28 août 2006

L'art de noyer le poisson dans une usine à GAZ

Jeudi dernier, j’ai entendu Jean François Copé indiquer à la radio (France Inter, je crois) que le premier ministre allait annoncer prochainement la mise en place des chèques transports et j’ai lu, ce matin, une dépêche Reuters indiquant que FO insistait également sur ce chèque transport.

Mon présent billet est "apolitique" dans la mesure où la critique ne s'adresse pas directement au gouvernement mais un peu à tout le monde.

Cette histoire de chèque transport, par exemple : on a en France et dans le monde une crise abominable de l’énergie (augmentation du coût du pétrole, diminution des stocks, sensibilisation croissante aux dommages de l’effet de serre, …) et on est sur le point de créer une nouvelle usine à gaz pour permettre à certains de bénéficier d’exonérations de charges et d’impôts…

Je reviendrai sur ces des derniers points par la suite, pas admettez que pour s’attaquer au problème du coût de transport « domicile – travail », ça fait un peu léger.

Je ne propose rien, certes, d’ailleurs tout ça est très complexe, puisque passe par l’aménagement du territoire, le renforcement des transports collectifs, le développement d’énergies renouvelables, l’organisation du travail et de l’entreprise, …

C’est comme cette histoire de prime de 300 euros accordés aux étudiants en début d’année annoncée récemment. Ca équivaut un peu à pisser dans un violon. Les étudiants seront probablement ravis de la toucher, mais le vrai problème est bien le coût de l’immobilier à Paris… Devoir payer 500 euros par mois pour une chambre de bonne n’encourage pas vraiment les études…

Encore une fois, je ne propose pas de solution. Si claquer dans les doigts suffisait à faire baisser le prix de l’immobilier, ça se saurait… Mais s’il n’y a pas assez de logements pour les étudiants en France, peut-être faut-il en construire ?

On pourrait poursuivre les exemples, mais c'est assez pour la première partie du billet : arrêtons de créer des mesurettes pour occulter les vrais problèmes.

Revenons maintenant sur ce chèque transport. Les modalités ne sont pas encore connues donc il est impossible d'entrer dans le détail.

Il pourra être très utile aux citoyens utilisant leur voiture pour aller au boulot, mais ces modalités risquent d’être compliquées à mettre en œuvre. Par exemple, comment s’assurer que cette mesure n’encourage par les usagers à prendre leur propre voiture au lieu des transports en commun ? Et comment faire pour que les usagers des transports en commun ne se sentent pas lésés par cette mesure ? Comment vérifier que le montant versé au salarié corresponde effectivement à sa consommation réelle ?

En outre, la finalité est globalement de payer l’essence et donc de contribuer au résultat des compagnies pétrolières. Je n’ai aucune idée du coût de la mesure, par contre, je crois savoir que le bénéfice de Total était entre 10 et 15 milliards d’euros en 2005 ! Faut-il encore que des allègements de charges et donc le déficit de l’état alimentent le résultat des pétroliers ?

De même, la mesure permettra finalement aux entreprises d’allouer un complément de revenus aux salariés en les déduisant des charges et donc des différents prélèvements.

L’idée du chèque transport est certainement louable, mais à qui profite le crime ? Je ne dis pas ça méchamment, mais pour rappeler qu’on va mettre en place un truc compliqué pour contourner une crise énergétique mais qu’on se demande bien à quoi ça va servir !

Dans le début du billet, je parlais d’usine à gaz.

Je vais prendre l’exemple des tickets restaurants (ou chèques déjeuner, ou autres, …). Je ne critique pas le fait qu’une partie des repas soient à la charge de l’entreprise et défiscalisée pour l’employé. Lors de leur mise en place (et tout le monde n’y a pas encore le droit), c’était probablement une très grande avancée sociale pour tous les salariés qui ne pouvaient pas profiter d’un restaurant d’entreprise ou de tout autre moyen de s’alimenter sur le lieu de travail ou sur note de frais, prime de panier, ...

Cher lecteur, je suis désolé, je vais, comme à ma grande habitude, être un peu long, mais démonter une usine à gaz en trois lignes dépasse mes capacités !

Je touche des tickets restaurants à 7,4 euros, dont 4,4 (à peu près), payés par l’employeur et 3 à ma charge. L’employeur me retire donc 3 euros de salaire (net et imposable) par jour, soit environ 60 euros par mois. Déjà, je n’ai jamais compris quel esprit tordu a mis en place un système (on me retire 60 euros de mon virement mensuel pour me les reverser par un autre moyen) !

Ensuite, l’employeur me verse 4,4 euros par mois non imposables et exonérés de charges soit à peu près 1000 euros par an. J’ai toujours été curieux de savoir combien ça lui coûte en tout !

D’une part, les tickets restaurants sont gérés par des entreprises indépendantes qui doivent bien avoir des frais de fonctionnement, une marge, … D’autre part, le service du personnel doit gérer la mise à disposition de un ticket restaurant par jour de travail (ce qui se traduit par un rattrapage en août et en septembre). Enfin, je suppose qu’il doit également avancer de la trésorerie. Sans compter ce que ça coûte au commerçant, qui d’une part doit gérer des billets de 7,4 € (j’ai un copain qui en a de 6,41 € !) et d’autre part doit aussi avancer la trésorerie et payer des commissions !

Ca ne serait pas plus simple de rajouter une ligne sur les fiches de paie, type « panier repas », non imposable et exonérée de charges ? Le tout géré entièrement par l’informatique, sans avoir à manipuler ces horribles papiers ?

D’autant que je travaille généralement dans les locaux de clients. Je déjeune dans leur cantine où je paie le prix fort (il n’y a pas de « part employeur » puisque ce n’est pas mon employeur). Il est donc justifié que je touche une « aide »… Mais ces cantines n’acceptent pas les tickets restaurants… et je suis obligé de dépenser mes tickets autrement qu’en mangeant le midi !

Enfin, travaillant chez des clients et pas au siège de ma société, je reçois tes tickets restaurants avec mon bulletin de salaire, par la poste… où les tickets sont régulièrement volés !


Alors pour le chèque transport, merci de ne pas faire une usine à gaz au prétexte que l’essence est trop chère !
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Un truc qui n’a rien à voir à propos de J.F. Copé que je cite là-haut.

Une dépêche AFP d’hier soir nous indique que : « La totalité des surplus fiscaux attendus cette année sera affectée au désendettement de la France, a annoncé dimanche le ministre délégué au Budget, Jean-François Copé, au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro. »

J’ai envie de refaire un retour arrière, en 2000, ce qui n’est pas inutile à l’heure où il est de bon ton de défendre Jospin dans les blogs !

En 2000, il y avait également des surplus fiscaux que la majorité d’alors voulait affecter à la réduction du déficit et de la dette. D’ailleurs, pour la première fois depuis plus 20 ou 25 ans, le budget de l’état avait failli être excédentaire.

Ses surplus fiscaux et ces pratiques avaient été dénoncés par l’opposition de l’époque, qui accusait le gouvernement de cacher une cagnotte. C’est d’ailleurs JC qui avait commencé la bataille sur ce thème à l’occasion de son discours du 14 juillet.

Si les militants du PS pouvaient parfois rappeler quelques vérités plutôt que de s’étriper entre eux…

10 commentaires:

  1. "Jeudi dernier, j’ai entendu Jean François Copé indiquer à la radio (France Inter, je crois) que le premier ministre allait annoncer prochainement la mise en place des chèques transports et j’ai lu, ce matin, une dépêche Reuters indiquant que FO insistait également sur ce chèque transport.
    "
    Moi, c'est mieux, je l'ai vu à la télé ce matin. Son discours était très cohérent, je n'ai pas entendu la moindre connerie. Faut dire que je n'avais pas mis le son. Il est bien bronzé. Ca fait plaisir.

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  2. "Ca équivaut un peu à pisser dans un violon. Les étudiants seront probablement ravis de la toucher,"

    Faut vraiment commenter ? Oui ?
    Si ils bveulent vraiment se la toucher, il n'ont pas besoin de violon, ils peuvent aussi pisser dans une batterie. Faut juste qu'ils évitent les guitares électriques. C'est très agréable sur le moment, mais on ne le refait pas de son vivant.

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  3. C'est bien un ministre télégénique.

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  4. Je ne saurais pas analyser le problème dans le détail, comme tu l'as fait. Mais j'ai bien l'impression qu'une fois encore, le chèque transport est une solution typique d'énarque. Une usine à gaz, comme tu le dis.

    Ca rappelle le chèque restaurant mais aussi le chèque emploi service (échec monumental), remplacé l'an dernier par le chèque TPE (le résultat? on s'en doute...).

    Je ne suis pas contre cette mesure... mais j'aimerais comprendre où est l'arnaque...

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  5. Eric,

    "Je ne saurais pas analyser le problème dans le détail, comme tu l'as fait"

    Ce n'est pas vraiment une anayse dans le détail, d'autant que la mesure n'a pas encore été annoncée, mais un peu comme tu le dis, ça me fatigue de voir des usines à gaz qui sont des mesurettes ridicules fasse à l'ampleur des problèmes à régler.

    P.S. : Passe faire un tour sur jegoun.blogspot.com ce soir ! Pour voir le commentaire que tu as évité de recevoir sur ton blog ! (suite aux "brèves de comptoir").

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  6. Pour ceux qui attendent le résultat de mon P.S., désolé... y'a un bug chez blogspot... Trois heures que je suis dessus.

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  7. L'informatique, c'est parfois coton. Aujourd'hui, problème avec ma connexion. Obligé d'aller dans un cyber café. Celui des Halles, en face du KFC... Là où Youssouf Fofana envoyait ses messages à ce qu'il paraît...

    Quant à Jospin, ça s'est un peu tassé l'info le concernant. L'émotion est retombée.

    Le chèque transport, franchement, c'est pas qu'on s'en fout, mais...

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  8. Sur le chèque-transport j'ai écris un ce billet qui tente une proposition alternative, c'est ici : http://www.ps-gentilly.org/article-3612802.html

    A mon avis ce type de mesures taxation/subvention, si bien pensées, sont très importantes pour limiter notre adiction au pétrole.
    c'est plus par là que ça passe que par faire les poches de Total (à noter qu'en 2005 malgré la hausse du prix du pétrole ses profits n'ont pas augmenté. source : Alternative Eco).

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  9. Il ne s'agit pas de faire les poches de Total.

    Mais de ne pas les remplir par une nouvelle aide publique qui ne résoudra pas les problèmes.

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