréciais ses histoires d'évasion, de batailles et de fraternité, mais il avait suffisamment d'humilité pour n'en faire que des histoires, pas l'Histoire. En plus, nous avons eu la grande chance que cette expérience l'a rendu xénophile.

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    9. Les témoignages doivent être recueillis précieusement… mais manipulés avec énormément de soin, et par des historiens rompus à cet exercice délicat, tant les témoignages – et surtout s'ils sont de bonne foi – sont sujets à caution.

      Il y a cet exemple (tiré je crois du livre de Jean Norton Cru, premier à avoir compilé et étudié les témoignages de Poilus, juste après la Grande Guerre) de combattants des tranchées, mobilisés en 1917 ou 18, qui, après la guerre, décrivaient avec beaucoup de réalisme l'horreur que représentaient les combats à la baïonnette, la sensation terrible que l'on éprouvait en enfonçant sa lame d'acier dans le ventre d'un homme situé à moins de deux mètres de vous, etc.

      Le problème est que la baïonnette avait été supprimé dès 1915 et que ceux-là ne l'avaient jamais connue. Ils étaient pourtant persuadé du contraire, à cause des récits de tranchées qu'ils avaient incorporés à leurs véritables souvenirs.

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    10. Oui. Ça me rappelle d'un type que j'ai connu à Bicètre, il y a une dizaine d'année. Un ancien facteur ce qui ne change rien au problème. Il était né en 37 ou 38 et nous abreuvait de souvenirs précis de la guerre. Un jour, j'ai craqué et l'ai envoyé chier.

      Pour les baïonnettes, j'ignorais et j'ai un doute. On en avait encore quand je faisais mon service (88). Mais c'était peut-être un truc d'appara.

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    1. C'est indiqué dessus. Je n'ai pas retrouvé dans Google d'images (vieilles cartes postales,...) telles que je voulais. C'est encore là que mon car s'arrête...

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    2. Ah oui, j'avais négligé d'agrandir…

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    3. Mais pourquoi vous me parlez de ta bite, monsieur ?

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  7. Deuxième chose que je voulais ajouter suite à mon billet : le grand père dont je parle était militaire en poste en Asie. La seule chose qu'il a remporté de là bas est un tuberculose, dont il est mort, la maladie dont je parle dans le billet.

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    1. La tuberculose, c'est ce qu'on vous a fait croire : en réalité, il est mort de la vérole que lui ont refilée les trois douzaines de Congaï qu'il a tirées durant son séjour.

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    2. Abruti ! À l'époque, il était jeune marié. Il n'avait pas besoin de tirer ailleurs.

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    3. De tirer ailleurs sénégalais ?

      Cela dit, c'est justement quand on est jeune marié que l'on tire le plus volontiers ailleurs (parce qu'on est jeune, vigoureux, et pas encore habitué à devoir être fidèle…).

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    4. N'oubliez pas que ma mère lit mon blog. Elle pense encore que son père et sa mère sont vierges, peut-être.

      Ça me rappelle Nancy qui commente mon blog bistro. Son mari militaire au bout du monde... Lui qui ne fout probablement rien et elle qui l'attend à la maison après avoir fréquenté les salles de sports. Je me suis toujours demandé lequel était plus cocu alors que, les ayant rencontrés, j'ai du mal à imaginer qu'ils le soient.

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  8. Merci pour ce débat sain et serein.
    Juste une question à Didier qui parle dans un de ses commentaires de la présence d'asiatiques dans les commandos des débarquements libérateurs. Bien que n'en ayant aucune preuve, j'en suis très étonné. Des vietnamiens ont été enrôlés plus ou moins de force pour remplacer les forces vives françaises parties au STO et largués en pleine nature dès 1943 notamment dans le sud de la France, ils n'ont de cesse de se regrouper pour repartir chez eux rejoindre les forces d'Ho Chi Minh et se rebellent contre le pouvoir français. pour éviter les fuites en trop grand nombre, ils ont été regroupés d'abord dans la prison de Baumettes alors en construction puis au Camp de l'Arénas (maintenant occupé par une grande surface et des immeubles).

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  9. Joli billet . Merci d'avoir mis la partie éloge du président et cassage du président d'hier en rouge. Ça permet de mieux profiter du reste du billet, qui est bien, agréable, apaisant.

    Quelque part la politique politicienne c'est bien de la laisser loin des fois...

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    1. Quelle politique politicienne ? Sarkozy sortait les Africains de l'histoire. Hollande fait le service après vente.

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    2. Sarkozy ne "sortait" pas les Africains de l'histoire, il affirmait qu'ils n'y étaient pas entrés. Ce qui était sans doute exact, mais pas forcément à dire… surtout en Afrique.

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    3. C'est quand même difficile de "sortir" des gens qui SONT à la naissance de l'Histoire de l'Humanité.Qu'on le veuille ou non, les Africains sont à l'origine de notre Histoire. le honteux discours dont il est question a été écrit par un inculte pour qui l'Histoire de l'humanité commence à Gobineau alors que le discours (insultant) a été prononcé dans l'Université Cheikh Anta Diop, initiateur de l' "Histoire de l'Afrique" lors d'une thèse soutenue et finalement acceptée à la Sorbonne, sans jamais faire aucune référence au passé de l'historien.

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    4. D'un autre côté, Pierrot, tu réduis l'histoire de l'humanité à une recherche paléontologique, à une époque où l'on avait pas conscience de son existence. Les Africains ont vécu sans ça, de même que les Celtes (mes racines...) qui se sont fait botter le cul par un des premiers peuples civilisés (bien après d'autres, les égyptiens, qui me semblent un tantinet Africains).

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    5. Nicolas, tu devrais lire Chekh Anta Dop. Hors ses études linguistiques, il est passionnant à lire.
      Mais je ne réduis rien, Notre Histoire commune part (suivant les connaissances actuelles) de l'Afrique et Celtes ou pas (il me semble que la très grande majorité de l'Europe est d'origine celte) nous en sommes tous issus.

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    6. Ça veut dire quoi d'origine Celte ? Ça n'est qu'une civilisation qui a été repoussé me vers l'ouest.

      À quoi ce réduit l'histoire de l'Afrique ? (Comme celle de l'Europe, hein !, je ne tiens pas à faire surgir des connards).

      On peut être issu d'un peuple mais peut-on l'être d'une civilisation remplacée par d'autres ?

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    7. L'auteur du discours l'est infiniment moins que vous, inculte, dans la mesure où il n'en est plus à confondre l'apparition des hominidés avec la naissance de l'histoire.

      D'un autre côté, si vous en êtes encore aux délires africanistes de Diop, évidemment…

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    8. Diop, c'est une marque de yaourts ?

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    9. Me renseignant sur Diop à défaut de pouvoir disposer d'un de ces bouquins à la Comète, je vais sur sa page Wikipédia dont l'introduction explique que c'est un guignol.

      Sujet suivant.

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    10. Un guignol, c'est exagéré. Mais enfin, sa lecture est nettement dispensable, d'après ce que j'en puis savoir.

      (Sinon, Diop est plutôt une marque de shampooing…)

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  10. Effectivement, un très beau billet qui a lancé des échanges intéressants.

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    1. Ah Ben tu commentes les blogs, toi, maintenant !

      Merci.

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  11. C'est un beau billet -et merci d'avoir mis le discours de Pépère en rouge pour nous permettre de le sauter facilement. Comme vous avec votre mère, j'ai eu récemment une discussion avec ma grand-mère qui me racontait les derniers mois de l'occupation allemande à Paris: c'était passionnant et, surtout, émouvant.

    Je ne vais pas reprocher à Hollande de commémorer à tout-va: c'est dans l'air du temps et il s'inscrit finalement dans la continuité de son prédécesseur. En fait, il faudrait plutôt s'interroger sur le sens de ces commémorations. Par exemple, quand ils commémorent le débarquement en Provence, en 1964 puis aujourd'hui, De Gaulle et Hollande ne célèbrent pas exactement la même chose: l'un, c'est la France libre, l'autre les soldats africains. Les commémorations visent en effet à flatter des mémoires particulières.

    J'avais un prof, René Rémond, que les amateurs de soirées électorales des années 80 connaissent bien, qui disait que la mémoire était à la fois fragmentaire et versatile. Il avait raison.

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    1. Ca s'arrose.

      Cela étant, de Gaulle est mort une vingtaine d'année après la guerre, Hollande est entré en fonction près de 50 ans ensuite.

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  12. Sacré bon billet en effet... Il m'avait échappé.
    J'ai chez moi environ 2h d'enregistrement de mes grands-parents qui me racontent leurs vies pendant la guerre. Ils ont 92 et 93 ans aujourd'hui. Un jour je mettrai tout ça par écrit... Un jour.

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    1. Oui oui j'y pense... Chaque fois que j'allume mon PC et que je vois ce fichier "interview papi et mamie"... Ça va venir...

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    2. Bon bah voilà... J'ai un peu bafouillé sur mon blog. En attendant mieux.

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  13. Excellent billet. Et cela nous fait remonter nos souvenirs à nous, celles et ceux qui sont né(e)s juste après la guerre et qui avons baigné dedans. même si on nous racontait effectivement surtout des anecdotes.
    Mon père a été fait prisonnier à Dunkerque en juin 1940 et n'est rentré qu'en septembre 1945. Cela aussi on n'y pense pas souvent. Que les débarquements n'ont pas tout réglé tout de suite comme par enchantement. Plus de 5 années perdues. Et comme il avait fait 3 ans de service militaire puis avait été mobilisé, cela lui a fait près de dix ans "sous les drapeaux". Et c'était pas son truc l'armée. Il était très content que fils et gendres aient tous été réformés. Il avait donné pour tout le monde. Mais il en parlait peu ou juste pour nous faire rire en se moquant des Allemands. puis un jour il a décidé de raconter. Mon fils a tout enregistré. Les fermes, les évasions, le camps de "représailles", stalag 369 à Kobierzyn, en Pologne dont ils sont revenus en partie à pied. Et je n'ai jamais encore réusi à décrypter parce qu'il est mort entre temps et que j'ai peur d'entendre sa voix.
    marsupilamima

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  14. Très beau billet. Du personnel au général pour revenir à l'actualité politique, ça a du sens.
    Pour l'anecdote, ma grand-mère qui était veuve et flamande s'est retrouvée à fuir l'arrivée des Allemands et a pris la route avec sa floppée de gosses sous le bras et une carriole. Elle a quitté sa campagne flamande pour terminer à Tourcoing où elle a été accueillie, hebérgée et aidée. D'où mes racines dans cette ville.
    Et d'où ma haine aujourd'hui envers les Flamands qui rejettent tout ce qui n'est pas flamand. A la limite, si ça avait un sens, j'ai plus de sang flamand que la plupart de ces crétins !
    :-))

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