18 février 2015

Que faire de la gauche ?

Radeau de sauvetage adapté à un pédalo.
Il était une fois un pays au bord de la ruine, gouvernée par une droite usée et présidée par quelqu’un que les habitants ne pouvaient pas blairer, au sein d’un monde subissant une grave crise qui n’en finit pas. La gauche avait été très mal. Son plus gros parti, le Parti Socialiste avait néanmoins réussi à ne pas couler et à organiser des primaires qui ont donné un élan permettant la victoire de son candidat à la présidentielle. La gauche de la gauche avait réussi à se rassembler derrière une forte personnalité qui fit un bon score au premier tour alors que la candidate des écolos était à la ramasse.

Néanmoins, le gouvernement tout frais qui est arrivé dans la foulée a multiplié les couacs et n’a pas réussi à faire l’inversion de la courbe du chômage. Le leader de la gauche de la gauche enchaîna les gaffes qui lui firent perdre toute crédibilité. Quant aux verts, ils en étaient à déprimer les militants. Trois ans après l’élection, le Parti Socialiste était profondément divisé, une majorité soutenant le gouvernement et le président et l’autre s’y opposant frontalement, les jugeant ridiculement illégitime. La droite usée était toujours aussi usée et n’arrivait pas à se remettre. L’ancien président était revenu pour mettre de l’ordre mais rien n’allait correctement. Le parti s’était divisé entre les partisans d’une droite dure et les autres, formant des clans illisibles,… Le centre droit, pendant ce temps, était toujours aussi risible, n’arrivant à exister qu’à la ramasse du reste de la droite, incapable de se trouver un leader capable de se faire entendre dans les médias. Alors c’est la droite de la droite qui profitait de tout ce bordel après un sérieux nettoyage par sa présidente sur le dos d’une gauche illisible depuis longtemps : « En 1981, on a tenté les élections et la gauche a mené une politique de droite. Alors que faire ? Le succès du Front national qui se veut antilibéral et anti-immigrés est l’écho de cette période de désarroi. »

Ce n’est pas tous les jours que je cite Krivine, moi ! Vive l’unité de la gauche, tiens !

L’unité de la gauche ? C’est un peu mon dada, mon truc à moi. L’élection présidentielle de 2002 avait été un traumatisme pour la gauche. Moi-même, je n’avais pas fait le déplacement jusqu’en Bretagne pour voter au premier tour, je me réservais pour le second. Alors j’ai fini par m’inscrire sur les listes électorales dans ma commune de résidence, le Kremlin-Bicêtre, enclave MRC (le parti de Chevènement), au cœur de la banlieue rouge, cerné par Villejuif et Ivry-sur-Seine.

En 2004, j’ai voté pour les plus grosses listes de gauche, celle menées, aux deux scrutins, les régionales et les européennes. En 2005, j’ai voté oui au referendum. En 2007, j’ai voté pour Ségolène Royal, la candidate socialiste aux deux tours des présidentielles et pour Pierre Gosnat, le candidat du Parti Communiste, le candidat de gauche qui avait le plus de chance d’arriver en tête aux législatives, dans ma circonscription.

2008 a été un deuxième tournant, pour moi, vu que les candidats aux élections locales s’intéressaient aux blogs. On a même reçu Jean-Paul Huchon à la Comète pendant la campagne des régionales de 2010. Ainsi, je connaissais à peu près tout le monde.

En 2008, donc, j’ai voté pour la liste menée par Jean-Luc Laurent, actuel président du MRC, aux municipales vu que, travaillant avec les cocos et les socialos, il avait réussi à ravir la ville à la droite en 1995 puis à la gérer correctement. Les mêmes jours, j’ai voté pour Alain Desmarest, le conseiller général communiste sortant, dans ce département communiste. En 2009, j’ai voté socialiste aux européennes, tout comme aux régionales, l’année suivante.

En 2012, j’ai fait la campagne de François Hollande, avec Jean-Luc Laurent, et donc voté pour lui. Aux législatives, je ne me voyais pas ne pas voter pour Jean-Luc Laurent. J’ai donc participé à l’élimination de Pierre Gosnat (à eux deux, ils ont dépassé 60% au premier tour). C’était la première fois depuis 2002 que je ne votais pas pour le sortant quand le sortant était de gauche. En 2014, j’ai à nouveau voté pour la liste menée par Jean-Luc Laurent. A noter que je n’ai jamais voté pour le parti socialiste au cours de ces 14 ans pour des élections municipales, cantonales et législatives. La discipline…


Et nous voila aux élections cantonales. Malgré les difficultés de la gauche, le canton semble promis à la gauche. Alain Desmarest avait fait 50% au premier tour et 75% au second en 2008 (mais le découpage du canton a légèrement changé). Il n’empêche que la gauche est en baisse et que la participation avait été de l’ordre de 50% en 2008. Cette année, il y a deux « couples » de candidats, en plus de celui où est mon copain Bernard Chappellier d’EELV (9% en 2008). Imaginons qu’ils fassent des scores proches, de l’ordre de 25% vu qu’Alain Desmarest avait fait 50%... Cela nous fait précisément 12,5% des inscrits, c’est-à-dire le seuil minimum pour être présent au second tour. Comme la gauche n’a pas le vent en poupe et que l’abstention pourrait augmenter, il n’est pas exclu que seul un candidat de droite soit qualifié pour le second tour…

Nous arrivons à un degré de connerie maximum. Le canton a deux communes, le Kremlin-Bicêtre et Gentilly. En 2012, François Hollande a fait 65% au second tour dans la première et 72% dans la seconde. J’imagine la gauche absente du second tour aux cantonales de 2015…

Bravo les gars…

Dimanche, je me promenais sur le marché (oui, j’habite une commune qui a une longue tradition de commerce le dimanche…). J’ai croisé Bernard. Je me suis alors rappelé que je ne savais pas pour qui j’allais voter. Il y a trois paires de gauche : une Front de Gauche avec le sortant, une MRC soutenu par le PS avec des inconnus, une EELV avec Bernard.

Je me voyais mal voter Front de Gauche, c’est-à-dire pour Alain Desmarest que j’apprécie beaucoup (mais la rumeur dit qu’il n’habite plus le quartier, les gens sont méchants…).

Lundi, Jean-Luc Laurent, « mon » député-maire président du MRC, que j’apprécie beaucoup également, a fait un communiqué pour dire que les trois députés de son parti voteront contre la loi Macron. Je ne l’ai pas élu pour la gloire de sa formation politique mais pour donner une majorité à François Hollande. J’ai l’impression qu’il y a un peu beaucoup de députés qui oublient qu’ils n’ont pas été élus pour leurs opinions politiques mais pour donner une majorité à celui qui avait réussi à foutre la droite dehors.

Donc, en l’état de mes connaissances, je ne voterai pas pour des candidats MRC aux prochaines élections. Ce parti n’a plus de raison d’être (mes excuses à ses élus, à Elie,…) et disparaitra lors de la retraite du Ché.

Je voulais donc voter Front de Gauche ou, plus précisément, Alain Desmarest. Mais, hier soir, André Chassaigne, chef des députés du Front de  Gauche, a annoncé que les députés Front de Gauche voteraient pour la motion de censure déposée par la droite. C’est, à ma connaissance, une première. Il est hors de question que je vote à un premier pour le moindre guignol issu de cette formation politique s’il ne se désolidarise pas totalement de ces propos.

Chassaigne a ajouté : « Puisqu'on nous empêche de nous exprimer avec le 49.3, il faut renverser ce gouvernement pour mettre en place un gouvernement de gauche, qui applique la politique pour laquelle les Français avaient voté en 2012. » Il va falloir arrêter ses caprices de gamins trop gâtés et refaire le monde : François Hollande, pour qui les Français ont voté, a toujours eu une telle ligne politique, y compris pendant la primaire et, s’ils ont voté pour lui, c’est essentiellement pour foutre dehors les guignols précédents.

Je vais lancer quelques appels…

A Alain Desmarest (il me semble qu’on se tutoie dans la vraie vie) : Alain, tu vas nous faire une jolie proclamation pour dire que tu désolidarises totalement de la position exprimée par Chassaigne, que tu es partisan de l’unité de la gauche, que tu as toujours tenter de représenter particulière tous les gens de toute la gauche de ce canton.

A Pierre Laurent : vous allez faire un communiqué expliquant que vous allez proposer aux instances dirigeantes du Parti Communiste Français l’exclusion immédiate avec coups de pied au cul de tous les députés membre du PCF qui allaient voter une motion de censure contre le Parti Socialiste et que si les instances dirigeantes ne vous suivent pas, vous allez démissionner.

A Jean-Luc Laurent : vous allez faire un communiqué expliquant que vous vouliez dire que vous ne vouliez pas voter contre la loi Macron mais vous abstenir et vous allez retirer les candidatures MRC aux cantonales. Qu’est-ce que vous en avez à foutre ?

A Jean-Christophe Cambadélis (tiens, je vais le tutoyer et le rudoyer) : putain de bordel, tu vas nous faire déménager une personnalité politique du Parti Socialiste au Kremlin-Bicêtre dès 2015 et tu vas faire en sorte qu’un type de gauche « normal » puisse voter socialos aux élections locales.

A Manuel Valls et Emmanuel Macron : pourquoi avez-vous été toucher à un marqueur de gauche comme le travail le dimanche alors qu’on s’en fout totalement (hors zones réellement touristiques où l’on peut piquer du pognon à des touristes étrangers) sans de sérieuses compensations pour les salariés et pas des machins incompréhensibles issus d’improbables négociations ?

A leurs opposants : mais franchement, qu’est-ce que vous en avez à foutre de ces conneries ? Vous avez demandé l’avis des braves gens susceptibles de travailler le dimanche ? Et celui de ceux qui sont obligés de quitter le salariat pour avoir une rémunération ? Et les autres volets de la loi, ceux qui seront réellement profitables, vous vous torchez le cul avec ?

A Pierre Gosnat, dans son coin de ciel : vous avez procédé à un "désistement républicain", en 2012. Vous ne vous êtes pas maintenu au second tour car un candidat de gauche était devant vous au premier. Si Dieu et le paradis existaient, je vous suggérerais de pousser un coup de gueule contre tous ces ânes incapables de s'entendre.

A François Hollande : bon courage, mon gars.


A Bernard Chappellier : si tu me payes une bière, je vote pour toi. Si tu m’en offres une deuxième, je fais ta campagne sur le blog.

22 commentaires:

  1. Je me demande si vous ne confondez pas un peu (dans le début du texte : pas encore lu cette épaisse tartine…) les verbes surnager et submerger.

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    1. Ah oui merde. Surnager ne serait pas très adapté. "Ne pas submerger" ?

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    2. Non : submerger est plus ou moins synonyme d'engloutir, donc ça ne va pas. Mettez : "avait réussi à ne pas couler (ou sombrer)".

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    3. le vote cautionne le système constitutif, pour lequel je ne suis point d'accord : démocratie représentative ( qui peut me représenter sans rire.../ démocratie directe (seule vrai démocratie)

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  2. Joli. Bon Dieu existe seule objection au billet ;) mais beau pour le reste

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  3. Sans vouloir être méchant à votre endroit, parce que tout ça n'est pas de votre faute, je dois avouer que je me marre bien en ce moment. Pourquoi lâcher une dizaine d'euros pour aller voir un film, alors que l'actualité nous offre comique, rebondissements, trahisons, ambitions qui se dévoilent, bref tous les ingrédients d'une bonne histoire ?

    Le plus drôle, c'est qu'alors que tout est en train de barrer en couille, à gauche comme à droite d’ailleurs, le capitaine du pédalo, son quartier-maître et quelques moussaillons continuent malgré tout d’invoquer la république et ses supposées valeurs. Comment ne pas penser à l’empire romain du Vème siècle qui n’existait pratiquement plus en dehors de Rome et ses environs, dirigé par un gamin de 11 ans jouet des diverses factions du palais, ce qui n’empêchait pas pour autant que la fiction impériale soit maintenue. Pour mémoire, la grande décarade romaine a commencé quand on a donné la citoyenneté aux barbares. Je dis ça, je ne dis rien, hein !

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    1. Bah ! Comme disait l'autre : la démocratie ce n'est pas génial mais on n'a rien trouvé de mieux.

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    2. juste que la décadence romaine n'a pas vraiment démarré en confiant la citoyenneté aux "barbares" mais dans l'incapacité de l'empire romain de se décentraliser! sans compter cette manie de s'accaparer les richesses via des postes à responsabilités. l'histoire fait des boucles, je crois. Mais ca fait une bien belle illustration du propos du tenancier de ce blog.
      ah ben tiens tant que je suis là! et ca n'a aucun rapport avec le sujet ici présent, les martyrs chrétiens ne l'ont pas été pour autre chose que leur opposition à reconnaitre que les lois de l'empire s'imposait à eux en premier vs leur foi. Encore une boucle de l'histoire assez étonnante, non? en gros, croyez en ce que vous voulez et on vous foutra la paix sous condition que vous respectiez les règles de l'état...étonnant aussi, non?

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    3. Dis pas ça à un facho, ça le laisse de marbre.

      Et, pour mémoire, c'est depuis qu'on a donné la citoyenneté à des barbares comme eux que la démocratie est devenue aussi chiante à vivre.

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    4. « la démocratie ce n'est pas génial mais on n'a rien trouvé de mieux. »

      Mais si : la monarchie absolue, tempérée par le régicide.

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    5. Didier, me dites pas que vous êtes pour le "printemps arabe"!

      (je demande ici et solennellement à tous les réacs qui lisent ce blog de faire preuve d'un minimum de discipline)

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    6. Refusé. Pas de discipline. Sauf que je vire Skandal systématiquement.

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    7. Blogueur est maître chez lui.

      A celui qui ne saurait pas que tu as fait pipi autour du lit, j'offre un café.

      (un jus de chaussette, pour aiguiser son odorat)



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  4. Maintenant va falloir que tu t'expliques avec tous ceux qui ne sont pas cités dans ce billet et qui pourraient avoir un soupçon de capacité à faire voter pour untel ou untel

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  5. Il faudrait savoir, c'est un peu dur de vous suivre. Il y a un mois (ou 6 semaines), vous demandiez à Bernard Chappellier de NE PAS se présenter. Maintenant vous êtes prêt à faire campagne pour lui...

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    1. Je ne lui ai pas réellement demandé, je crois, mais peu importe. J'ai surtout regretté que les autres ne s'allient pas. Et j'ai dit que ne voterai pas pour Bernard.

      Et j'ai changé d'avis. Entre trois maux, je prendre le moins pire.

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  6. Il y a longtemps que je ne cotise plus au MRC : je refuse d'être membre d'un parti politique qui a nommé un type comme moi à son Secrétariat National .

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