En salle

20 juin 2015

Le paradoxe du soclib

Etre libéral de gauche n'est pas une sinécure. Cette fois, j'ai envie de donner des baffes à Manuel Valls alors que j'aurais assez tendance à soutenir sa politique dont le sujet du moment : la loi Macron. Cela m'est venu à la lecture du titre de cet article des Echos. Non, Manu, le travail n'est pas une valeur et surtout pas une valeur de gauche. "La valeur travail" était un des thèmes de Nicolas Sarkozy et en racontant ce genre de connerie, tu donnes raisons à ceux qui te comparent à Nicolas Sarkozy. Fais attention à ta communication, aussi avec la gauche, bordel.

Point par point, je ne suis pas d'accord, non plus, avec  l'argumentaire de Madame Taubira mais elle a raison sur le fond : je rêve aussi à une société de loisirs et je suis partisan d'une baisse du temps de travail. 

Surtout, je ne crois plus au retour du plein emploi non pas pour des raisons économiques mais, d'une part, parce que la technologie permet de produire plus en travaillant moins et, d'autre part, parce que ce que l'on pourrait s'imaginer avoir besoin de produire (des voitures, des maisons, des routes,...) nous le sera interdit pour des raisons environnementales amplifiées par l'évolution de la démographie.

A Loudéac, on a une tradition : faire la fête de la musique le vendredi qui précède le 21 juin. Il faut bien reconnaître que la musique n'est qu'un prétexte pour sortir de chez soi, ce dont je n'ai pas besoin, et de discuter avec les gens. C'est ainsi que j'ai passé une partie de la soirée à papoter avec un copain, socialiste local, qui, comme moi, regrette que la réforme fiscale promise n'ait pas eu lieu plus tôt, mais qui, en plus, est totalement en opposition à Manuel Valls.

J'ai envie de dire que tout le monde se plante, sauf Christiane Taubira quand elle décrit ce rêve d'une autre société. Elle n'est pas au Parti Socialiste. Moi non plus. A une époque, Manuel Valls voulait changer le nom du parti, d'ailleurs !

Il faut que la gauche de la gauche comme la droite de la gauche, le centre de la gauche et je ne sais pas quoi de la gauche réfléchissent à cette évolution de la société, où le travail n'est plus au centre de la société. Entre Manu qui parle de « valeur travail » et la gauche qui braille quand on veut toucher au droit du travail, il y a un gouffre évident mais aussi un proximité : le travail. Le gouffre qui me sépare de ces braves gens est donc probablement plus large.

Il faut que la gauche remette ces sujets au cœur du débat : le modèle de société à l'heure de la disparition du travail, notamment du travail salarié à plein temps, autre sujet de préoccupation. Le CDI à 35 heures ne sera plus la règle. Il sera remplacé par des contrats d'intermittence ou des contrats d'autoentrepreneurs ou des machins comme ça, quand ce n'est pas des CDI, de l'intérim et autres. Il faut se le coller dans le crâne : non seulement le travail va diminuer mais aussi le travail salarié. Le sujet est d'autant plus difficile à aborder que les Français veulent du travail.

Mais leur dire que l'on reviendra vers le plein emploi est leur mentir et s'il faut réformer le code du travail, il faut leur dire, et quand on est contre, il ne faut pas crier... au mensonge.

Et il nous faut réfléchir à l'organisation de cette société de loisir qui nous sera imposée par la progressive diminution du travail.


Manu, arrête tes conneries. Aujourd'hui, je me sens plus proche de Christiane que de toi alors que je défends une de tes réformes qu'elle critique. A gauche, reprenez-vous ! La plus belle loi de ce quinquennat est probablement celle qu'elle a portée mais vous la défendez au nom des droits alors que c'est au nom des libertés qu'il faut le faire.

17 commentaires:

  1. Je ne trouve pas les deux discours si contradictoires. C. Taubira évoque une sorte d'idéal sociétal auquel on ne peut qu'adhérer tout en rappelant qu'on ne peut pas interdire aux touristes de vouloir faire du shopping à Paris et aux beaufs de s'emmerder dans leurs clapiers en placoplatre de banlieue et qui vont promener bobonne dans les marque-avenue. D'un autre côté, le discours plus rigide de Valls sur la "valeur travail" ne doit pas être entendu de la même manière que chez Sarko. Ici le terme utilisé remplace "envie de réussir" et "ambition" ce qui manque beaucoup à nos mômes (je sais de quoi je parle j'enseigne au collège). Sarko n'en parlait que pour exciter les français contre les chômeurs...

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    1. Je n'ai pas employé le terme "contradictoire". Je parlais de paradoxe.

      Pour Valls, peut-être. Mais il devrait utiliser d'autres mots.

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  2. J'ajoute que le canard que tu cites, titre de façon un peu provocatrice histoire de faire de la mousse et laisser croire à une tension au gouvernement... mais ça c'est le jeu médiatique.

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  3. y a qu’une soluce au pb du chômage : partager le travail entre les gens qui veulent travailler… en réduisant le temps de travail des individus (horaires hebdo, mensuels ou annuels on s’en fout). Ca permet aux cinq millions de chômeurs d’accéder à une vie de travailleur/consommateurs et de retrouver la dignité qu’ils méritent.

    Les Gattaz Fillon et autres crétins pourront crier, ça coutera moins cher à la société que les 40 milliards du Pacte d’Irresponsabilité et les milliards de l’indemnisation des chômeurs.
    Les 35 heures ont créé 350.000 emplois (voir le rapport parlementaire http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-enq/r2436.asp de Barbara Romagnan)…
    Donc il nous faut un courageux à la manoeuvre qui expliquerait les vertus de la règle de trois qui consiste à partager le travail et la richesse intelligemment au titre de Liberté EGALITE Fraternité et qui le mettrait en place dès maintenant.
    Bon week-end Nicolas.

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    1. Il y avait longtemps que je n'avais pas lu un commentaire aussi stupidement et naïvement "partageux" : ça fait plaisir !

      Sinon, Nicolas, j'aime beaucoup quand vous vous transformez en prophète. Il est possible que l'on ne retrouve jamais le plein emploi, mais en attendant, de nombreux pays, européens ou non, près de chez nous ou plus loin, ont des taux de chômages très nettement inférieurs aux nôtres… et à la baisse.

      Au lieu de "réfléchir à un nouveau modèle de société", alors qu'on ne lui demande rien de semblable, surtout pas, les gens au pouvoir, de gauche comme de droite, feraient mieux de faire modestement et efficacement le travail pour lequel on les paie.

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    2. Didier, faire baisser le chômage est facile : il suffit de supprimer des articles du codes du travail ou des cotisations sociales, mais les gens ne sont pas plus riches pour autant. En Allemagne, par exemple, il y a beaucoup plus de travailleurs pauvres qu'en France.

      "Nouveau modèle de société", c'est quoi ? Un jour vous aurez des machins électroniques sur tous les produits que vous achèterez et le passage en caisse sera automatisé. Il n'y aura plus de caissières (et c'est aussi bien, c'est un boulot pénible et en plus ces connes font la conversation). Et tout va aller ainsi...

      Par contre, il y aura donc moins de travail à faire, donc moins de travailleurs, donc les gens n'auront plus de sous et ne pourront plus consommer. C'est le problème central et nos politiques sont là pour réfléchir à cela.

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    3. Mon cher Didier, le "partageux" que je suis vous remercie pour la stupidité dont vous le créditez.
      Naif surement pas, utopiste certainement.
      Mais un garçon intelligent comme vous ne peut refuser d'admettre qu'hors le partage point de salut.
      Si nous ne mettons pas en place rapidement un partage équitable, les totalitaires se chargeront de nous l'imposer. Et là, vous, comme moi, nous pleurerons le temps d'avant.

      Je sens à travers vos autres commentaires chez Nicolas, que vous vous raccrochez à un monde qui, j'ai le regret de vous le dire n'existe plus depuis belle lurette. On peut toujours rêver en relisant Vialatte ou Léautaud à un pays fantasmé.
      Mais le pays qui vient devant nous n'est plus cette vallée de miel et des trente glorieuses. Donc regardons ce monde comme il est et tentons de faire bouger les choses dans un sens intelligent, si on le peut encore.
      Bien cordialement.

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  4. Entièrement d'accord avec Taubira et totalement avec ce billet ainsi que le post d'Elzede...

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  5. Je crois que la seule façon de faire diminuer le chômage est de diminuer la productivité...

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  6. Consciente des contraintes économiques , du changement réel de la société des sociétés devrais-je dire elle en comprend les changements... devrait elle pour autant taire ses rêves ?.... Bien sûr que non !!! . Le Premier Ministre à tord de réagir ainsi car il donne du grain à moudre à la droite et à dire vrai l'a t'il vraiment lu cet interview !!!! J'en doute .... Calmos Manu Calmos ;-))
    vincent

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  7. 1% de la population mondiale détient 95% des richesses. ça veut dire que les 99% qui se partagent 5% de cette richesse travaille pour ramasser les miettes leur permettant de plus ou moins se nourrir, se soigner, se loger... et bien souvent plutôt moins que plus.

    Ce qu'il faut partager c'est la richesse, pas le travail.

    D'ailleurs nos élites ont bien compris que ce qu'il faut c'est de l'argent, plutôt que du travail. Eux, l'amassent en dormant où pendant leurs parties de golf (capitaux auto-fructifiant, revenus d'actifs hérités...) pendant que les shadocks pompent...

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  8. Je suis d'accord en partie avec l'interrogation qu'on doit avoir sur le travail..."Tripalium", un instrument de torture qui a donné son origine au mot travail...Mais j'attends toujours que quelqu'un me démontre que sans intervention humaine, il y a création de richesse...

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  9. Un tout grand merci pour votre site. C’est un plaisir pour toutes & tous.
    Bonne continuation

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  10. En incluant les travailleurs qui n'ont effectué que quelques heures de travail dans le mois, la durée hebdomadaire moyenne de travail se situe en France autour de 38 heures.Elle est aux US comme en Allemagne de l'ordre de 31 heures. Les taux de chômage correspondants sont de 11% en France et de 5 à 6 % aux US et en Allemagne.
    Il y a derrière cela la place énorme du temps partiel non choisi et notamment chez les femmes ( l'écart moyen de travail hebdomadaire effectif entre salariés hommes et femmes en 2014 est de 4.7 heures en France contre 8.4 en Grande Bretagne et 8.6 en Allemagne).
    Cela veut dire que ces pays ont tranché brutalement la question de la réduction du temps de travail, à un coût social élevé ( petits boulots, temps partiels contraints, etc...) pour une partie de la population et donc,en fait, celle du PARTAGE ( en l'occurrence inégalitaire ) de ce temps de travail, ce qui n'est pas le cas de la France.
    Car il est bien là le problème et le débat sur les 32 heures lancé par Ch. TAUBIRA le pose clairement.
    De là à se projeter vers une répartition des richesses produites non corrélée au travail, on n'en n'est encore pas là.

    castor

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