En salle

01 juin 2020

Conf 77 - Rétrospective à la veille de la réouverture des bistros


Indonésie: un homme tué par un tigre de Sumatra
En ce soixante-dix-septième journée de confiture et cinq jours fériés idiots, on peut considérer que nous finissons la onzième semaine et cette série de billets numérotés même si je n’ai aucune parole quand je jure avec moi-même : les bistros rouvrent demain et j’ai presque trois mois de retard à rattraper !

J’imagine déjà les scènes. La Comète étant fermée, nous mettrons les masques pour entrer dans les autres bistros pour commander à boire et nous les enlèverons dehors pour siroter les verres de pression. Nous allons franchir les sommets du ridicule et c’est presque heureux, paradoxalement.

Nous fûmes grotesques confinés et le seront à la sortie !

 S’il y a quelque chose que je regrette, au sujet de ces trois mois, c’est d’avoir loupé la fermeture de la Comète et de ne pas avoir salué les bistros que je fréquente à la Défense vu que je n’aurais probablement plus l’occasion de retourner dans ce coin trop éloigné du RER pour que j’ai le courage de faire le retour.

Le jeudi 12 mars, j’étais au Nouveau Monde quand Macron a fait son discours, plein de gravité mais, au fond de moi, je n’y croyais pas vraiment. Le vendredi, je suis retourné au boulot et on voyait bien que les chefs préparaient quelque chose mais je restais innocent. Le soir, je suis passé au nouveau monde, pour la dernière fois.

Le samedi, j’ai déjeuné à la Comète puis y suis retourné après la sieste. Roger, le serveur, a reçu un coup de fil de son fils qui bosse au ministère de l’intérieur et nous a annoncé : les bistros seront fermés ce soir. On a attendu la confirmation officielle puis j’ai foncé chez Leclerc faire des provisions pour une semaine en cas de confinage. Jojo le loufiat a reçu un appel de la patronne : tu peux préparer le bistro pour une longue fermeture. Il fallait donc qu’il mette à la poubelle les produits frais. Elle n’a pas pensé à lui dire qu’il pouvait rincer la gueule aux clients pour finir les fûts de bière. Nous sommes partis plus tôt que d’habitude…

Le dimanche, j’avais décidé de ne pas aller voter, par principe. Si la situation de l’épidémie poussait les autorités à fermer les bistros, il était complètement délirant d’aller aux urnes. Néanmoins, en me promenant à la recherche d’un bistro qui ne respecterait pas les consignes, je me suis retrouvé près du bureau de vote. J’ai accompli mon devoir puis suis rentré.

De nouveau au bureau le lundi, les chefs nous ont préparé au confinement : si Macron allait prendre la parole, le soir, c’était pour l’annoncer. Pendant une partie de la journée, je me suis demandé si je n’allais pas rentrer en Bretagne puis j’ai pesé le pour et le contre, j’étais bien mieux chez moi, à Bicêtre, avec un Leclerc juste en dessous, qu’à Loudéac avec les bistros fermés. Au bout de deux ou trois semaines, j’ai regretté cette décision alors que d’autres arguments se battaient en sa faveur, notamment le fait de ne pas risquer d’aller contaminer la Bretagne.


J’ai fini par ranger mon bureau puis à prendre mon PC et mon portable professionnel et suis parti vers 18h. Le bar tabac près du Nouveau Monde était ouvert. Je suis allé saluer le patron. Il m’a demandé si je voulais un verre. Je lui ai dit qu’il n’avait pas le droit d’en vendre. Ce couillon était persuadé que les bars tabac n’étaient pas concernés. J’en ai profité, évidemment, et j’ai bu suffisamment de bière mais pas trop pour ne pas avoir envie de pisser dans le métro. C’était une bonne soirée, on a bien rigolé avec des jeunes du quartier. Puis je suis rentré… Ca fera onze semaines ce soir alors que Macron avait dit deux semaines et les chefs huit. Pour moi, ça fera six mois au total lors de mon retour au bureau.

Les deux ou trois premiers jours, dans mon appartement, furent dramatique pour moi, dans mon souvenir. Et, progressivement, en deux ou trois semaines, le rythme a été pris. Le fait de disposer de l’attestation sur le smartphone a été une première délivrance, pour moi (d’autant qu’un copain avait développé un script qui la remplissait automatiquement, il ne restait plus qu’à cocher la case en face du motif et à générer le QRCode). Il ne fallait plus que je recopie à la main ce putain de formulaire…

La deuxième délivrance fut la fin officielle du confinement, quand il a été supprimé, puis quelques jours après, quand j’ai pu acheter un ordinateur portable. C’était il y a deux semaines. Je n’étais plus « obligé » de passer mon temps sur celui de la boîte avec des restriction d’accès à internet à cause du VPN et, surtout, j’avais la sensation d’être au boulot en permanence ce qui était d’autant plus dérangeant c’est qu’on a été obligés de prendre 10 demi-journées de congés.

Cette « deuxième délivrance » a, en revanche, était une belle douche froide. Les huit semaines annoncées par les chefs étaient passées mais on se disait bien depuis quelques temps que les entreprises seraient incitées à maintenir le télétravail pour ne pas obliger les gens à s’entasser dans les transports en commun. C’est ballot car, dès fin avril, j’avais commencé à rêver à mon retour en Bretagne et à y travailler. Il fallait que je commande sur Internet quelques produits, comme une tireuse à bière, un barbecue, un taille-haie électrique, une nouvelle télé, un PC,… Dans ma tête, j’étais déjà déconfiné. Puis le premier ministre a annoncé la règle des cent kilomètres, idiotes, comme toutes les annonces faites depuis le début. Mon moral n’est pas tombé en chute libre, j’avais d’autres satisfactions, comme ma sœur et mon frère qui pouvaient allez voir ma mère et cette dernière heureuse comme tout de pouvoir aller chez le coiffeur avant !

Et pendant toute la période entre l’annonce du premier ministre et le 11 mai, j’étais persuadé que j’allais pouvoir émigrer… J’en ai même fait un billet de blog. Il me suffisait d’une attestation de la boîte pour dire que mon lieu de télétravail était Loudéac. Mon directeur a été maladroit quand il a contacté les RH, il a laissé penser que je voulais une « fausse attestation » et que je ne pouvais pas travailler normalement.

Cette « deuxième » a été aussi la possibilité d’acheter des masques pour pas cher (pour un célibataire, pour une famille et des mômes qui vont à l’école, ça fait un paquet) à un moment où je ne voyais pas le bout de la pandémie. Je pensais bien que ça allait se calmer mais je pensais sérieusement que les mesures de protection, telle que le masque, allaient durer éternellement et, même aujourd’hui, alors que la maladie recule vraiment, je me demande si ça va s’arrêter un jour ! D’un autre côté, ce n’est pas très grave si on n’arrête de faire la bise aux collègues et de se prendre des postillons sur la tronche dans le métro.

La quatrième délivrance était dans la journée de jeudi quand j’ai lu que le premier ministre allait probablement supprimer la limite des 100 kilomètres (on le sait, il l’a annoncé le soir, mais j’étais persuadé que ça allait arriver : cette limite ubuesque avait été imposée pour empêcher au gens de partir pour la Pentecôte et elle cesse le lendemain, comme tout le confinement absolu a cessé après deux longs week-ends ! Ils ne pourraient pas l’annoncer franchement, ces cons ? Cela n’aurait pas été plus simple de dire que les voyages étaient interdits sauf pour raisons impérieuses de jeudi dernier à mardi prochain inclus ?).

Dans la minute qui a suivi l’annonce d’Edouard Philippe mon billet était commandé ! Il l’aurait été dans les dix secondes si je n’avais pas faire une erreur de manipulation…

Mais je n’ai pas parlé de la troisième ! C’était au début du week-end dernier, j’ai croisé un copain, place de la Comète. On a discuté, puis j’ai eu l’idée de génie : acheter une bière fraîche dans l’épicerie du coin et la boire, avec lui, devant… Depuis, j’ai pris le pli, tous les soirs, à 18h30, d’y faire un détour et de rester une heure ou deux… Des copains ont pris l’habitude et, encore quelques jours, ça serait devenu un rituel ! Mais c’est terminé ! L’Arabe du coin est fermé le lundi.

Et demain, les bistros ouvrent !

2 commentaires:

  1. Trognon ton billet ! 🙂 il sent les beaux jours. J’aime beaucoup la fin.
    Helene

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  2. Bonne soirée devant la Comète et bon voyage pour demain.

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