24 mai 2022

15 législatives à la loupe

 


Dans un de mes billets d’hier, je reprenais les scores de la « gauche de gouvernement » au premier tour des élections législatives depuis quelques années mais, en répondant à ma commentatrice (qui s’appelle Hélène mais je ne pense pas qu’elle soit la frangine… Je vais en mettre une autre en illustration), je me suis rendu compte à quel point ils étaient curieux.

Je vais en faire un tableau pour vous faire plaisir et vous pourrez me remercier. La gauche de gouvernement représente toutes les forces de gauche à l’exclusion de quelques extrémistes.

Quelques éléments à prendre en compte pour voir comment j’ai fait ce tableau mais ça n’a aucun intérêt. La droite de gouvernement représente… la droite sauf le RN mais avec le centre sauf depuis après 2002 (année de la « fusion » de l’UDF et du RPR). Je ne compte pas l’extrême droite avant l’ère Le Pen (et la notion d’extrême droite est utilisée parce que c’est couramment employé mais, dans l’avenir, on pourrait avoir un rapprochement avec la droite plus traditionnelle). Je compte les radicaux comme étant de gauche ce qui n’est pas évident entre les différentes tendances, si ma mémoire est bonne. En 1978, j’ai mis les écolos à gauche mais, à cette époque, ce n’était pas aussi évident qu’aujourd’hui.

 

Année

Gauche

Centre

Droite

Extrême droite

1958

44

 

52

 

1962

44

 

51

 

1967

44

 

50

 

1968

41

 

58

 

1973

45

 

54

 

1978

49

 

47

 

1981

55

 

43

 

1986

43

 

45

10

1988

49

 

41

10

1993

36

 

44

12

1997

43

 

37

15

2002

37

 

43

12

2007

36

8

46

4

2012

47

 2

35

14

2017

27

32

22

13

 

En bleu, le camp d’où sera issu le premier ministre. En 1986, en italique, le mode de scrutin était différent. 

La première conclusion est que je me suis planté dans mon billet d’hier…

 

Mais encore ?

A force de pleurer, à gauche, et de s’ébahir sur le résultat de la présidentielle, on oublie que la droite est bien plus basse que nous depuis 2012. A mon avis (mais je m’en fous un peu), c’est purement à cause des mauvais choix de leaders ou de candidats depuis cette époque.

2017 montre que LREM a piqué 20 points à la gauche et 12 à la droite (en gros).

L’extrême droite a bien percé vers la fin du premier septennat de Mitterrand mais ne bouge pas beaucoup depuis (contrairement aux scores individuels des Le Pen aux présidentielles, notamment la fille).  Par rapport à la droite, la gauche ne bouge pas beaucoup (sauf évidemment en 2017). La droite a donc visiblement souffert de la force du Front National (à la réflexion, c’est évident, mais à force de dire que les électeurs de Le Pen vienne de la gauche, on se mélange les pinceaux : ce qui est vrai pour l’élection présidentielle ne l’est pas nécessairement pour les législatives) mais elle a commencé à faiblir largement bien avant l’ère Le Pen…

Le centre a bien explosé en 2017, ce qui est su, mais le score aux législatives ne reflètent pas les présidentielles (François Bayrou avait tout de même fait 19% en 2007 et 9 en 2012).

On présente souvent mai 1968 comme une grande époque pour la gauche avec des acquis sociaux. Force est de constater que la droite n’a jamais fait autant qu’en juin de cette année-là… Et que, tout au long de la Vème, il a fallu attendre la déroute de 1993 pour que la gauche fasse pire.

Même si le mode de scrutin n’est pas le même, il est amusant de constater que la gauche a fait le même score lors de la déroute précédente, en 1986, que lors de la grande victoire de la gauche plurielle en 1997. 1997 fut surtout l’échec de la droite, donc.

Il est quand même amusant de constater que la droite fait moins de 50% depuis la rupture du programme commun, à gauche, et, ce qui est logique, au fond, depuis que le PS est majoritaire à gauche (ce qui exclut donc 1997).

En 1988, la gauche péessienne n’avait pas de majorité absolue et il a fallu faire « une politique d’ouverture » mais le score de la gauche était supérieur à celui de 2012 et de 1997.

Le score de la gauche a explosé en 1981 mais, en fin de compte, elle est plus basse les années après alors que c’est depuis cette date qu’on a l’alternance.


A vos stylos pour des conclusions complémentaires !


14 commentaires:

  1. Bravo pour ce tableau ! Il permet de constater qu'après avoir été de droite dans les années 60-70, le français râleur et perpétuel insatisfait a fait l'essuie glace pendant 40 ans puis s'est calé au centre à partir de 2017. Ce qui n'est finalement pas une si mauvaise chose, je pense.

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  2. 1ère conclusion :
    Jamais les votes à droite n’ont été aussi élevés qu’à l’époque de « qui vous savez ».
    Le seul, l’unique le vrai !
    Hélène toujours la même issue de Provence et entourée de vignobles Bandolais

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    1. En 73, il n'était plus là, le grand.

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    2. En 73 , c’était l’effet de l’erre 😉
      Hélène

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  3. Un détail qui n'en est pas un : le score élevé de la gauche en 2012 s'explique par le vote des environ 10% de centristes qui avaient déjà choisi Hollande au 2e tour de la présidentielle. Logiquement ces 10% sont retournés vers le centre en votant LREM en 2017, donc dans l'électorat de LREM seulement 10% (et non 20) venaient de la gauche.

    Moyennant quoi on constate qu'en fait la gauche est stable à 36 ou 37% depuis 2002, et même depuis 1993 (avec l'exception de 1997, quand Chirac avait donné le bâton pour se faire battre), alors qu'elle avait été stable autour de 45% durant les 35 années précédentes (avec quelques anomalies, en particulier lors des législatives suivant les présidentielles de 1981 et 88).
    Le tournant a donc eu lieu au début des années 90. Depuis, la gauche n'a été majoritaire à l'assemblée (bien que minoritaire en voix, mais moins que la droite) que par accident, grâce à la montée de l'extrême-droite et au mode de scrutin, en 1997 et en 2012.

    Qu'on le veuille ou non, cela fait près de 30 ans que la (ou les) gauche(s) ne représente(nt) plus qu'un gros tiers des français, ou du moins de ceux qui votent, en comptant les électeurs ex-socialistes encore égarés chez Macron faute de trouver une alternative crédible (en particulier par la faute des dirigeants du PS depuis 5 ans).
    Et, grosso modo, la gauche radicale / populiste représente entre un tiers et la moitié de ce tiers suivant qu'on y inclut les électeurs du PC ou non (10 à 12% des intentions de vote pour Mélenchon et 4 à 5% pour Roussel dans les sondage de janvier/février, avant l'effet vote utile), ce que masquent les scores de Mélenchon aux présidentielles de 2017 et 2022, largement dus au vote utile et loin d'êtres représentatifs d'une adhésion à l'ensemble du programme de LFI (et aujourd'hui de la NUPES).

    Si on avait des législatives à la proportionnelle, il y aurait probablement environ 15% de députés de gauche radicale (y compris PC), 20% de sociaux-démocrates-écolo, 30 à 35% de députés de centre-droit ou de droite pas trop énervée avec lesquels un compromis de gouvernement serait possible, et 30 à 35% de députés de différentes nuances de droite allant du radical jusqu'à l'extrême (de Wauquiez / Ciotti jusqu'à Zemmour en passant par Le Pen). On pourrait se retrouver avec une France gouvernée au centre, mais un centre penchant un peu plus vers la gauche (et Macron le caméléon pourrait fort bien s'en accommoder). Il me semble que c'est le mieux qu'on puisse espérer lorsque la gauche ne représente que 35% des électeurs depuis des décennies.

    Alors que là, si jamais LREM n'a qu'une majorité relative à l'assemblée (ce qui pourrait arriver), faute de pouvoir trouver un compromis à gauche (les socialistes étant laminés, les écolos à l'ouest, et les insoumis évidemment opposés à tout compromis), ce n'est qu'avec le soutien plus ou moins tacite d'une partie des LR que Macron pourra gouverner.
    Quant à une majorité NUPES (et Mélenchon PM), même pas en rêve...

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    1. Pour les centristes de 2012, c'est aussi que beaucoup n'ont pas compris que le centre n'était plus vraiment lié à la droite et qu'il n'y avait pas des candidats partout.

      Pour les scores de la gauche plus récent, tu dis que les hausses sont des anomalies (au sens statistiques) mais on peut dire que ce sont les baisses. 2007 est atypique : c'était la première fois depuis longtemps qu'il n'y avait pas d'alternance et c'est lié à la "dynamique" de Sarkozy et sont génie politique pour cette campagne (et celle là seulement) avec le travailler plus pour gagner plus.

      Depuis 30 ans, si on enlève 2017, elle représente en moyenne 40% et pas un gros tiers.

      Dans tous les billets que je fais, je ne précise pas se statistiques sur la gauche dite radicale qui sert aussi de refuge contre les socdems sont à la ramasse.

      Il n'y a pas de législatives à la proportionnelle et, s'il y en avait une, nous serions beaucoup plus dans une "culture de négociation". LREM n'aura pas une majorité relative, pas la peine de tergiverser.

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  4. je ne sais pas ce qui s'est passé en 78 (je votais pas) mais globalement celui qui a le plus haut taux de vote, gouverne. Mais depuis 2017 (OK ca fait une fois), le taux est inférieur à 40% ce qui semble être la majorité relative avant. Ce qui est source d'instabilité ou de motif de contestation du pouvoir.
    Donc le centre doit se dé-droitiser un peu pour aller chercher à gauche les résiduels du PS et laisser le résidu de droite républicaine se résoudre à aller chez la famille mono occulaire ou rejoindre le centre (après avoir viré les queutards qui y trainent)

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    1. En 78 (la première fois que je votais...), les scores de la gauche et de la droite étaient très proches, et la droite était favorisée par le découpage des circonscriptions.

      Quant à la situation actuelle, ce n'est pas chez une gauche soc-dem laminée et soumise aux diktats de l'accord avec LFI que les macronistes pourront trouver le complément de voix à l'assemblée nécessaire pour obtenir une majorité, s'ils ne sont pas majoritaires seuls. Ils ne pourront compter que sur les moins droitiers des LR - et ça arrange bien Macron vu les réformes qu'il veut faire passer, en particulier sur les retraites, ou la politique de transition énergétique qu'il privilégie (incluant le nucléaire, ce avec quoi je suis d'ailleurs d'accord).
      Reste à voir quelle serait l'attitude des LR lors du vote de confiance (ou dans les négos préalables) si les LREM et leurs alliés traditionnels n'obtiennent pas la majorité absolue (290 députés, ce qui correspond au bas de la fourchette des projections actuelles des sondeurs).
      A défaut d'un accord de gouvernement (ou au moins de soutien sans participation), on pourrait avoir droit à une dissolution. Mais si accord il y a, il sera nécessairement à droite...

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    2. Cyrille,

      Le centre ne se dédroitisera pas : il profitera du fait qu'une partie de la gauche ne veut pas de la gauche radicale.

      Yves,

      Tous les socdems sont pour le nucléaire ou presque. Par ailleurs, il ne pourra pas y avoir de dissolution avant un an.

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    3. Il ne peut pas y avoir de dissolution moins d'un an après une première dissolution. Mais là il s'agirait de la première, non ?

      Après, rien n'oblige le premier ministre nommé à poser la question de confiance devant l'assemblée. C'est "juste" un usage. Si LREM & co. n'ont pas la majorité absolue, rien n'empêche Macron d'essayer de gouverner en s'appuyant sur des majorités de circonstance suivant les lois qu'il veut faire passer (par ex. avec LR sur les retraites).
      Mais avec un gouvernement minoritaire, et l'épée de Damoclès d'une motion de censure, ça risquerait d'être la crise permanente... Et la question de la dissolution finirait forcément par se poser.

      Ceci dit (pour répondre à ton autre message), ça me semble effectivement peu probable que LREM et ses satellites n'aient pas la majorité absolue.

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    4. Avec des "si", on ne va pas avancer. Les institutions sont ainsi faites qu'il y a quasiment toujours une majorité et, quand il n'y en a pas franchement, c'est comme en 88, ça se joue à un cheval près. Il sera toujours possible d'avoir une majorité en pratiquant l'ouverture et pas seulement au cas par cas (comme pour les retraites dont tu parles).

      Tu as raison sur la dissolution : il ne peut pas y avoir de dissolution pendant un an après les élections législatives qui suivent une dissolution. Je pensais que c'était après toute élections législatives. Le Constitution est ambigüe à ce sujet mais elle parle bien de "ces" élections.

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  5. Je ne comprends absolument pas pourquoi lorsqu’on fait référence à la victoire de Sarkozy
    on évoque le travailler plus pour gagner plus, c’est vite oublier le travail de sape du ps pour mettre la tête sous l’eau de leur candidate, (qui va s’occuper des enfants ?) et, excusez du peu, le discours d’ouverture qui était un secret de polichinelle bien avant qu’il ne soit prononcé.
    Le génie il est là, pas ailleurs.
    Exactement comme Jean Nupses, qui fait lui aussi l’ouverture et comme avant lui Mitterand en 1981. Quel homme politique résiste à l’appel des sirènes.
    Hélène

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    1. Le génie de Sarko repose bien sur le travailler plus pour gagner plus et ses dérivés : la défiscalisation des heures supplémentaires, la facilitation de l'accès à la propriété, l'allègement des droits de succession et tous ces trucs qui étaient un message clair et libéral : on s'en sortira en travaillant et l'Etat va t'aider. Le discours d'ouverture ne vient qu'après et est annexe.

      Par ailleurs, Ségolène Royal déchaine les passions. C'est un peu comme Hollande. Les partisans et les opposants ont leurs arguments mais refusent de voir que les autres ont en partie raison. Donc tu oublies ses défauts. Le premier est bêtement physique : sa voix, et elle n'y peut pas grand chose. Le deuxième est programmatique : elle a bâti son projet sans s'adresser aux militants mais uniquement aux membres de Désir d'Avenir. En promouvant la démocratie participative, elle cassait les valeurs des partis traditionnels voire l'esprit de la Constitution. Enfin, il ne faut pas oublier les aspects humains. Son conjoint était le patron du PS et représentait au fil des motions entre 60 et 80% de ce dernier. En se présentant à la primaire, elle a mis un coup d'arrêt à ses ambitions : il ne pouvait toute de même pas s'opposer à la mère de ses enfants, ça aurait été grotesque.

      Ainsi, certes le PS n'a pas été d'un grand soutien, notamment de la part de ses dirigeants, Fabius et Hollande en premier, mais il ne faut pas oublier les raisons et ça n'enlève en rien les qualités que l'on peut découvrir chez Royal.

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