06 mars 2024

Capillaire hilare


 

J’apprends par un confrère que nos députés vont étudier une proposition de loi visant à lutter contre la discrimination capillaire. Je croyais qu’il était saoul et j’ai vérifié : il avait raison. Je me suis imaginé un complot des chauves ou un truc comme ça mais même pas. « Initié par le député guadeloupéen Olivier Serva, membre du groupe indépendant Liot, ce texte a été inscrit mardi à l'ordre du jour de la semaine du 25 mars au Palais-Bourbon. Inspirée par les Etats-Unis, la proposition de loi veut ajouter à la liste des discriminations passibles de sanctions pénales celles relatives à "la coupe, la couleur, la longueur ou la texture des cheveux". » Il faut « empêcher des employeurs de contraindre leurs salariés à se défriser les cheveux ou à dissimuler leurs coupes afro. »

Cela nécessite bien un billet de blog, non ? Et je vous promets qu’on ne parlera pas des modalités de règlement du coiffeur, en espèces, par carte ou par virement…

 



Tout d’abord, rappelons que nous avons élu ces gens-là pour nous représenter, pour voter des lois qui devraient être bonnes pour nous, nous sortir de la misère à défaut de nous assurer l’opulence et j’en passe. N’oublions pas, non plus, qu’ils reçoivent de confortables indemnités prélevées sur nos impôts. Cela me rappelle une autre histoire. Notre bon ministre de l’agriculture a annoncé la création un observatoire de la haie. Je sais que je passe de la tondeuse au taille-haie mais je vous rassure : les membres de l’observatoire sont aussi payés par nos impôts. J’imagine ces joviales andouilles débarquer dans mon jardin pour étudier si mon passage de cisaille est conforme aux normes…

Avec tous ces efforts, on n’arrive pas à imaginer ce qu’on pourrait faire de plus pour que nos concitoyens se désintéressent encore plus de la politique. Je ne nie pas l’importance des haies. Il faut bien sensibiliser les jardiniers au fait de ne pas les tailler en période de nidification ou que sais-je ? Néanmoins, il me semble qu’un obscur fonctionnaire rédigeant trois missives par an pour son chef de service qui pourrait glisser un post it sur le bureau du ministre suffirait largement à traiter le sujet, d’autant qu’il aurait sans doute des représentants départementaux pour l’assister sans compter la nécessité de répondre aux élus impliqués dans des conflits à base de troènes mal épilés…

Sans compter que le sujet est traité à un niveau supérieur par la cour pénale internationale de la haie. Enfin ! On sait à quoi servent nos impôts.

Bon ! Sortons de nos campagnes et revenons à nos barbiers de ces villes qu’elle entoure.

 


Evidemment, je ne connais rien à ces discriminations capillaires même si ma touffe fait parfois l’objet de moqueries stupides. Depuis la mort de ma mère, en revanche, je reçois beaucoup moins de critiques au sujet de mes bouclettes qui étaient blondes avant de sombrer dans une blancheur monotone mais de saison.

On me dira donc, comme pour toutes les histoires de racisme et de machin en phobie, que je m’occupe d’une oppression que je ne connais pas mais dont sont victimes des vraies gens. Pour un peu, on dira que je suis un gars de Coquerelle que de M. Ciotti.

Pour autant, je suis assez bon pour trouver des actions ridicules de la part de nos politiciens.

 


Il convient de traiter le sujet avec sérieux. Je n’ai jamais connu quelqu’un obligé de se décrépir et les rares femmes noires que j’ai vu avec les cheveux lissés, l’ont fait pour » être belles en ressemblant à des blanches ». Tu parles d’une lutte contre le racisme ! Mes potes avec des dreadlocks n’ont jamais eu le moindre problème pour trouver un boulot à part que les recruteurs ont une fâcheuse tendance à penser que ces zozos ont une certaine tendance pour fumer des produits illégaux.

A se stade, je me demande si « décrêper » ne serait plus adapté que « décrépir » mais il faut bien rigoler a posteriori avec ses fautes de frappe. Pourtant, en tant que Breton, je devrais m’intéresser plus aux crêpes mais si la capilliculture ne vaut pas un coup de cidre.

Il faut être sérieux, disais-je. Personne ne sera scandalisé si le patron de CNEWS demande à la jeune femme noire de se lisser les cheveux avant de présenter la météo : ceci n’est pas une preuve de racisme de cette chaîne dont j’ignore d’ailleurs si elle a des présentatrices. Ou alors des pros.

Personne ne sera scandalisé, non plus, si un employeur demande un lascar bossant dans la restauration ou avec des machines outil de masquer ses dreads, par hygiène ou par sécurité…

 


Je suis évidemment un grand pourfendeur des discriminations, notamment à cause de ma surcharge pondérale qui m’interdit de mettre des chemises que je pourrais décorer avec des cravates à chier, mais je ne vois pas comment on pourrait démontrer qu’un recruteur a pris une décision en fonction de tel ou tel critère comme la coiffure des candidats qu’il a reçu. Le sujet est important, certes, mais il n’impose pas de pisser dans un violon en peignant la girafe.

Il est important mais comme notre comité de rédaction a choisi de le traiter avec légèreté, nous serions bien avisés de creuser un peu.

Si les discriminations de toutes sortes sont bien évidemment scandaleuses, pourrait-on être scandalisé par un patron chauve qui refuserait « au fond de lui-même » d’embaucher un type avec les cheveux longs lui rappelant ainsi en permanence qu’il n’est pas le plus beau de la bande ?

D’une manière générale, peut-on être scandalisé par un employeur qui recrute quelqu’un comme lui, qui lui ressemble, même s’il y a peut-être un fond de racisme ? Et toi, là, lecteur, quelles sont tes pratiques de recrutement ? Si tu embauches prioritairement des personnes issues de l’immigration n’est-ce pas pour souligner qu’elles ne sont pas comme nous ? Tu es donc bien plus raciste que notre capillo-exigeant.

Et c’est mal.

4 commentaires:

  1. Il y a tout de même une chose qui m'étonne : comment tous ces gens - je parle des élus — font-ils pour examiner des "propositions" aussi stupidement ridicules sans éclater de rire au bout de vingt secondes ?

    Et ont-ils vraiment abdiqué toute fierté, tout amour propre, pour accepter de s'enfoncer sans protester dans une telle gadoue d'insignifiance ?

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    1. J’allais répondre que je ne sais pas. En fait, ils sont terrorisés à l’issue des insultes qu’ils pourraient recevoir. Là on a un député de Guadeloupe qui défend les coiffures rasta. Le député qui lui dit « fais pas chier » se fera traiter de raciste. Ils sont tous devenus fous.

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    2. Non, et c'est ça le plus triste : ils ne sont MÊME PAS fous.

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