31 juillet 2014

Mon hommage à Jaurès [avant l'apéro]

Il est temps, pour nous, de rendre hommage à Jean Jaurès, mort il y a 100 ans aujourd’hui, dans un bistro, ce qui est un signe de la qualité du personnage tout comme le fait qu’il ait choisi le bistro où 100 plus tard, exactement, un autre président allait choisir d’y prendre un café. Un visionnaire, donc !

Jean Jaurès est né castrais, contrairement à son père sinon il ne serait pas né, comme une escalope. Il appartenait à une famille de petits bourgeois l’ayant éduqué pour lui permettre de devenir un fameux orateur socialiste.

Brillant élève, lauréat du concours général en latin ce qui lui permet d’avoir une page Wikipedia pour inspirer les blogueurs abrutis, il monta à Paris faire des études un peu plus sérieuses que celles que lui destinaient ses parents, ce qui lui fit terminer troisième à l’agrégation de philosophie derrière Lesbazeilles et Berson, excusez du peu, quand même, d’autant que ces derniers n’étaient pas destinés à une carrière d’égérie socialiste. Après il est devenu prof et s’est marié. On suppose alors qu’il s’emmerdait copieusement et avait envie de faire le con par ailleurs mais les historiens sont assez peu diserts à ce sujet.

Du coup, à 25 ans, il se fait élire député parmi les républicains opportunistes ou modérés qui sont en quelque sorte à gauche mais considérés comme à l’origine de la droite républicaine actuelle ce qui pourrait trouer le cul à certains aujourd’hui. Nous sommes tous jaurésiens et tout ça. Toujours est-il qu’il suivait généralement Jules Ferry. Il le suivait d’ailleurs tellement souvent qu’il put s’apercevoir de la légère claudication de ce dernier et faire ce jeu de mot terrible, à l’origine de sa célébrité : « Ferry boite ».

A l’élection suivante, il n’est pas réélu. Pour s’occuper, il passa un doctorat en lettres, ce qui nécessite de les connaitre toutes, les 26, sans compter les accentuées et tout ça. Pour ce faire, il a pondu en latin une thèse sur le socialisme ce qui ne nous rapproche pas des blogueurs de vrauche. Parallèlement, pour s’occuper, il se fait élire maire adjoint à Toulouse ce qui nous amène à la grève des mineurs à Carmaux puisqu’il avait en charge l’instruction à Toulouse.

Ainsi, les mineurs se mettent en grève pour une raison dont je n’ai strictement rien à cirer. L’Etat envoie l’armée au nom de la liberté de travail ! On dirait l’UMP actuelle… Je ne sais pas s’ils avaient une Nadine Morano à l’époque. De toute manière, ils n’avaient pas Twitter. Notre Jeannot qui écrit dans un canard où il soutient la grève avec Clemenceau et fustige la République qu’il accuse d’être aux mains du grand capital. Les grévistes finissent par gagner et disent à Jaurès : t’as qu’à être notre député socialiste indépendant. Et hop ! Le revoilà à la chambre et officiellement député socialiste.

Il milite pour un tas de trucs de gauche et se spécialise dans la défense des ouvriers et des viticulteurs ce qui explique pourquoi les communistes boivent du gros rouge maintenant.

A la fois suivante, il n’est pas réélu et en profite pour devenir le chef des socialos français.

En même temps, il y a l’affaire Dreyfus qui se pointe. Au début, Jaurès est persuadé qu’il est coupable et dit même que, s’il n’a pas été condamné à mort, c’est parce qu’il était juif. Comme quoi… Ensuite, il change d’avis et écrit J’accuse de Zola.

En 1904, très remonté, Jaurès crée L’Humanité où ne travaillent pas de journalistes mais des intellectuels ce qui a changé depuis. Il utilise ce machin pour militer et finit par créer la SFIO unifiant les différentes tendances des socialistes dans le pays, tel Hollande et Mitterrand, des années avant lui.

Pour les dix années suivantes, ses dix dernières, si je compte bien, il lutte pour la paix. En 1914, les élections sont un succès pour les socialistes mais à partir de juin et juillet, c’est à nouveau le bordel dans les Balkans. Pépère se fait assassiner par un crétin ce qui fait que la gauche s’est ralliée à l’union sacrée, favorable à la guerre. Point. Pointcarré, même.

Jaurès, athlète de l'idée, tomba sur l'arène en combattant le plus terrible fléau de l'humanité et du genre humain : la guerre. Et il restera dans la mémoire de la postérité comme le précurseur, le prototype de l'homme supérieur qui doit naître des souffrances et des chutes, des espoirs et de la lutte.


Et hop ! J’ai piqué le dernier paragraphe à mon pote Léon.

19 commentaires:

  1. Magnifique hommage !
    il n'a pas eu une liaison avec Marie Curie ?

    RépondreSupprimer
  2. À part le dernier paragraphe, aussi ampoulé qu'incorrect (on ne tombe pas sur l'arène mais dans l'arène, l'humanité et le genre humain c'est la même chose, la postérité ne peut avoir de mémoire puisqu'elle est la mémoire), le reste de ce billet est très bien.

    RépondreSupprimer
  3. Il y a quand même un truc qui m'amuse beaucoup lorsque je vois les socialistes se fendre d'un hommage au "grand homme". Ils oublient quand même un truc au passage, socialiste à l'époque ça n'était pas la même chose qu'aujourd'hui, le brouet solférinien aurait été rejeté avec horreur. Bien qu'il n'ait pas été marxiste au plein sens du terme, d'une certaine manière, philosophiquement notamment, il n'en reste pas moins que politiquement il l'était. D'ailleurs, dans bon nombre de ses écrits, ses préoccupations collectivistes apparaissent sans détours. Dans le fond, ceux qui sont les mieux fondés à se proclamer jauressiens ce sont les communistes.

    Quant au pire fléau de l'humanité, même si on peut déplorer que la technologie moderne la rende de plus en plus meurtrière, sans oublier le fait que la guerre totale est une création de la république, je ne peux m'empêcher de penser à cette citation de G. S. Patton : "La bataille est la plus magnifique compétition à laquelle un être humain puisse s'adonner. Elle révèle ce qu'il y a de meilleur et efface ce qu'il y a de vil." S'il y en a qui doutent, qu'ils pensent à tous ces jeunes hommes volontaires pour sauter sur Dien Bien Phu, pour l'ultime parachutage, alors que tout le monde savait que les carottes étaient cuites.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Des tarés.

      Quant aux socialos ils me font marrer aussi. Ils s'engueulent dans Twitter, aussi.

      Supprimer
    2. Ils apparaissent comme des tarés aujourd'hui. Rien de bien étonnant en vérité, puisque les mots devoir, honneur, patrie, sont considérés comme ignobles. Il n'y a guère plus que les militaires et ceux qui peu ou prou ont un métier où l'engagement physique est important pour comprendre cela. Et encore, avec la couillemollisation de la société, ça tend lentement à disparaître.

      Supprimer
    3. De faire tuer pour des mots n'est pas les défendre.

      Supprimer
    4. Question de point de vue. Dans le massif du Vercors, ils ont été des milliers à choisir de mourir pour un mot : liberté, quand des millions d'autres se contentaient de vivre et d'attendre. Je ne leur jette d'ailleurs pas la pierre. Tout ce que je dis, c'est que la façon de mourir que l'on a choisie a souvent bien plus de sens que le fait de vivre tranquille, pépère, en se disant que tout ça ce ne sont que des mots, qu'ils ne valent pas la peine que l'on fasse le choix du sacrifice.

      Supprimer
    5. Dans le Vercors, oui. Mais on parlait de Dien Bien Phu.

      Supprimer
    6. C'est la même chose. Il n'y a que le mot qui change. Les derniers à avoir sauté l'ont fait pour une idée "on n'abandonne pas un compagnon d'arme", mais aussi parce que la république avait résolu d'abandonner ces hommes à leur sort dans cette cuvette. D'une certaine manière, ils ont sauvé l'honneur. Pas celui de la république qui n'a jamais eu la moindre idée du sens de ce mot, mais bel et bien celui de ses armes.
      Mais quel sens peuvent bien avoir ce mot et cette idée aujourd'hui ? Aucun assurément. Une société capable de produire des hommes qui préfèrent tourner la tête plutôt que de secourir quelqu'un qui se fait agresser ne peut qu'être étrangère à ces mots et idées.

      Supprimer
    7. Si vous voulez. Vous tournez en rond. Je ne suis pas sûr que beaucoup de choses ont changé.

      On en était à Jaurès, à l'origine du billet. Il était pacifiste. Moi aussi. Est-ce honteux de refuser la guerre inutile ? À priori c'est tout à son honneur mais.. (voir le billet de Didier).

      C'est une question de valeurs. Vots ne pourrez pas me reprocher de ne pas être patriote (en période de paix) parce que je ne suis pas nationaliste. Et en conclure que je n'ai pas d'honneur.

      Et il y a d'autres valeurs : humanisme, solidarité,... Si vous voulez des valeurs pour prouver que vous avez une grosse bite...

      Supprimer
    8. (Quand je dis que je ne suis pas patriote en période de paix, c'est à prendre au premier degré : il y a tant de types qui se réclameraient patriotes mais qui baisseraient leur culotte devant l'ennemi).

      Supprimer
  4. Il est mort il y a 220 ans, un 28 juillet. " Je suis avec Robespierre, et c'est à côté de lui que je vais m'asseoir aux Jacobins" écrivit Jaurés qui fut aussi un grand historien de la Révolution.

    RépondreSupprimer
  5. Trotsky était un con, Jaurès non plus ! (c'est pour un mauvais bon mot !)

    Excellent billet.
    Ça change des hommage à deux centimes d'euro !

    Voilà !

    RépondreSupprimer
  6. Tu es le roi incontesté du jeu de mots ! :)

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires est activée. Je publie ceux que je veux. On ne va pas reprocher à un journal de ne pas publier tous les courriers des lecteurs...