29 juillet 2014

Ségolène Royal et les autoroutes régionales

Les attaques contre Ségolène Royal suite à l’annulation du projet d’autoroute A831 sont inacceptables, surtout dans leur forme. Des commentateurs à mon dernier billet sur le sujet m’ont apporté des informations qui me confortent dans mon opinion initiale qui avait pourtant changé ce week-end : cette autoroute ne doit pas être faite mais il faut améliorer la circulation sur les routes actuelles, notamment par le contournement de Marrans.

Toujours est-il que, comme pour Notre-Dame-des-Landes, cette route m’a toujours intéressé, ayant habité des années en Bretagne et y retournant souvent : une autoroute reliant Nantes à l’axe Paris Bordeaux est la seule solution pour relier la Bretagne au sud-ouest de la France.

Ségolène Royal a déclaré : « Ce n’est pas réaliste de mettre 900 millions d’euros dans 60 km (...) On ne va pas refaire Notre-Dame des Landes dans le Marais Poitevin! Notre-Dame des Landes aussi, ça a été décidé sur des études qui dataient d’il y a plus de 10 ans, et là, on recommence ? » C’est très drôle surtout que Notre-Dame-des-Landes est à l’étude depuis plus de 50 ans…

L’autoroute, au sud de Nantes, existe : c’est l’A83 qui débouche sur l’A10 au nord-ouest de Niort. Tiens ! Je vais vous pondre une carte, aidé par Google Maps. En rose, je « sous-ligne » l’A10, en vert, l’A83. C’est parce que mon PC est passé en Windows 7 que j’arrive à vous pondre des belles cartes comme ça. On le voit à peu près clairement : elle ne sert pas à grand-chose, elle ne passe même pas par Niort. On va dire qu’elle rend service aux gens qui ont envie de faire Nantes Niort mais fait un gros détour pour Nantes-Poitiers. En marron, je propose des alternatives qui auraient quand même été plus chouettes, non ? D’ailleurs la ligne en marron la plus à gauche, correspond un peu au tracé prévu pour l’A831. Le tracé marron le plus à droite est d’ailleurs, en gros, ce qui avait été retenu à l’origine.

Ségolène Royal nous parle de 10 ans. L’autoroute A83 a une page Wikipedia. Ce qui prouve au moins qu’il y a, en France, des gens qui ont le temps de faire des pages Wikipedia au sujet des autoroutes. Vous me direz, je suis bien en train de faire un billet de blog… Avec des jolies cartes. Tiens ! Je vous mets en bleu l’autoroute A87, qui fait Angers – La Roche-sur-Yon et en rouge, celle qui fait Nantes-Le Mans, via Angers. Tant qu’on y est, on pourrait faire une autoroute Nantes-Poitiers et une autre Niort-Angers.

Bon ! Un peu de sérieux ! Le machin grossièrement hachuré en mauve représente globalement la surface du Marrais Poitevins. Je l’ai fait à la main, comme un grand, en découvrant Paint sur Windows 7. Ne chipotez pas.

La page Wikipedia est très intéressante. « L'A83 ne fut inaugurée en sa totalité qu'en 2001 avec l'ouverture entre Oulmes et Niort. L'inauguration de cette dernière partie du tracé de l'A83 mit fin à une longue polémique débutée en 1987. À l'origine, l'A83 devait rejoindre l’A10 en contournant Niort par le sud et en passant près de Coulon et de Magné. Ce tracé était plus direct entre Nantes et Bordeaux. » Nous y voilà, à mon autoroute marron de droite.

« Finalement, en 1992, le tracé contournant Niort par le nord (plus long) fut choisi, décision rejoignant l'opinion de certains milieux économiques du département des Deux-Sèvres qui voyaient dans cette option une meilleure desserte du département. » Nous y voilà : ce sont les milieux économiques du département qui choisisse les routes à vocation nationale… Du département d’où était élue qui ?

« Les 34,4 derniers kilomètres entre Oulmes et Niort furent inaugurés par Ségolène Royal en 2001. Ségolène Royal, alors député des Deux-Sèvres [et ministre déléguée à la Famille, à l'Enfance et aux Personnes handicapées], avait d'ailleurs dû se battre contre certains élus locaux et les services de l'équipement pour que le Marais poitevin soit épargné. Elle avait alors sollicité l'arbitrage du président François Mitterrand. »

Au moins, elle a une certaine constance…

Vous noterez néanmoins que si les décideurs de l’époque avaient choisi mon tracé marron de gauche, on n’aurait pas traversé les Deux-Sèvres (entourées en gris, sur ma carte, qui commence à devenir un tantinet chargée surtout que dans l’intervalle, j’ai mis la rocade de Nantes en orange mais je ne sais plus pourquoi. Ah si ! Je me rappelle… C’est pour donner un sens au point noir).

(Discrètement, j’en profite pour entourer Chinon en blanc parce que ça me donne soif).

Le point noir ? Oui, le point noir. C’est en gros l’emplacement de l’aéroport de Nantes-Atlantique, celui que l’on voudrait déplacer pour mettre au nord de Nantes.

Arrêtons de déconner avec des bavures de couleur et commençons à médire. Avec des pointillés gris. En dessous des pointillés gris, c’est la circonscription de Melles d’où vient Ségolène Royal, avant de devenir présidente de région. L’autoroute verte est parfaite pour que les braves habitants puissent aller à Nantes, y compris à l’aéroport. Tiens ! En espèces de mauve bleu, à gauche, j’entoure la ville de La Rochelle, justement où elle n’a pas été élu, la dernière fois. Elle se trouve dans un désert d’autoroute. L’autoroute verte dessert par contre très bien également le centre de la région dont elle assurait la Présidence.

Peut-être arriverons à démontrer que la meilleure solution serait de poursuivre l’A87 (la bleue) jusqu’à la Tranche-sur-Mer et de faire un pont jusqu’à l’Île de Ré pour desservir la Rochelle sans traverser le Marais-Poitevin. J’espère que Manuel Valls réussira à retenir mon hypothèse quand il rendra ses arbitrages, ne serait-ce que pour nous permettre de rigoler dans les blogs.

Peut-être que quand la décision a été prise de poursuivre la verte au nord-est de Niort, aurait-il fallu s’intéresser des intérêts des infrastructures nationales (données en concession à des boites privées) et construire des belles routes pour rejoindre Niort et La Rochelle à partir de Fontenay et pas nécessairement une autoroute certainement très utiles aux industriels du coin.

La page Wikipédia de l’autoroute a oublié de dire que Mme Royal était ministre de l’environnement au moment où la décision relative à la fin de l’A83 a été prise.

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : on ne peut pas faire traverser le Marais Poitevin par une autoroute. Les propos tenus contre Mme Royal par les élus locaux, notamment par le président du Conseil général de Vendée Bruno Retailleau, sont inacceptables.



15 commentaires:

  1. Pour moi, comme écrit sous ta précédente note sur le sujet, elle a parfaitement raison. Les orfraies qui hurlent sur sa décision, surtout avec des invectives sexistes, viennent de trouver un beau prétexte pour détourner l'attention de ce qui ressemble bien à la faillite de leur parti, financement, comportement et idéologie.
    Comment ces orfraies prévoient-elles de trouver 900 000 millions d'€ sous le pied d'un cheval, pour saccager un parc naturel par des travaux pharaoniques, des nuisances sonores et atmosphériques, sans écarter le risque de submersion brutale ?

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    1. Apo,

      Elle a raison d’interdire cette autoroute. Mais je note que l’erreur initiale date d’une époque où elle était au même poste. Elle parle d’étude d’il y a dix ans mais ça fait bien plus longtemps que le problème existe, cette circulation à travers le Marais Poitevin pour rejoindre l’ouest et le sud-ouest à partir de Nantes.

      Quand les tracés de l’A83 ont été finalisés, il aurait fallu lancer les travaux de contournement de Marrans et la mise à deux fois deux voies d’une partie de la route, quand ça ne faisait pas de mal aux marrais. Je ne sais pas si tu as déjà fait la route mais si tu te retrouves derrière un camping-car, une caravane, un poids lourd en sortant de l’autoroute, tu ne pourras pas le doubler jusqu’à ce que tu rejoignes la nationale qui va à La Rochelle (où tu n’iras pas plus vite, elle souvent saturée) et qu’entre temps, tu auras eu à traverser au pas des patelins qui sont quasiment morts au sein d’une région magnifique où pourrait se développer le tourisme.

      Ca fait 20 ans que je gueule parce que l’A83 n’est pas adaptée, qu’elle est issue de choix de barons locaux, …

      Et qui est au cœur de ces erreurs ? Qui était présidente de la région quand les études ont été faites ?

      Il faut arrêter de remplacer des mauvaises décisions par des mauvaises décisions. Jusqu’à il y a trois mois, elle était présidente de cette région. Le gouvernement auquel elle fait partie depuis essaie de favoriser les échanges entre les régions et elle défavorise les échanges entre la région au nord et la région au sud de sa propre région. Pourquoi n'a-t-elle rien dit plus tôt ? Elle espérait la présidence d'une région fusionnant sa région celle au nord, ou une nouvelle région intégrant la Loire Atlantique ?

      Et ils ne savent pas communiquer, dans ce gouvernement ? Trois jours avant l'annonce de la loi qui va remplacer celle sur la transition énergétique ? Ils passent pour des guignols et vont se faire haïr par les gens qui ont besoin de cet axe ? Ils ne pouvaient pas laisser Valls causer positiver la décision, du genre "on n'a pas de pognon alors on ne fait pas tout de suite cette autoroute mais on fait la déviation de Marrans et une partie de la route en quatre voie, notamment ces longues droites où on ne peut pas doubler."

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  2. Tu as raison sur ça. Mais c'est toujours le même paradoxe entre des arbitrages politiques et l'intérêt général réel.
    Il y a eu depuis ces études, une évolution de taille, du fait de la catastrophe de la Faute s/Mer, de l'amélioration de la méthodologie de la gestion des risques de submersion du fait de la transposition de la Directive européenne INONDATIONS, en droit français par la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010.
    Je suis d'accord avec toi que la communication n'est pas au top. Cela a toujours été le cas sous les gvt de gauche : je me souviens du boulot incroyable sous Jospin et la claque qu'il a prise ... Je me souviens des tracts couleur caca ... quand je les ai vus arriver, j'étais sûre qu'on allait se ramasser, c'était tout un symbole. Oui, il faut se mettre à travailler sur la com', c'est vital ... quand on voit ce que la sarkobande y a investi, on devrait réfléchir à ce travail de communication et aux moyens légaux et supportables à y consacrer.
    Je partage ton avis sur les quatre voies : c'est la meilleure chose qu'on puisse faire, de plus elles permettent la gratuité et que des personnes qui n'ont pas beaucoup d'argent puissent circuler aussi bien que les autres.
    Donc à dépenser de l'argent, tout en prenant en compte le risque de submersion qui est plus élevé de nos jours qu'il y a 10 ans, du fait du changement climatique.

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    1. On est d'accord. Mais ne négligeons pas les faits : qui a été présidente de région quand les études ont été faites. Tu imagines le drame si on découvre qu'elle a été moteur dans le projet ou, au minimum, qu'elle a pas encouragé les études sur des alternatives. Du genre viaduc à une seule voie au-dessus des zones à risque et 2 voies ailleurs.

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  3. Je t'ai envoyé une partie des études : tu vois qu'elles comportent des variantes, comme la loi le permet.
    Néanmoins, le Conseil Régional ne fait pas la pluie et le beau-temps sur des dossiers pareils : les acteurs de l'eau sont nombreux et l'Etat a toujours été omniprésent sur de tels dossiers. Depuis 2001, il y a eu des changements profonds, notamment l'adoption de la loi sur l'eau du 30 décembre 2006 qui transpose des Directives européennes et crée les 7 bassins versants que nous connaissons aujourd'hui et confie le pilotage de leur gestion à un Préfet coordonnateur puisqu'un Bassin comprend forcément plusieurs régions : ex. Le Bassin de la Seine (d'où l'intérêt de la réforme territoriale de l'Etat en cours). Ce Préfet coordonne le travail du Comité de Bassin (qui élabore le SDAGE qu'approuvera le Préfet) et de l'Agence de l'eau qui agit en partenariat avec les services de l'Etat et l'ONEMA. Les services de l'Etat sont l'administration déconcentrée de l'Etat différente de l'administration préfectorale : ces différents acteurs sont autant de contre-pouvoirs les uns pour les autres, puisque le principe démocratique de notre pays repose sur la séparation des pouvoirs qui doivent s'équilibrer entre eux. Ces acteurs ont des Directeurs qui rapportent à leur Ministre de Tutelle et sont donc un contre-pouvoir à celui des Présidents de Région qui tirent leurs pouvoirs et compétences des articles 72 et suiv. de la Constitution. Il s'agit aujourd'hui de la DREAL au niveau régional et au niveau des départements des Directions Départementales des Territoires (DDT, ex- DDE, DDAF).
    Donc, je ne ressens pas la même inquiétude, voire colère que toi, au sujet du rôle qu'aurait pu jouer Ségolène Royal en 2001 dans les décisions sur le réseau autoroutier de sa région, car sa collectivité, pour autonome qu'elle soit, n'a pas exercé seule le pouvoir de décision.

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    1. Ce n'était pas en 2001 mais en 1992 quand elle était ministre de l'environnement.

      Par contre si une président de région n'est pas au courant de tels dossiers, heu... Après on ne s'étonnera pas que les coûts explosent. Surtout quand la présidente de région est une spécialiste du sujet puisqu'elle l'a déjà traité dans une autre vie, en tant que député ou ministre. Ne me dis pas qu'ils n'ont pas une réunion par an pour traiter des infrastructures routières.

      En l'absence de "l'adjoint de la chef", j'ai passé l'après midi en réunion (puisque j'ai remplacé la chef en juillet) pour préparer un Comité de pilotage (au quel participe le président de ma boîte), j'ai donc pu voir les odj des réunions précédentes. Aucun sujet même mineur ne leur échappe. Alors une réunion du bureau d'un Conseil Régional est nécessairement au courant de ce genre de truc.

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  4. C'est Pompidou, en 1963 qui a pris l'initiative de donner la priorité au développement des autoroutes en les privilégiant à toute autre infrastructure de transport. En 1992 on était encore dans cette dynamique et ces contraintes pour les collectivités, puisqu'elles n'avaient pas la compétence pour mettre en œuvre les Schémas directeurs routiers nationaux eux-mêmes compris dans les "plans" : c'est dans le cadre des 9ème et 10ème plans, approuvés par le Haut commissariat au Plan, que les infrastructures que tu évoques ont été construites et mises en service. À cette époque donc, tout grand projet de voie rapide de plus de 25 km et plus généralement, tout projet routier d'au moins 545 millions de francs doit être compatible avec celui-ci.
    La Région n'avait pas reçu la compétence dans ce domaine comme tu le sais. Ségolène Royal qui a inauguré, n'avait eu aucun pouvoir de décision, seulement un pouvoir d'interpellation du Gouvernement et même du Président de la République et tu dis bien qu'elle l'a exercé.
    Aujourd'hui, c'est dans le cadre d'une institution interministérielle qu'elle a eu à exercer un pouvoir : elle l'a fait en refusant de valider un projet approuvé par François FILLON sous l'égide duquel les acteurs du marché public se sont mis d'accord.
    Quand on se souvient du scandale de la gestion de l'ONEMA (marchés publics irréguliers) et de celui de la Convention de Partenariat Public Privé des portiques éco-taxes (sous la responsabilité de NKM alors ministre de l'environnement), il me semble que Ségolène fait à la fois acte de courage et d'une saine prudence. C'est pas tous les jours que je la défends.
    Bz

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    1. C'est en temps que ministre en 92 qu'elle a pu intervenir. Pas présidente du machin. Par contre, il me semble que c'est 2004 qu'elle est devenue présidente du truc. Elle était forcément au courant de tout le dossier pour la nouvelle autoroute.

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  5. Mais c'est vrai que je ne connais pas la vie politique locale et ses affrontements et que je ne suis pas à même, comme tu l'es, d'évaluer si la décision de S.R. est anormalement politicienne comme tu le penses, ou au contraire courageuse comme je l'ai pour ma part ressentie. M'enlève pas toutes mes illusions !

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    1. Désolé. Mais je pense que c'est politique et la communication désastreuse en rajoute une couche.

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  6. Ce qui continue de m'épater, mais vraiment, c'est que l'on puisse, fût-ce dix minutes de rang, s'intéresser à un tronçon d'autoroute…

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    1. Vous savez que tout ce qui touche à l'aménagement du territoire m'intéresse.

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  7. Et merde je viens de commenter sur l'autre billet alors qu'il aurait été mieux ici. Ou pas. Faut que j'aille pioncer.

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    1. Oui. Mais le résultat est le même. Tu défends mémère.

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  8. J'm'en fout, je ne vais jamais dans ce coin habité par des ventres à choux

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