26 mai 2022

Elections : et si c'était hier ?

 


J’ai fait des études de statistiques et les « études de chiffres » me passionnent réellement ce qui explique mes deux récents billets rappelant des résultats d’élection alors qu’on pourrait me penser bon pour lecabanon. Je peux rester des heures à collecter des données et à les regarder benoîtement alors que d’autres passeront des heures à faire de la musculation, à pécher ou à lire Proust.

Cela est évidemment inutile tout comme les analyses politiques faites sur les réseaux sociaux mais on perd moins de temps, par exemple, qu’un militant de gauche défendant l’union pour espérer gagner en se persuadant que c’est la seule solution. Il n’est pas sans intérêt, non plus, de réviser des leçons d’histoires, ce qui, au contraire, montre que tout est possible alors que les analyses politiques faites à l’époque étaient erronées.

Prenons 2002 et l’absence de la gauche au second tour de la présidentielle. On nous sort un tas d’arguments comme la concurrence de Jospin par Taubira, l’affaire « papy Voice » et toutes ces histoires de sécurité mises en avant et la mauvaise campagne du candidat de gauche. Une grande partie est sans doute vraie mais la vérité aussi que le candidat de droite, Chirac, était tellement mauvais que les électeurs ont souvent voté Le Pen, plaçant se dernier au second tour. Laisser croire que Taubira y était pour quelque chose est aussi bête que d’expliquer, aujourd’hui, l’échec de Mélenchon par la candidature de Roussel, par ailleurs. La vérité est aussi que les voix de « gauche de gouvernement » étaient aussi réparties entre Chevènement et Mamère : ce sont surtout elles qui ont manqué.

 


Ma première remarque est que mon tableau montre un effondrement de « la droite de gouvernement », sous la cinquième, essentiellement à cause (ou grâce…) à la montée de la droite populiste (je suis aimable, aujourd’hui, mais je parle bien de l’extrême droite). Son poids est divisé par cinq alors que la gauche ne fait que perdre un quart, au fond, et sûrement à cause du centre. Par contre, mes données ne commencent qu’en 1958. N’oublions pas que, dix ans avant, la gauche était largement majoritaire… Parler d’une droitisation de la société est-il une erreur ou pas ? Oui depuis le début de la Quatrième. Non depuis celui de la Cinquième. Alors, on s’en fout…

Dans mon tableau, j’ai choisi de faire figurer quatre blocs : l’ancienne « gauche pluriel » (les ancêtres du PCF et du PS ont souvent fini par bosser ensemble), le centre (qui n’a commencé à exister que quand il s’est rendu indépendant de la droite, soit vers le début des années 2000), la droite dite de gouvernement (en gros issue du gaullisme, de la démocratie chrétienne et des trucs comme ça) et la droite radicale (qui, sous l’ère « moderne », n’existe que depuis la moitié des années 1980 et qui, même si je ne devrais pas le dire, est sans doute plus populiste qu’extrême, mais je vais recommencer à diaboliser).

La droite de gouvernement a presque disparu. Elle est à 10% dans mon tableau mais, la candidate officielle, a fait moins de 5 à la dernière élection. La gauche dans le périmètre de la « plurielle » est ainsi majoritaire en France mais est très divisée (les deux gauches irréconciliables…). La gauche radicale est à 20%. De fait, la politique, en France, est devenue, progressivement, mais franchement depuis 2017, un combat entre des « progressistes libéraux » et des « populistes de droite ».

Ca ne nous rappelle pas, un peu, la politique aux Etats-Unis avec l’opposition Trump – Biden ? Vous me direz que c’est évident mais la question que je me pose est de savoir si cela ne serait le fruit d’une très lointaine évolution et ne serait pas durable pour des dizaines d’années ? Auquel cas, du reste, il faudrait arrêter de nous foutre sur la tronche au sein du « camp du bien », d’ailleurs…

 


Rester dans les chiffres ne doit pas empêcher de lever les yeux, hein ! Et d’oublier de quoi ils sont la conséquence. Mes tableaux ne reprennent pas les éléments politiques que l’on a souvent tous en mémoire (2017, uniquement à titre d’exemple, ne fut pas que l’éclosion du centre, il fut la déroute de la droite qui avait le mauvais candidat et celle de la gauche, conséquence de « la fronde », sans juger du bien fondé de celle-ci) mais la mémoire s’estompe (on le voit ces jours-ci : on fait dire n’importe quoi à « mai 68 » et au « programme commun »). Ils ne reprennent pas, non plus, la répartition entre les différentes composantes de chaque « pavé ». Et, surtout, ils n’évoquent pas l’influence du leader.

Chirac, par exemple, n’en a jamais été un. Il était le chef de la droite lors de la défaite de 1988 (puis celle de 1997 mais c’est un peu différent) et a été élu Président deux fois un peu par hasard (notamment parce qu’il avait des scores très faibles lors des premiers tours). Il nous a été sympathique car il a quasiment commencé par cinq ans de cohabitation dans une période de prospérité économique et avec un gain de coupe du monde et a fini comme une espèce de papi bon enfant qui surveillait ses ouailles à l’occasion… Sarkozy a été un leader à droite mais il s’est autodissout dans une crise économique à laquelle il a tenté de répondre par les discours de Grenoble et Dakar. La droite n’ayant jamais trouvé un remplaçant (Juppé aurait pu avoir le job…), elle a coulé avec lui.

A gauche, je suis moins objectif, restant fan d’Hollande, mais nul doute que Mitterrand et Jospin furent des leaders, le dernier étant mort dans l’élection de 2002 et l’autre « mort tout court ».

 

Cela nous amène directement en 1988 vu que j’en parlais hier. Mitterrand était le chef incontesté de la gauche à condition qu’il se mette Rocard dans la poche. Chirac était grillé mais, plus que lui, c’était la droite la plus bête du monde qui était occise. Tonton l’a emporté avec un score de premier tour impressionnant (ce que ne montre pas, non plus, mon tableau). Le score de la gauche aux législatives qui ont suivi n’a jamais été égalé depuis. Pourtant, la majorité présidentielle n’a pas eu de majorité absolue à l’Assemblée et la législature s’est terminée par une débâcle.

Avant 1988, il y avait eu 1986. L’alternance est devenue la règle (la majorité a changé à chaque législative depuis, sauf en 2007 et… probablement en 2022). Peu importe.

Avant c’était 1981. Le premier président de gauche de la Cinquième. Je passe ce qui a abouti à sa directement à cette victoire (la connerie de la droite, surtout). Toujours est-il que la gauche avait mis 23 ans à s’approprier notre Constitution pour gagner. Toujours est-il que Mitterrand a fini par passer pour centriste à la place de Giscard et avec un programme issu du programme digne d’une gauche bien plus radicale que celle des zozos aujourd’hui et issue du programme commun que Tonton avait eu la bonne idée de renier auparavant. Une fois élu, il a lancé une politique puis lui a tourné le dos avant deux ans…

Il n’empêche que ce brave Mitterrand était à moitié grillé peu avant 1981, tant la candidature semblait promise à Rocard… Tout comme Chirac paraissait grillé en 1995 face à Balladur. Les deux furent pourtant ceux dont les mandats furent les plus longs de la Cinquième, l’un avec quatre ans de cohabitation et l’autre cinq.

C’est bien le bordel. D’autant que les socialos étaient en tête des législatives précédentes, en 1978, mais n’a néanmoins pas réussi à l’emporter…

 


Bien évidemment, les tableaux de chiffres ne permettent pas de déduire ou plutôt se remémorer tout cela mais font une bonne base pour visualiser une chronologie et se remettre dans le ciboulot quelques éléments ce qui n’est pas nécessairement inutile dans le contexte actuel qui sera d’ailleurs terminé dans quelques semaines.

S’en suivra une nouvelle période avec des élections locales et d’autres européennes. J’aurais d’ailleurs pu placer ces dernières dans mon tableau mais je ne suis pas persuadé que les votes soient spécialement significatifs. Il n’empêche qu’il ne faudra pas oublier, dans la préparation de cette nouvelle « ère », qu’Olivier Faure aura donné deux fois les clés du parti à un autre, aux européennes de 2019 et aux législatives de 2022… Le virer est nécessaire. Comment voulez-vous que son parti retrouve le lustre d’antan avec si peu de circonscriptions qui lui sont attribuées, lui qui, il y a à peine dix ans, avait la majorité à l’Assemblée ?

 


Il reste un point à voir pour tenter de deviner la suite. Macron aura fait ses deux mandats. Mélenchon a avoué être atteint par la limite d’âge. Le Pen a annoncé arrêter ses candidatures successives.

Or, on a quand même sacrément l’impression que les victoires sont toujours poussées par des leaders. Va-t-il falloir faire sans ?


Et je me suis concentré sur quelques élections, omettant, d'ailleurs, certains très récentes. Pour plus tard ?

8 commentaires:

  1. « l’affaire « papy Voice » »

    Sans oublier le succès de l'émission de télé « The Voise »…

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  2. Très bon travail.
    Reste plus que le dernier échelon : les projections
    - combien de députés renaissants, nunupusiens, rassembleurs nationaux, républicains, reconquistadors en juillet 2022.

    Hélène

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    1. Non. On ne peut pas faire de projection à ce niveau. Il faut laisser les spécialistes en faire et ils ne font que raconter des conneries, par ailleurs (il faudrait faire un sondage significatif dans une grande partie des circonscription alors que, pour les présidentielles, il suffit d'interroger un peu plus de 1000 personnes).

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  3. Arié, tu me fais franchement chier avec tes commentaires qui semblent être là uniquement pour prouver que tu ne lis pas mes billets. J'ai foutu le dernier à la poubelle sans même regarder de quoi il parlait et je me demande bien pourquoi tu continues à commenter.
    Il n'empêche que tu ne lis pas et tu est emblématique des militants crétins qui vivent dans leur monde. Tu n'as aucun recul. Tu as, ainsi, fait un commentaire sur ce que je disais sur 2012 : pauvre con, tu étais fan de Chevènement, c'est bien facile de dire partout qu'il n'a pas fait perdre la gauche alors qu'il n'a fait que ça de toute sa carrière. Et donc, tu oublies de réfléchir : les gens qui ont voté pour Taubira sont des andouilles qui ne voulaient pas voter pour Jospin. On a le même phénomène, aujourd'hui, avec les gens qui ont voté Roussel. Je suis fatigué de voir que tu te plantes à CHAQUE commentaire que tu laisses dans ce blog, tant tu es sûr de toi et refuse d'ouvrir les yeux. Connard fini.

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  4. Nicolas,
    la fermeture de Renault Vilvorde.
    Tu n’imagines même pas la profonde déception des Français devant la réaction du 1er ministre que l’on croyait vraiment de gauche.
    N’est ce pas à cette occasion qu’il a dit devant les caméras : l’état ne peut pas tout.
    Le ministre Allègre dont le but était de dégraisser le mammouth etc.
    Les sympathisants de gauche ont été douchés pour longtemps.
    De même que les sympathisants de droite non atlantistes l’ont été également après Chirac.
    Même si il est de bon ton de considérer qu’il n’a rien fait, c’est sous sa présidence que la France s’est élevée contre la guerre en Irak, c’est sous sa présidence que les Français ont été consultés en 2005.
    Je ne critique pas ceux qui ne partagent pas ces idées, mais il faut tenir compte de celles d’une grande partie de la population qui y adhèrent.
    Hélène

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    1. OK pour ce qu'il a fait mais mon billet ne porte pas sur 2002 mais sur l'ensemble des élections et sur certaines omissions que l'on peut faire dans les analyses.

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  5. Arié, je ne sais plus si tu es con ou fou : je me contrefiche de tes arguments qui sont systématiquement hors sujet tant tu ne penses qu'à donner ta vérité. Je me fous totalement de tes banalités.

    Je fais un billet pour dire de faire attention et de prendre du recul avec, pour 2002, le fait que si Le Pen était au second tour c'est aussi parce que la droite n'a pas fait son boulot et que Christiane Taubira n'est pas responsable de tous les mots tout en précisant que les arguments habituels n'était pas faux et tu viens me dire que j'ai tort en ressortant les arguments habituels;

    Tu comprendras que tu m'emmerdes mais, en plus, c'est systématique, tu es toujours hors sujet, je ne sais pas comment tu fais.

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