En salle

02 mai 2022

Nupes et non avenir

 


L’actualité politique du week-end a tourné autour des accords entre les forces de gauche avec, notamment, la validation de celui entre LFi et EELV pour la création de la Nouvelle Union Populaire Economique et Sociale (NUPES) et vous aurez compris que je n’y crois pas. J’allais préciser, en introduction de ce billet, comme assez souvent, un truc du genre « je n’y crois pas mais entendons-nous bien, je souhaite que cela réussisse et que la gauche retrouve le pouvoir. » Mais cela serait mentir. Je ne souhaite pas qu’une gauche menée par le leader insoumis arrive au pouvoir car je ne pense pas que l’on puisse raser gratis…

Par exemple, l’urgence, pour les retraites, est de les augmenter (pas pour faire joli dans un projet mais parce que la dépendance finit par coûter cher) pas de réduire l’âge et l’on finira par avoir un problème de financement à force de faire n’importe quoi par idéologie. Il faut, en se domaine, améliorer la répartition, d’une part, en alignant tous les régimes et, d’autre part, en prenant en compte la pénibilité réelle. Par exemple, il est probablement très pénible de conduire un métro (toute la journée, dans une rame dans le noir avec toutes les minutes un arrêt à une station avec, en plus, le risque d’un « incident grave de voyageurs) : des retraites à 55 ans sont parfaitement méritées. Par contre, je connais des cadres dans l’informatique des banques (dont un gros qui vient d’avoir 56 ans) : s’ils sont effectivement lassés à cause de trente ou trente-cinq ans d’une certaine routine, ne me dites pas qu’ils ne peuvent pas tenir jusqu’à plus de 60 ans.

 

D’ailleurs, les lascars m’énervent à reventer tous les progrès sociaux depuis le Front Populaire (alors que la lecture d’un manuel scolaire montre qu’il y a eu plus de progrès ou presque au cours du régime de Vichy, comme la création de la sécu, du SMIC, du minimum vieillesse, de la retraite par répartition et j’en passe comme l’obligation de la médecine du travail).

Par ailleurs, rappelons que le Front Populaire a été mis en place lors d’une période politique assez sombre chez nos voisins, par réaction au fascisme, et n’a duré que deux ans (pour être remplacé par ceux qui ont préparé l’invasion par l’Allemagne, pour résumer).

Loin de moi la volonté de réduire les acquis de cette période mais, n’oublions pas, par ailleurs, que le Front Populaire ne fut pas issu d’un partage de circonscriptions sur la base d’un projet imposé mais par désistement des moins bien placés au second tour pour s’assurer de la victoire sans compter que ce sont les voix des radicaux (accusés de collabos…) qui ont aussi permis d’assurer le pouvoir

N’oublions pas, non plus, que les périodes où la gauche a pu gouverner au sein d’une coalition ne fut pas sur la base d’un programme. D’ailleurs, il y a longtemps que le « programme commun » avait été enterré, en 1981.

 

Je le disais hier dans Facebook : il faut ratisser large. On n’arrivera pas à faire que les tous les électeurs aient les mêmes idées mais nous pourrons faire en sorte que la somme des idées puisse être majoritaires. En d’autres termes, un candidat socialiste avec un programme issu de l’insoumission pourrait ne pas gagner alors qu’il le ferait avec un programme plus modéré. A l’issue du scrutin, par contre, les insoumis pourront gouverner avec les socialos (le leadership étant assuré par la formation arrivée en tête, comme le prévoit la tradition républicaine).

Parlons peu, parlons bien : l’union est un piège à cons. Malheureusement, les militants tournent entre eux dans les réseaux sociaux ou dans leurs cercles d’amis et oublient que tout n’est pas rose, justement. Mélenchon a fait 22% et si les 577 circonscription ont un candidat dont les affiches portent sa tronche et les bulletins son nom, on n’arrivera pas à dépasser ces 22% (allez, disons 26 ou 27, ce qui ne suffit pas à faire une majorité sauf avec le hasard des triangulaires). Je suppose que les cadres des partis ne sont pas dupes, notamment Méluche lui-même, qui n’est pas un lapin du six semaines. LFI veut dominer tous les autres et le faire savoir et les autres cherchent à exister, ne serait-ce que pour toucher un peu d’oseille et éviter ce qu’ils pensent être une déroute annoncée.

Grand bien leur fasse… Mais ces ânes vont faire perdre mon camp, celui d’une gauche pragmatique, ce qui m’énerve.

 

Et EELV m’a perdu, d’ailleurs, alors qu’en début de campagne, j’avais de la sympathie pour Jadot. J’ai lu l’accord (ou, du moins, le communiqué d’EELV suite à la signature). Tout tient en une phrase (en gras) dans ce paragraphe : « En Europe, nous voulons en finir avec le cours neolibéral et productiviste de l’Union européenne pour un nouveau projet au service de la construction écologique et sociale. Pays fondateur de l’Union européenne, la France ne peut avoir pour politique ni la sortie de l’Union, ni sa désagrégation, ni la fin de la monnaie unique.. Mais si certaines règles européennes sont un point d’appui (protection des consommateurs, normes environnementales…), de nombreuses autres sont en décalage voire en contradiction avec les impératifs de l’urgence écologique et sociale. Par exemple, il est impossible de nationaliser EDF dans le cadre des règles de la concurrence, d’investir pour respecter nos engagements climatiques en raison des règles budgétaires, etc.  Pour être en capacité d’appliquer notre programme et respecter ainsi le mandat que nous auront donné les Françaises et les Français, il nous faudra dépasser ces blocages et être prêt-es à désobéir à certaines règles européennes (en particulier économiques et budgétaires comme le pacte de stabilité et de croissance, le droit de la concurrence, les orientations productivistes et neolibérales de la Politique Agricole Commune etc.). Cela ne peut se faire que dans le respect de l’Etat de droit (tel que défini aux articles 2 et 7 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). Nous combattrons fermement les attaques contre les libertés fondamentales des gouvernements d’extrême-droite hongrois et polonais.  Nous ne serons ni les premier-es ni les dernier-es à le faire, en France comme en Europe (Espagne sur les prix de l’énergie, Allemagne sur la mise en concurrence des entreprises de l’eau potable, Portugal sur les aspects économiques et budgétaires etc.). »

Une toute petite phrase, suivant une justification, nécessairement foireuse mais faisant joli et une fin absolument ignoble (en France, on fait ce qu’on veut mais les autres pays à la limite du fascisme doivent respecter les traités).

 

Il se trouve qu’on a passé des accords – des traités – avec les pays voisins. On peut maintenant trouver des points auxquels on est opposés et demander une renégociation mais, une promesse de ce genre, ça se respecte. Par exemple, on a fait une monnaie commune avec eux ce qui implique des conditions de stabilité : on ne peut pas s’asseoir dessus (ou alors, faisons-le en accord, justement, comme cela a été fait sous l’égide de Macron pendant la crise économique consécutive à la crise sanitaire).

Si le PS signe un papelard contre l’Europe, il perdra toute crédibilité à exercer toute responsabilité. Ca serait idiot, non ?

 

P.S. : message de service : je suis pendant une période assez longue, peut-être, à Paris. La gestion des commentaires de ce blog risque d'être assez aléatoire.

10 commentaires:

  1. J'ai été très étonné par le passage où tu attribues des avancées sociales au régime de Vichy.
    La création de la Sécu est à mettre au crédit du CNR en 1945.
    La création du SMIC date de 1950
    La retraite par répartition existe depuis 1946.
    Par contre l'obligation de la Médecine du Travail date bien du régime de Vichy en 1942.

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    1. J'ai mis la source en lien. Mais tu auras compris que je ne cherche pas à refaire l'histoire, au contraire, je suis seulement fatigué des révolutionnaires d'opérette qui cherchent à s'approprier tous les progrès sociaux de l'histoire en question.

      Effectivement, le SMIC n'a pas été créé en 1941 mais le SMIG l'a été en 1950, et remplaçait un dispositif créé en 1941 par la loi du 4 octobre.

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    2. Et pour donner de la connaissance et de la culture aux historiens d'opérette, on pourrait aussi leur dire que la Tradition veut que la Caisse Accident du Travail remonte à la construction du premier Temple de Jérusalem !!!
      En ce moment les mouches doivent souffrir.

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  2. Tiens EELV veut nationaliser EDF dont 88% des actions sont detenues par l'Etat. Ta conclusion est très juste : ils menacent de renverser la table (expression de Melenchon à un moment) et pensent que tout le monde dans l'UE va dire "bravo la France, vous avez raison"...

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    1. Ils sont fous. Le programme de LFI contient la nationalisation de la SNCF...

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    2. misère et stupéfaction.

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  3. C'est surtout la difficulté à se raccrocher aux branches qui est assez remarquable. Comme les tweets de ex futurs candidats qui annoncent renoncer pour se ranger derrière. Remarque ce sont pour la plupart des jeunes dans des circos dures pour eux. mais bon
    Ils sont tous en train de manger leur chapeau sur les marqueurs utilisés pour le 1er tour de la présidentielle. L'Europe, le nucléaire, etc... même Roussel se range bien gentiment...à pleurer
    En 2012, derrière le "tout sauf sarkho" il y avait un corpus cohérent, là tout sauf une législature LREM mais en bordel total. on les appelera comment les futurs frondeurs? national niniste?

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    1. D'ici deux mois, ils auront regretté leurs choix...

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  4. Ce qui est assez étonnant, c’est qu’il semble que l’électorat de Mélenchon aux présidentielles n’avait rien de « populaire », d’où sans doute le ralliement de la majorité du ps qui n’a pu qu’en faire le constat.

    Est-ce que le vote en faveur d’un homme peut se comparer celui en faveur de députés défendant un programme ? Hum, à voir.

    Hélène

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    1. Oui, les militants "insoumis" sont passés complètement à côté de la psychologie électorales des votants. Pour ta dernière question, c'est bien Mélenchon qui figurera en gros sur les affiches. Et c'est une erreur (disons un piège tendu par LFI).

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