Avant-hier, j’étais au comptoir du Café de la garde et je
regardais la télévision qui diffusait BFMTV mais le son était coupé. J’ai
compris aux « sous-titres » que les braves gens dans le poste
débattaient des différents volets de « l’affaire Shein ». J’ai moi
aussi des avis et en plus j’ai un blog pour les véhiculer.
En préambule, je précise que je n’ai jamais rien acheter à
cette boite mais que je suis client de concurrents comme TEMU et le truc de
shopping intégré à TikTok. Je vais me justifier par la suite parce que je pense
qu’il y a des millions de Français qui ont franchi le pas, comme moi.
Commençons par cette histoire de poupée sexuelle pour les
pédophiles. C’est d’autant plus drôle qu’on a appris par la suite que ce n’est
pas Shein qui avait commercialisé le produit incriminé mais un site français.
On a donc un paquet de bienpensants qui se sont donné le mot pour taper sur le
vendeur chinois et qui ont pratiqué une convergence des luttes en se plantant
largement. C’est de l’acharnement.
Par ailleurs, je n’ai strictement rien contre les poupées
gonflables. Et je préfère que les pédophiles qui ont des pulsions criminelles
se divertissent avec des jouets plutôt qu’avec des vrais mômes. Il faudrait
avoir l’avis de spécialistes mais je ne vois franchement pas pourquoi sodomiser
une poupée à l’effigie d’une petite fille encouragerait des salopards à passer
à l’acte.
On a dans notre pays des espèces de valeurs morales qui nous
poussent à condamner tout ce qui touche au commerce sexuel. On peut toujours
interdire la prostitution mais cela n’empêchera jamais des étudiants de se
vendre pour payer leurs loyers et leurs repas… On peut interdire les poupées
gonflables (et leurs dérivés) mais il ne se passe pas un an sans qu’on nous
sorte des histoires réelles de pédophilie (il y a dix mois, on apprenait que
notre premier ministre n’est pas clean avec Bétharram). Il y a 20 000
plaintes par an pour abus sexuel sur mineur dans notre pays. Je n’ose pas
imaginer le nombre de cas sans plainte.
Et on va se palucher avec des poupées gonflables, si je puis
me permettre.
Le second volet de l’affaire Shein porte sur les conditions
de production avec des salariées et salariés à la limite de l’esclavage. Pour
moi, c’est du ressort de l’Europe de s’assurer que les produits importés sont
produits selon certaines contraintes sociales ou environnementales. L’Europe
est sans doute le premier importateur mondial et elle a les moyens de
contraindre les autres pays.
Alors, je n’en peux plus de voir nos députés européens
traiter des âneries. Je n’en peux plus de voir les députés français donner
leurs avis sur des sujets qui ne devraient pas concerner les parlements
nationaux. Je n’en peux plus de voir notre Premier ministre annoncer une
procédure de suspension de Shein alors que le sujet devrait être traité par la
Commission européenne.
Notre personnel politique est à la ramasse.
Le troisième volet de cette affaire que je voudrais évoquer
est le scandale lié à l’ouverture de magasins de cette enseigne dans le BHV. Je
comprends assez bien l’émotion mais il faut reconnaitre qu’il y avait plein de
clients. Le besoin existe donc. Certes, les produits sont confectionnés par des
Ouighours esclaves mais je voudrais savoir si ceux qui ronchonnent vérifient où
son fabriquées les fringues qu’ils achètent, dans des petites boutiques pas
chères, sur des stands des marchés…
Ne se retrouveraient donc pas avec une espèce d’hystérie collectives
sur la base de critères assez peu historique ! J’imagine très bien les
lascars dénonçant l’esclavagisme dans des réseaux sociaux, avec leurs
smartphones produits en Chine par des enfants ou, du moins, ce qui ne sont pas
occupés dans les mines à ramasser des métaux rares pour en faire les batteries.
Le bal des faux-cul n’est pas loin.
Il y a un autre volet. Je ne suis pas client chez Shein,
disais-je en introduction mais je le suis d’autres entreprises chez qui on ne
peut pas vérifier que les modes de production des fournisseurs sont d’une
étique à tout épreuve. Je suis client, d’abord, d’Amazon et, depuis peu, de
TikTok « shop » (un des produits présentés me plaisait) et de Temu (je
cherchais un gros abat-jour en peau de fesses et les propositions d’Amazon ne
me convenaient pas).
Il y a des raisons qui me poussent à acheter par Internet
sur ces sites. La première est qu’il me faut des fringues de grandes tailles
(genre tee-shirt 6XL). Les boutiques spécialisées sont rares et l’achat
prendrait une heure avec le trajet alors qu’il faut trente secondes sur le net.
Surtout, le prix est cinq ou six fois plus cher ! Vous savez que quand vous
êtes gros, vous faites des taches de sauce en mangeant : il n’y a pas une
semaine sans que doive mettre un tee-shirt à la poubelle !
La deuxième est que j’ai une maison en Centre Bretagne et
que je n’ai pas de voiture. Cet été, j’avais besoin d’un petit débroussailleur.
C’était plus simple de googliser que d’appeler un pote et de lui demander de
faire le tour des commerces avec moi. Google m’a orienté vers un modèle à 50
balles alors que, en boutique, j’aurais payé cinq ou six fois plus cher pour un
appareil surdimensionné par rapport à mes besoins.
Chacun des clients de ces boites ont leur motivation. Les
plus simples, surtout avec des enseignes comme Shein, tournent autour du fait
qu’ils veulent changer de fringue souvent et n’ont pas vraiment les moyens.
La société de consommation, c’est mal, mais se mettre les
consommateurs à dos n’est pas toujours une bonne idée.
Electoralement, il va rester quoi de la « séquence Shein » ?
Les braves gens vont être persuadés qu’on les empêcher d’acheter ce qu’ils
veulent. Et ils prendront d’autres commerces qui ne seront pas spécialement « éthiques »…
Je ne suis pas adepte de la société de consommation mais
allez donc sur le site de la Redoute, le grand vendeur par correspondance « historique ».
Ils n’ont aucun tee-shirt de plus de 3XL et ils sont fabriqués au Bangladesh.
Il va peut-être falloir se calmer avec les leçons de morale.
Politiquement, je n'ai pas spécialement de message à part qu'il ne faut pas dégoutter les électeurs. Mais si on avait une production française, on aurait un problème en moins. Et pratiquer la politique de la demande n'empêchera pas les consommateurs d'acheter des vibromasseurs construits au Soudan.