25 mai 2024

Parlons vraiment d'Europe


 

« Désormais tout vote pour un candidat qui se déclare pro-européen serait du masochisme. Bien sûr, se déclarer pro-européen est la cotisation obligatoire pour entrer dans le club fermé de la représentation médiatique. » Voila ce que déclare Seb Musset dans son billet réquisitoire contre l’Europe (ou, du moins, contre l’Union Européenne dont au sujet du parlement de laquelle nous allons voter, si je puis me permettre cette déformation d’une expression bérurienne).

Je suis d’accord avec la plupart de ses propos (et si vous voulez savoir lesquels, le mieux à faire est de le lire) mais je suis pro-européen (même si je me contre-pignole de la représentation médiatique).

Je m’en vais exposer quelques arguments mais je vais bien conclure (si je n’oublie pas) par le fonctionnement de la démocratie au sein de ses institutions : nous avons des élections dans une paire de semaines et je compte bien m’abstenir préventivement, pour ne pas être complice d’une débandade annoncée...

 


Tout d’abord, en préambule, je dois dire que je vais parler d’Europe dans les sections suivantes de ce papelard mais je vous prierais, comme ci-dessus, de lire « Union Européenne ». Rappelons tout de même que la vraie Europe (dans notre contexte politique) est « est un territoire considéré conventionnellement comme un continent, délimité à l’ouest par l’océan Atlantique et la mer du Groenland, au nord par l’océan Arctique. Sa limite méridionale est marquée par la mer Méditerranée et le détroit de Gibraltar qui la sépare de l'Afrique, tandis que la mer de Marmara (avec les Dardanelles et le Bosphore) et la mer Noire marquent sa frontière avec l'Asie de l'Ouest. Sa limite à l'est, fixée par Pierre le Grand aux monts Oural, au fleuve Oural, à la côte nord-ouest de la mer Caspienne et au Caucase est la limite traditionnellement retenue. »

C’est bien de l’Union Européenne (UE) dont nous parlons aujourd’hui, une espèce de rassemblement entre les états du territoire européen. Il ne faut pas, non plus, confondre, ce territoire et l’union avec d’autres machins politique comme le Conseil de l’Europe et la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) que ce conseil a institué.

Dans notre UE, nous avons un Conseil de l’Union Européenne, un Conseil Européen et une Cour de justice de l’Union Européenne. Je suppose que les pères fondateurs étaient saouls comme des cochons quand ils ont créé trois institutions pour deux entités avec « Conseil » et « Europe » dans le titre et ayant généré deux machins avec « Cour » et « Europe ».

L’alcool, c’est mal.

 


Je conseille de dissoudre le Conseil de l’Europe et la CEDH et les machins liés dont je n’ai pas parlé ci-dessus, comme la Convention Européenne des droits de l’homme, le Comité des ministres, l’Assemblée parlementaire, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et la Conférence des organisations internationales non gouvernementales (quitte à reprendre les compétences, au sein des trucs de l’UE, ce qui exclura certains pays, tant pis pour leurs gueules. Ou tant mieux). N’allez pas croire à mon infinie culture, je me fais aider par Wikipedia.

C’est un impératif démocratique : comment peut-on organiser des élections européennes qui n’aura aucun rapport avec des machins politiques « au nom de l’Europe » ? Profitons-en pour dissoudre un autre machin sans lien exact avec l’UE : l’Association européenne de libre-échange. Vous ne saviez pas que cela existait : je vous rassure, moi non plus. Mais il y a aussi des pays différents de ceux des autres bazars.

 


Tant que j’y suis, je propose d’obliger tous les pays de l’Union Européenne à passer l’euro. Ou à quitter l’UE. Point barre. Sont concernés : Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Suède et Tchéquie. C’est quoi ce bordel avec des institutions aux concours géographiques variables… Dans la même logique, d’ailleurs, on pourrait virer l’Irlande et Chypre qui ne sont pas dans l’espace Schengen (le pire, avec Schengen, est qu’il y a des pays hors UE (Islande, Liechtenstein, Norvège et Suisse). Tout cela est aussi un impératif démocratique. Je ne suis pas contre ces machins à « géométrie variable » mais, à l’époque où l’Union Européenne est en train de crever, il faudrait la définir plus précisément.

L’Union Européenne, pour fonctionner au niveau démocratique, doit être un machin avec une monnaie commune et où les zozos peuvent circuler en toute liberté, avec un certain nombre de choses communes. Je me répète, les pères fondateurs ont bien abusé de substances un peu louches…

Ne voyez pas de populisme de ma part. L’Europe devrait être une entité géographique (de l’Atlantique à l’Oral à tout ça) et, voire ou, une entité politique bien définie et pas un ramassis de constructions éparses que le citoyen ne peut pas connaître.

 


Prenons deux exemples.

Tout d’abord, Bardella parle beaucoup de frontières (l’autre jour, avec Attal, il parlait de « double frontière », je crois). Il faut que cela cesse : le sujet n’est pas de la prérogative du Parlement (on peut le regretter, ce n’est pas le sujet) vu qu’il n’a pas l’initiative parlementaire et l’espace de libre circulation des andouilles dépasse l’UE donc le « périmètre géographique » du Parlement.

Ensuite, nous avons la CEDH (sans rapport avec l’UE… à part le mot « Europe » dans l’intitulé) qui a pris une décision, la semaine dernière : les interdictions du port du voile à l’école, en Belgique, ne seraient pas contraire aux droits de l’homme. Comment peut-on affirmer cela sans rigoler : dire aux gens comment s’habiller ne serait pas contraires aux droits de l’homme (et de la femme…) ? Je me réjouis, évidemment, de cette décision (je suis viscéralement opposé aux tenues qui marque l’appartenance à une religion) mais que viennent foutre les droits de l’homme dans cette histoire ? A croire que c’est une décision purement politique à l’approche des élections européennes (qui ne couvrent d’ailleurs pas le territoire de la CEDH) et qui va foutre dans la merde les couillons de gauche musulmanistes qui défendent « le voile » et parlent toujours des droits de l’homme.

Au moins, c’est rigolo.

 


La construction de l’Union a été progressive. On va dire qu’elle a démarré après la guerre avec le marché commun et tout ça. Il y a eu une étape clé, en 1992, avec le traité de Maastricht et la création de l’Euro. L’Europe est devenue une union financière (avec nécessairement des règles qui dépassent le strict de cadre de la monnaie, comme ses règles d’utilisation : les déficits, l’inflation…). Dans mon job, je suis avec passion l’évolution des moyens de paiement et vous en parle souvent, mais on peut dire que la construction s’est arrêtée là. Je pensais sérieusement que nous aurions poursuivi cette construction avec, par exemple, une progressive harmonisation fiscale et sociale, par exemple.

C’est raté. L’Europe est un échec (voir le billet de Seb Musset même si on n’est probablement pas d’accord avec les causes). Ca fait mal au cul au cœur d’un défenseur de l’Europe comme moi de l’admettre mais je voudrais bien que nous fassions tous la même démarche plutôt que de faire des démarches d’autoconviction pour tenter de convaincre des électeurs…

J’ai donc voté pour en 1992 et j’ai récidivé en 2005. Cette fois, j’ai perdu ! Je suis intimement persuadé que le rejet du texte par les électeurs est plus lié au fait que soit annexé au traité le texte de traités antérieurs, imposant une ligne politique très libérale à l’Europe et non pas au mode de fonctionnement des institutions proposé dans la première partie, noyé par l’utilisation du pompeux terme « constitution ».

D’ailleurs, on nous a imposé le « mode de fonctionnement » quelques années plus tard (le traité de Lisbonne, je crois). Cela a impliqué des confusions. Les institutions devaient évoluer pour bien fonctionner alors que les ressentiments portent sur le contenu politique. Du moins, je crois. En d’autres termes, je crois aussi que l’on peut être pour le cadre « juridique » de l’élaboration des textes européens du contenu de ceux-ci.

Je pense que ce cadre doit dépendre exclusivement des chefs d’Etat (à condition qu’ils aient été élus démocratiquement) alors que le contenu des textes doit être voté par le Parlement pour lequel nous allons voter (ou pas) sur la base, dans le cadre actuel, de directive proposées par la Commission européenne qui dépend surtout du Conseil de l’UE mais avec le président élu par le Parlement.

 


Ce qui nous amène donc au parlement pour lequel nous allons voter.

Je parlais de la double frontière défendue par Bardella. C’est une double ineptie le fait de mettre ça dans le programme. D’une part, le Parlement n’a pas l’initiative parlementaire. Ce n’est pas parce qu’il vote pour le président de la Commission (l’espèce de conseil des ministres) qu’il peut imposer un programme politique qui reste du ressort essentiel du Conseil, donc des chefs d’Etat. D’autre part, la libre circulation des imbéciles est aussi du ressort des textes créateurs et pas du Parlement.

C’est donc une tromperie.

 


Il est temps (je crois qu’on vote pour ce machin depuis 45 ans) de bien rappeler le rôle du parlement et d’éviter que cette élection se transforme en une élection nationale (pour ou contre le gouvernement en place…).

Peut-être faudrait-il que l’élection soit à l’échelon du territoire concerné (les pays de l’UE) avec des listes correspondantes et qu’on laisse bien aux Etats, ce qui doit rester de leur ressort, comme la défense (même si on peut être contre ou être partisan de la mise en œuvre progressive d’une vraie politique internationale européenne) et, dans notre contexte, la construction de l’Europe et l’exercice de la souveraineté.

 


Dans l’attente, je ne vais pas voter. Pourquoi le faire alors que je conteste le cadre démocratique de la chose tout en soutenant l’Europe. Celle qui n’aurait pas dû échouer, celle qui aurait dû faire une industrie européenne et renforcer nos économies tout en favorisant le progrès social et environnemental…

Où sont mes cachets ?  

 

Elle est belle notre Europe, non ? Arrêtons de tout gâcher par ces conneries. Les photos sont issues de ce site. Merci à eux.

7 commentaires:

  1. à l’époque où l’Union Européenne est en train de crever, il faudrait la définir plus précisément.

    J'adore cette phrase ! Toute votre puissance comique s'y trouve concentrée.

    DG

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    1. Il faudrait toujours définir les cadavres. Et ma phrase est claire même si elle pourrait être mieux branlee.
      NJ

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  2. Sinon, je me suis moi aussi trouvé en large accord avec le sieur Musset... ce qui est légèrement perturbant.

    DG

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  3. Salut à toi,
    Je continue à te lire assez régulièrement, même si je ne commente plus.
    Mais en l'occurrence le sujet m'intéresse particulièrement ...
    C'est quoi l'UE ?
    On a transféré la souveraineté monétaire, composante essentielle de la politique économique, à une banque supranationale composée de technocrates dont les orientations sont connues,
    On a piétiné allègrement le refus référendaire massif du traité constitutionnel pour le remplacer par le traité de Lisbonne, lequel se réfère expressément à une vision économique : l'ordo-libéralisme qui confine l'Etat dans un rôle de gardien sourcilleux du sacro-saint marché régulateur,
    On a confié à un organisme non élu, la Commission, des pouvoirs exorbitants, instaurant ainsi une forme de césarisme bureaucratique...
    Etc,
    Tout cela au détriment de la démocratie et pour quel réel développement, dans un espace ouvert à tous les vents de la concurrence mondiale ?
    C'est bien le mot régression qui me vient à l'esprit quand on parle de l'UE.
    P.CASTOR

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    1. Bon retour...

      Le transfert de souveraineté date de Maastricht, pas du machin de 2005, refusé par le peuple mais remis sous une autre forme par ls dirigeants. Or très peu de gens tapent sur Maastricht, justement parce qu'il y a eu un referendum et un texte adopté par le texte. Alors on préfère taper sur les machins ultérieurs qui ne sont qu'un dépoussiérage. Déjà, c'est à la limite de la faute politique.

      Tous ceux qui ont voté pour, en 1992, s'attendaient à une suite, l'harmonisation fiscale et sociale dont je parlais. On s'est fait entubés. C'est bien 1992, pas 2005. Tout ce dont tu parles, en gros, date de 1992. Tu dis par exemple que la commission n'est pas élue... Sauf que depuis les modifications, son président est élu par le Parlement. Tu parles de Commission pas élue ? Et le gouvernement, en France ? Il est élu ?

      Tu dis "tout cela au détriment de la démocratie". Pourquoi ? Le texte est beaucoup plus simple que le bordel d'avant mélangeant différents traités. Mais le TCE était beaucoup plus clair que le traité de Lisbonne... sauf que les deux rendent difficiles la modifications des textes antérieurs, eux franchement libéraux mais le sujet n'est jamais abordé sous cet angle.

      Cela étant, on ne va pas refaire le débat. On s'est fait entubés en 1992 (en votant) et en 2007 (sans voter), si tu veux.

      Toujours est-il qu'on a un vrai bordel qu'il faudrait modifier (et supprimer des trucs hors UE, ce que je dis) et que les élections portent sur un Parlement qui agit sans programme pour différentes raisons, notamment parce qu'il n'a pas l'initiative des textes (mais ça n'est pas nouveau) et que les candidats disent n'importe quoi (du moins des choses qui ne sont pas du ressort du Parlement ou de la Commission mais des Etats membres).

      La participation à l'élection est en baisse presque continue depuis le début... sauf la dernière fois... Quand l'extrême droite est arrivée en tête. Et on nous dit toujours, à gauche, que le désamour vient du libéralime mis en oeuvre...

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  4. Tiens ! Le déficit commercial de la France (en forte baisse) est de l'ordre de 100 milliards. L'Ue est en large excédent. Vous en tirez les conclusions que vous voulez mais j'aurais tendance à penser que la France est surtout victime de la concurrence dans l'UE et pas de celle avec les grandes puissances économiques extérieures. D'où mes propos sur l'harmonisation fiscale et sociale... Mais je suis moi-même hors sujet de mon billet.

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