16 avril 2022

La montée de l'extrême droite

 

Les gars de la marine

Figure-toi que nous avons subi un gros choc pétrolier il y a une cinquantaine d’années qui a provoqué le début d’une crise économique qui n’a pas vraiment cessé depuis, avec notamment un chômage de masse, cette crise n’étant évidemment pas de la totale responsabilité des enturbannés qui produisent notre carburant fétiche. Sept ans plus tard, la droite qui gouvernait depuis le dernier changement de Constitution était renversée par la gauche et, deux ans après, l’extrême droite a commencé à faire de jolis scores puis à atteindre une quatorzaine de points lors d’une élection à caractère nationale, en l’occurrence, les européennes, comme si nous avions été aveuglés par le borgne.

Depuis, les opposants à la Mitterrandie heureuse ont dit que c’était le vieux qui avait fait monter l’extrême droite pour saborder notre belle droite la plus bête du monde, comme si elle avait besoin de ça. En fait, tout le monde a cru expliquer la montée du Front National à sa manière comme ce commentateur d’un de mes derniers billets qui explique que si Le Pen est à plus de vingt points et à quasi-égalité au second tour, c’est de la faute de Macron, comme s’il exonérait tous les partis de gauche de toutes responsabilités alors qu’ils n’ont pas su parler au peu, ni même d’ailleurs que cette droite traditionnelle issue de la bête immonde ci-dessus et ne confondez pas tout.

Parallèlement, dans ces années qui ont vu la première phase de l’explosion du Front National, des associations se sont montées contre le racisme comme SOS éponyme et le peuple de gauche a pris l’habitude de manifester contre le racisme, justement, contre la xénophobie et contre la haine. Les habitudes, en quarante ans, n’ont pas changé vu qu’il y avait hier un tas de manifestations dans toute la France. Je vous passe à moitié les conneries de Facebook et le nombre de militants qui expliquent depuis des années que le « N » de « FN » puis de « RN » signifie « haine » et ils ont l’impression d’être particulièrement utiles. En cette période électorale, les militants quinquennaux et néanmoins gauchistes rappellent au monde entier le danger que représente Le Pen et nous explique qu’il faut mettre Le Pen à la porte (il fallait que je la sorte).

Parallèlement, nous avons des castors joviaux, comme moi, qui expliquent à leurs potes, mais seulement à eux, sans faire de slogans nationaux que bon attention les gars on a quand même un grand danger et il faut lutter contre.

Ces explications de la montée du parti qui nous rappelle les heures les plus sombres de notre histoire (je récite) et ces luttes contre sont évidemment parfaitement ridicules mais si elles sont sans doute saines.

 

Douche glacée

Evidemment, chacun a le droit d’avoir ses propres opinions sur la montée des formations d’extrême droite. Pour ma part, j’aurais tendance à dire que les gens sont lassés de voir des échecs continus de politiciens qui baignent dans le système depuis des années, l’impossibilité d’avoir des rendez-vous chez des spécialistes, des services publics incompréhensibles et peu efficaces, le chômage qui continue à vivre sa vie, l’école où l’on vise 80% des jeunes avec le bac avec pour conséquence une augmentation mathématique de l’échec scolaire et j’en passe. Ils veulent tenter autre chose ou, au moins, marquer leur mécontentement. Il y a évidemment des raisons que l’on cherche à minimiser, à gauche, où on ne parlera plus d’insécurité mais de sentiment d’insécurité juste pour le plaisir d’expliquer aux couillons qu’ils ne font que croire qu’ils sont physiquement en danger… Et bien sûr, nous allons gloser sur le racisme par des pauvres types qui n’ont jamais vu un étranger dans leur village comme si nous étions allés voir ce qui s’y passe pour voir si, par mégarde, il n’y avait pas un ou deux basanés qui feraient croire aux autochtones qu’ils ne sont plus chez eux d’autant qu’on s’en fout vu que nous sommes amour et tolérance et devons défendre les opprimés outre marins.

Je ne vais néanmoins pas insister. Il y a des gens brillants qui ont parlé de l’insécurité culturelle, de la France périphérique et il faut bien reconnaître que la conclusion est que la classe politique a oublié de s’occuper d’eux, tant, par exemple, elle s’est concentrée sur la politique de la ville en ne pensant qu’aux banlieues et à la construction de lignes de bus pour rapprocher les délinquants des piscines et autres bibliothèques.

 

Famille heureuse dans les corons

Le dernier sujet que je voudrais aborder est la responsabilité directe des insoumis, pas par méchanceté mais parce que c’est eux que l’on voit souvent, dans les réseaux sociaux, accuser les autres de la montée du RN.

Tout d’abord, je vous invite à observer toutes les publications relatives à la sociologie des électeurs de Le Pen. Certes, il y a beaucoup de jeunes mais on ne sait pas d’où ils viennent et si les parents ne sont pas un tantinet fortunés, les mômes votant gauchissssse car ils sont des rebelles. On sait, par contre, que les employés et ouvriers votent majoritairement très à droite et que Mélenchon a été en tête des votes dans une seule région : celle qui est la plus riche de France. Même si cela fait mal, on pourrait en déduire assez facilement que le vote insoumis n’est pas du tout un vote populaire. Vous pouvez bien sûr en penser ce que vous voulez mais vous auriez tort d’éluder le fait que je puisse avoir un peu raison.

En fait, dans les gens qui élaborent les programmes, on a des types qui disent qu’il faut augmenter le SMIC, les minimums divers, donner des allocations aux jeunes mais il est fort probable que les destinataires n’aient pas la reconnaissance du venter et préfèrent voter ailleurs, laissant le vote insoumis aux bobos parisiens qui pensent avoir la solution pour faire le bien. Tout est là, pourtant, dans le programme mélenchonesque pour montrer que l’on fait tout pour qu’ils s’en sortent, qu’on leur aménage l’accès aux soins, l’accueil des vieux, les services publics, les transports et tout un tas de trucs mais la mayonnaise ne prend pas sans doute parce qu’ils n’y croient pas, n’écoutent pas, ne lisent pas, et vont directement à la candidate antisystème plutôt que de voter pour un type qui fut ministre dans un gouvernement passé, d’une époque où tout allait relativement bien mais qui a fini en eau de boudin, justement avec la deuxième phase de l’explosion du FN.

Responsable comme les autres.

Joyeux militants


Mais, en plus, il tient un programme « patriotique » presque nationaliste, défendent la souveraineté, légitimant ainsi toutes les thèses passées du FN alors que Le Pen a tout fait, cette fois, pour poursuivre sa dédiabolisation. Pendant ce temps, Mélenchon a expliqué à longueur de discours que si les partenaires européens n’étaient pas d’accord avec les traités, on pourrait s’asseoir dessus.

C’est une faute politique majeure, non pas que ses propositions ne sont pas efficaces, je n’en sais rien même si je n’y crois pas, mais elles reprennent des solutions du camp d’en face alors qu’une gauche devrait être internationaliste.

 

Enfin, il y a tous ces vieux politiciens qui pensent avoir de l’expérience mais qui ne sont que des théoriciens et qui se disent que Le Pen n’a aucune chance de passer et qui ne peuvent pas comprendre que les gens votent pour elle parce qu’ils sont, eux-mêmes, totalement échoué. Alors je passe les militants des réseaux sociaux, plein de bonne volonté, ne pouvant que constater que leurs candidats se sont vautrés sans comprendre les raisons. Et ils se disent : « on a failli battre Le Pen », il aurait fallu l’unité, les autres auraient du se désister derrière celui qui allait arriver en tête qui lui-même aurait du faire un effort de rapprochement…

Mais on s’en fout. Marine Le Pen aura près de 50% face à Emmanuel Macron. Elle est aux portes du pouvoir.

Et on va continuer à manifester contre son incompétence, son racisme… Voire ses dents jaunes mais ce n’est pas elle.

4 commentaires:

  1. Une remarque : faut que tu y rajoutes une vision territoriale. Les pauvres du 93, des DOM ou du Sud-Ouest ont voté Mélenchon, celles et ceux du Nord, de l'Est et du Sud-Est Le Pen. Les classes moyennes se partagent aussi beaucoup.

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    1. Ce sont peut-être les coins où il y a vraiment beaucoup de "bronzés" (désolé de parler ainsi, mais je peux pas parler des immigrés dans les DOM...) et pas nécessairement une question de CSP.

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  2. Le corollaire de la montée de l'extrême droite est la montée de l'immigration, c'est aussi simple que ça.
    Les préoccupations de pouvoir d'achat, quoi qu'on en dise, sont secondaires. Tant que les partis dits de "gouvernement" ne prendront pas ce problème à bras le corps, le vote contestataire continuera de bouillonner.

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    1. Je le dis dans mon billet mais aussi que ce n'est pas la seule raison.

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