En salle

09 novembre 2014

Pour une ultime République à la place d'une sixième ?

Régulièrement, quand le monde politique est proche de la crise, les copains blogueurs proches du Front de Gauche appellent à rejoindre le mouvement pour une 6ème République, lancé par Jean-Luc Mélenchon, ce qui me fait sourire : comme si une nouvelle Constitution a faire baisser le chômage... Ce matin, un commentateur ventripotent du Plessis-Hébert, faisait remarquer dans les commentaires de mon blog : « Et qu'est-ce que c'est que cette manie française de vouloir changer de constitution tous les quatre matins ? Est-ce que les Américains ou les Anglais changent de constitution ? »

Il a parfaitement raison au sujet de la première phrase. De la deuxième aussi plus ou moins (les Etats-Unis sont quasiment ingouvernables – du moins réformables – et l'Angleterre n'a pas vraiment de Constitution). On peut néanmoins en déduire que s'il n'y a pas de changement chez eux c'est aussi parce que les changements sont plus difficiles à réaliser ou que la Constitution n'a pas besoin de changement, ce qui peut ne pas être le cas chez nous.

Je crois, en outre, que les difficultés institutionnelles de la France viennent du fait que les élections législatives soient couplées avec les présidentielles, comme le rappelait un autre commentateur encore plus réactionnaire ! A mon avis, ce n'est pas un problème Constitutionnel (le couplage des deux n'est pas dans les textes fondateurs) mais institutionnels.

La Constitution, la nôtre, est mauvaise. La preuve : on la change tous les quatre matins, comme dirait l'autre.

Alors, je vais vous proposer un exercice pratique. Nous sommes dimanche, je me repose. C'est à vous de bosser plutôt que de traîner dans des commerces qui devraient être fermés. Comme matériel de travail, voilà le texte de la Constitution. La question est : faut-il une modification de la constitution pour supprimer les Conseils Généraux ou cela peut-il être fait par la loi ? Ne vous positionnez pas comme juriste mais comme simple citoyen qui se pose la question.

Vous avez une demi-heure.

Ma réponse

Vous trouverez la réponse au début de l'article 72 : « Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi, le cas échéant en lieu et place d'une ou de plusieurs collectivités mentionnées au présent alinéa. »

La réponse est donc : oui. La loi peut créer une autre collectivité pour reprendre les fonctions des conseils régionaux et généraux. Cela étant, on y comprend rien, je vous invite à lire le reste de ; l'article 72 et les suivants jusqu'au 75-1, ils concernent tous l'organisation territoriale de la France et je suis souvent amené à les consulter, en tant que citoyen, quand je parle d'organisation territoriale.

Le 75-1 est très drôle : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. ». Que peut donc bien faire le juriste avec ce genre de connerie ? Ca veut dire quoi ?

Revenons à nos Conseils Généraux. Fins observateurs tels que je vous connais, vous aurez remarquez que la Constitution ne parle pas de Conseils Généraux. Pourquoi devoir modifier la Constitution pour les supprimer ? La réponse est donc excessivement simple.

Mais la question n'est pas là. Relisez les articles que j'ai cités et vous remarquerez que la Constitution dit, une ligne sur deux, que le machin doit être prévu par la loi. Donc la Constitution se repose sur la loi pour définir ce pataquès. Dans ce contexte, on peut en conclure que la Constitution ne sert à rien et que les guignols qui ont fait la rédaction initiale et les évolutions successibles étaient saouls.

La Cinquième ?

S'il fallait la modifier, ça serait pour retirer tout ce qui sert à rien ou qui nécessite d'être modifié de temps en temps au gré des projets politiques. En supprimant un tas de trucs, de fil en aiguille, nous en arriverions à dire qu'il faut des députés élus au suffrage universel direct et que l'Assemblée les regroupant avait la décision ultime dans la loi. En grattant un peu, on trouverait la nécessité d'un président qui puisse dissoudre l'assemblée quand elle chie dans la colle et faire le guignol sur les Champs-Elysées le 14 juillet. Et hop ! Voila une belle constitution que j'ai faite.

D'ailleurs, regardez les textes fondateurs du Royaume Uni et ce qui sert de Constitution aux rosbifs, que je vais traduire de l'anglais au français : il y a un roi ou une reine et deux chambres et c'est bien tout, bordel.

J'abuse un peu, je crois qu'une Constitution doit mentionner l'existence d'un chef de gouvernement responsable devant l'Assemblée parce qu'il faut bien un gugusse pour organiser le job mais cela se discute.

La Sixième ?

Selon les principes dictés par moi ci-dessus, vous comprendrez aisément que, finalement, je suis opposé à la Sixième. Je suis favorable à l'ultime République, celle où les textes prévoient uniquement l'élection de représentants du peuple pour voter les lois (lois qui peuvent prévoir d'autres élections).

Si je vais sur le site web du mouvement pour la sixième, ils ne proposent qu'une la création d'une constituante, ce qui ne veut rien dire vu qu'elle n'aurait aucune légitimité. Ils sont drôles. Pour renforcer la démocratie, ils voudraient imposer un truc. Si vous lisez bien leur machin, vous le rejetteriez en masse vu qu'il a un contenu politique dans les explications.

En d'autres termes, ils veulent faire une nouvelle machin en prenant en compte uniquement un argumentaire en provenance de la gauche de la gauche sans s'occuper des 75% de la population qui ne sont pas d'accord avec eux...

L'Ultime ?

Article 1 : des élections au suffrage universel direct sont organisées au maximum tous les cinq ans pour élire des députés qui détiennent le pouvoir législatif. Ils sont au minimum au nombre de 500, ils peuvent être élus à la proportionnelle sur des scrutins de liste au niveau national ou d'une des subdivision la nation prévues par la loi ou élus dans une circonscription par un scrutin nominal à au moins deux tours. Une modification des conditions d'organisation du scrutin, prévue par la loi, ne peut être prise en compte qu'après l'élection de la prochaine Assemblée (qui aura donc la possibilité d'annuler les modifications).

Article 1bis : la loi doit prévoir l'existence d'au moins une autre Assemblée et le fonctionnement conjoint des deux, la première ayant toujours le dernier mot.

Article 2 : la loi détermine les modalités de désignation d'un Président, d'un roi, d'un pape,... qui aura notamment la possibilité de dissoudre l'Assemblée au minimum un an après l'élection d'une nouvelle.

Article 3 : peuvent voter à l'élection prévue à l'article 1, tous les gens nés sur le sols du pays il y a au moins 18 ans ou de parents répondants à ces deux conditions. Les autres élections prévues par la loi peuvent avoir un collège électoral différent.

Alors, ce n'est pas une belle Constitution, ça ?



25 commentaires:

  1. Donc Monsieur GOUX n'a qu'à moitié raison.

    Et les sénateurs ?

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  2. Je prenais le mot "constitution" au sens large, pour ce qui concerne l'Angleterre. Cela dit, je me demande d'où vous sortez que les États-Unis sont ingouvernables, eux qui font avec constance la preuve du contraire depuis deux cents ans…

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    1. Vous vous souvenez de beaucoup d'action du gouvernement États-unien à part faire la guerre ?

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    2. Depuis leur indépendance, les États-Unis ont fait beaucoup moins la guerre que la France, l'Angleterre ou l'Allemagne. Et, par deux fois, s'ils l'ont faite, ce fut pour venir nous tirer du pétrin.

      À part cela, je ne comprends pas trop ce que vous entendez par "actions". Il me semble qu'avoir pu devenir un pays prospère, dans lequel les libertés fondamentales de l'individu, comme celles de la presse, ont toujours été respectées, ce n'est déjà pas si mal.

      Sinon, comme "action", on pourrait parler du plan Marshall, qui à permis à l'Europe de se relever de ses ruines. Ou encore d'avoir largement contribué (parfois en faisant la guerre, certes) à éradiquer le communisme, l'autre grande tyrannie du XXe siècle.

      Ce n'est déjà pas si mal, non ?

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    3. Oui, mais ce n'est pas le sujet. Le gouvernement fédéral n'a quasiment aucun pouvoir sur le plan intérieur. La Constitution, là-bas, s'attache plus au droit des citoyens et à l'organisation des pouvoirs (lisez-la nôtre...).

      Elle est vue comme un texte sacré depuis la création de la Fédération et ça ne l'empêche pas d'avoir été modifiée plus de 23 fois.

      Le Président des USA a très souvent des chambres aux mains de l'opposition : il ne peut rien faire à l'intérieur.

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  3. magnifique. Et prévoir aussi un cahier de mission de service public des assemblées?

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  4. Et si on débordait la gauche de la gauche par sa gauche, en organisant une pétition pour une VII ème République, en sautant la VI ème ?

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    1. C'est pour ça que je passe directement à la Constitution ultime.

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  5. Clarifier les rôles du président et du chef du gouvernement, responsabilité du gouvernement devant la chambre, et une loi suffit pour réformer les collectivités territoriales, ça m'irait bien (rien à voir avec la Constitution) mais surtout choisir enfin si l'on veut un régime parlementaire, ou présidentiel mais pas cette espèce de régime qui est tantôt l'un ou l'autre selon les circonstances et la cohabitation .
    Celle là est très bien ,sans ses défauts...

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    1. A ben t'as changé de pseudo ?

      Les rôles de tout un chacun sont parfaitement bien définis, d'où, a priori, l'hostilité de Didier Goux, par exemple, à tout modification, sujet sur lequel je le rejoins, à un détail près : il faudrait supprimer toutes les modifications faites et revenir à un truc plus clair. La seule solution étant une Constitution épurée, je ne vois pas d'autres solutions.

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    2. Qui gouverne ? Le président ou le premier ministre? Ce dernier ne gouverne réellement qu'en période de cohabitation .... ou lorsque le président décide de prendre un peu de hauteur ....

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  6. La 5ème est très bien mais il faut clarifier le rôle du président et celui du chef du gouvernement , choisir si l'on veut un régime présidentiel ou parlementaire et pas ce truc où selon les résultats des élections , on a tantôt l'un tantôt l'autre, voire selon la popularité du président .
    Pour la réforme des collectivités territoriales , une loi ou des lois devraient être suffisantes, pas de modifications de la Constittution .

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    1. Ton commentaire était resté coincé dans les tuyaux !

      Si on supprime toutes les modifications faites, on supprime l'élection du président au suffrage universel. On parlait des USA avec Didier. A la limite, c'est le pire des système (ou le meilleur selon ce qu'on regarde : ils s'en sortent très bien au niveau de l'économie) mais on a un régime présidentiel où le Parlement peut tout bloquer...

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  7. Pour répondre à la question posée quand tu parles des langues régionales, le rédacteur de la 5° constitution était représenté dans le Canard Enchaîné avec un entonnoir sur la tête.

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