06 mai 2022

Remettez la balle au centre et Nupes part ailleurs


 

Le conseil national du parti socialiste a voté hier la participation au « Nupes » et donc, il faut le dire même si on peut relativiser, la soumission aux insoumis et à Mélenchon qui tient enfin sa revanche. Lui offrir un tel cadeau est très gentil. Entends-dont nous bien : je ne suis pas membre de cette formation politique et les membres font bien ce qu’ils veulent. Je suis seulement tout d’abord électeur et ensuite blogueur politique depuis 16 ans, militant pour le centre gauche.

Force est de constater que cette proportion de l’électorat n’est plus représentée, en France, sauf par la moitié gauche de LREM (ou Renaissance, je ne sais plus comment ils s’appellent) qui fricote néanmoins avec le centre droit et qui n’est donc évidemment par un parti de gauche. Mais c’est la seule formation où peut se retrouver environ un électeur sur huit, parmi ceux de gauche. C’est énorme et cela fait basculer des majorités, voire empêchera la « vraie gauche » de revenir un jour aux manettes.

 

La belle époque d'un candidat de gauche à 45%
au premier tour et se vautrant au second.


Sauf en 2017 et 2022, je le disais hier, la gauche représentait 43% des électeurs du premier tour de la présidentielle. Ce score est tombé à 32%. Un électeur sur 8 est parti. Parmi ces 32%, moins de 2 reviennent au Parti Socialiste. Et le PS vient d’accepter de se fondre dans une autre partie de la gauche ! C’est pitoyable.

La seule bonne stratégie aurait été de continuer à se battre pour une bonne vieille gauche raisonnable pour ces législatives, quitte à tout remettre à plat, ensuite, s’il faut vraiment réorienter les choses. Le « CNPS » vote toujours les textes soutenus pas le premier secrétaire donc la décision d’hier soir n’a rien de surprenante mais, à la longue, la démocratie a quitté ce parti qui ne reste qu’un combat entre motions avec des chefs qui veulent sauver des postes et du financement sans se poser de question. Au cours de son discours, la numéro deux a déclaré que, selon les statuts, le CNPS a la légitimité pour prendre cette décision, ce dont je ne doute pas, mais je serais assez surpris de ce que serait une décision des militants après un vote à bulletins secrets… D’ailleurs, le « non » a remporté 30% ce qui, vu les habitudes de ce parti, est déjà pas mal…

Manions les chiffres pour rigoler : 62% des cadres de ce qui ne représente plus que 1,6% des Français vient d’entériner le fait qu’un Français sur huit, soit 12%, peut oublier le parti socialiste et se ranger derrière LREM.

Je suis plié de rire à la lecture de représentants de militants de gauche, qui ne sont d’ailleurs plus au PS, tels que Denis (mais pas que, mon problème est qu’il reste à peu près le seul blogueur de la catégorie…), de voir le PS virer ceux qui ne sont pas à gauche, selon eux. Je ne vois pas d’intérêt, pour autant, à ce que le PS reprenne un positionnement électoral déjà validé par trois autres formations, LFI, EELV et PCF… Ces gens veulent se battre uniquement pour partager la cabine téléphonique ? La vérité est que cette décision, qui est une décision d’exclusion des électeurs, tout de même, contribue à la marginalisation de la gauche « officielle » qui finira à 2% en tout après la disparition du chef charismatique tout en criant qu’elle est la seule à avoir raison. 2% en quatre partis, ça va nous faire de jolis trotskistes.

 


Ils sont amusants à expliquer point par point ce qui n’a pas été à gauche chez Hollande, l’éternel coupable de tout, en oubliant le mariage pour tous, l’égalité des impôts sur le revenu des capitaux avec ceux de celui sur le travail, pourtant absolument exemplaire de ce qui est bien à gauche, la prise en compte de la pénibilité pour la retraite. Il faut qu’ils reviennent éternellement sur les lois Macron et El Khomri : peu importe si le chômage et, donc, la précarité baissent depuis, ils ont décidé que les mesures étaient mauvaises. Peu importe si les syndicats ne sont plus significatifs en France, si seules les grosses entreprises sont concernées…

Mais, surtout, il n’y a pas que les mesures unitaires, il y a aussi les grands principes. Comment voulez-vous que l’on soit acteur de la lutte contre le réchauffement climatique de la planète si on se brouille avec nos partenaires étrangers, notamment à se mettant à refuser des contraintes qui nous sont imposées ? Pourquoi d’autres pays ne le feraient pas ? Il y a la République, il y a la laïcité… Autant de sujets qui m’ont fait voter pour le candidat communiste, au premier tour de la présidentielle, vu que, de toute manière, je n’aimais aucun projet d’aucun candidat…

 

LFI semble avoir la même technique que pour la présidentielle. Vous pouvez lire les récents propos : le seul sujet qui compte est maintenant d’être présent au second tour, même si cela ne sert strictement à rien. D’autant qu’ils se foutent de qui ira au second tour et sera capable de le gagner…

La stratégie d’union au premier tour d’une élection n’a jamais fonctionné. Je parlais de pourcentages globaux de la gauche pour la présidentielle. En 1974, Mitterrand a fait 43% au premier tour ce qui énorme, presque gaullien (près de 45% pour le général en 1965), mais s’est fait balayer au second. La gauche a été ratiboisée aux législatives du temps du programme commun. Les seules fois où un accord a permis la victoire, y compris pour le Front Populaire, c’est quand les accords étaient limités à des « non-agressions » ou des désistements de second tour.

 


Le PS, tout comme EELV, ont commis, en quelques jours, chacun la même faute majeure, non pas en tant que partis politiques (ils font ce qu’ils veulent) mais en tant que « représentants du centre gauche » et en laissant la place aux macronistes.

J’espère que Delga (que je ne connais pas plus que cela), Cazeneuve et autres Le Foll arriveront à créer une nouvelle formation politique, peut-être avec le nouveau machin de Dray et, sans doute, avec l’appui d’Hollande (même si Sarko et Giscard m’ont confirmé que le retour aux manettes d’un ancien président n’ayant pas pu se faire réélire n’est pas nécessairement une bonne idée, pépère a suffisamment de voix pour faire un bon « vice-président » et parler aux gens qui ont cru en lui). Ils pourraient être rejoints par ceux déjà passés à LREM (je pense à Le Drian, pas à Valls, hein !) et former une vraie formation politique indépendante mais refusant de faire l’erreur du passé : se mettre à dos avec le parti centriste, LREM…

 

Tentative de rapprochement vers la 
parité dans les illustrations de ce
billet de blog.

Car la gauche n’a pas oublié que l’histoire de ses victoires, elle a oublié aussi d’étudier l’histoire des époques ou les partis centristes, coupés d’accord avec la droite, étaient forts. Avant ces deux dernières présidentielles, la gauche n’avait pas été aussi basse qu’en 2007, année où la candidate du parti socialiste était revenue à un beau score de premier tour (plus que Jospin les fois précédentes, par exemple) alors que la gauche dépassait à peine le dernier premier et où le candidat centriste était à 18 ans, pour finir laminée au second tour et aux législatives.

Il faut voir où est l’intérêt de la gauche.

Et celui du peuple.


La deuxième partie du titre de ce billet est inspirée par de mes fidèles commentateurs (il me l'avait suggérée mais le contexte n'y était pas, il fallait le "t" à "part"). Qu'il en soit remercié.

18 commentaires:

  1. Intérêt de la gauche n'est pas forcément celui du peuple et lycée de machin. Mais le fait d'avoir cité Delga, rétablit la parité dans ton billet, ce qui est largement suffisant.

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    1. Du confonds la gauche et les élus de gauche... Je cite Delga surtout parce que ce n'est pas une hollandaise historique;..

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  2. Un des seuls blogueurs de quelle catégorie au juste ? Blogueur de gauche ? ;+) Je n'ai pourtant pas le monopole de la gauche par les temps qui courent.

    Ce que tu appelles cette bonne vieille de gauche raisonnable ressemble à s'y méprendre à ce que je qualifie souvent de gauche de droite qui fait à peu près tout le contraire de ce pour quoi elle a été élue.

    Concernant la stratégie de rassemblement au 1er tour, ce qui change aujourd'hui, c'est que nous sommes sortis du bipartisme. Nous avons un bloc à droite toute, à gauche toute et un bloc des tous mous de l'ultracentre qui mène une politique de droite sur le plan social et économique et de gauche sur le plan sociétal.

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    1. Denis, tu pourrais signer ! J'ai répondu ci-dessous suite à une erreur (voir en réponse à l'anonyme Hélène).

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  3. Tous les députés PS verts et écolos élus vont donc être obligés de voter comme les insoumis ?
    Où va t-il y avoir des fondeurs ?

    Hélène

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    1. J'ai utilisé le mot "catégorie" pour ne fâcher personne mais il n'y a aucun doute sur la signification vu que nous sommes assez peu de blogueurs à continuer.

      Hollande a fait une politique conforme à lui-même (un type qui se prétendrait surpris serait assez ignare) et a été élu pour virer Sarko, surtout... La locution "gauche de droite" est péjorative pour les gens non élus qui sont ciblés et tu devrais ne pas l'employer, le moment de la réconciliation nécessaire approche.

      Pour la fin du bipartisme, je suis prêt à parier que c'est ponctuel... La gauche nupsienne va se disloquer et il restera le centre et une droite dure. Le centre aura remplacé la gauche. Le centre aura remplacé Hollande ce qui, en fin de compte, va faire une belle jambe.

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    2. Nicolas ce n’est pas moi qui ai écrit le commentaire « anonyme » sans le prénom.

      Hélène

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    3. Hélène, j'ai confusationné, désolé...

      Pour te répondre, il n'y a pas d'obligatoire de vote. C'est du pipeau uniquement, de la pure stratégie électorale pour les insoumis mais les autres sont tombés dedans.

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  4. On va faire le coup du loup dans la bergerie... Mélenchon et ses moutons n'ont qu'à bien se tenir !

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  5. Au fait, quelqu'un a des news du groupe de réflexion lancé par J Dray?
    De toutes façons, chacun fait dire ce qu'il veut aux chiffres (même si je partage entièrement les tiens et ton analyse). Mais en gros, on se radicalise à gauche, on se radicalise à droite et le centre va progresser. Et, malheureusement plutôt centre droit.
    Et avec une abstention qui sera plus forte que pour la présidentielle, les triangulaires qui auraient pu faire gagner des circos aux LFI vont être, pour le moins, rares. Donc un bon gros nombre pour Renaissance en marche arrière

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    1. Pas de news de Dray. Je me suis inscrit mais je n'ai eu aucune réponse.

      Tu as raison de dire que chacun fait dire ce qu'il veut aux chiffres mais il y a des types meilleurs que d'autres (désolé pour mes chevilles mais je suis un peu tombé dedans quand j'ai été petit, notamment avec des parents profs de math assez peu portés sur le bricolage, puis par des études de statistiques).

      Oui... pour la victoire d'LREM...

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    2. Une raison non politique pour la victoire de LREM, ne viendrait-il pas du fait qu'une fois le premier tour passé, il n'y a plus de réserves de voix pour nupes alors de le rn en aurait peut-être un peu du côté de ce qui reste de LR.

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    3. Ca n'est pas politique, ça ?

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    4. Je pensais préciser que cela signoifiait de fait, étant donné l'acharnement des insoumis, que le résultat du deuxième tour ne pourra pas être augmenté car plus de réserve de voix.

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  6. Pour résumer au PS (Parti Soumis) on a des soumis aux insoumis et des insoumis aux soumis.
    Marco

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  7. "La vérité est que cette décision, qui est une décision d’exclusion des électeurs, tout de même, contribue à la marginalisation de la gauche « officielle » qui finira à 2% en tout après la disparition du chef charismatique tout en criant qu’elle est la seule à avoir raison." J'ai rêvé ou Hidalgo à fait moins de 2% ? L'article semble écrit pour un temps ou le PS faisait 20%

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