04 octobre 2006

Pas de crise dans l'immédiat !

Mon blog se spécialisant dans l’économie, je vous propose maintenant de passer à la pratique par un exercice commode, ce que ne pourrait pas démentir Marie-Georges Buffet qui sait très bien que commode est un synonyme de pratique mais qu’on ne peut pas mettre trop souvent le même mot dans une seule phrase.

Le matin, j’ai une tradition. Le temps que le café coule je consulte les informations sur actu.voila.fr n’en déplaise à certains. Ce matin, c’est plus fort que moi, je relève les passages majeurs afin d’en faire un billet que je peaufinerai en arrivant au boulot s’il a besoin de l’être.

Je dis les titres majeurs, c’est une façon de parler. La situation en Corée du Nord et en Iran aurait pu me préoccuper d’avantage, mais je ne suis pas d’humeur à évoquer la fin du monde qui ne saurait tarder avec tous ces gugusses qui développent leurs arsenaux nucléaires.

Il y a un autre truc que j’aurais pu relever : un gugusse a détourné un Boeing turc parce qu’il voulait parler au pape. On croit rêver. Déjà, parler au pape : on croit rêver. Mais détourner un avion pour ça, ça paraît compliqué ! A moins qu’aucun vol direct entre Istanbul et Rome ne soit programmé ce jour là. Moi à sa place, j’aurais fait une bonne vieille prière : autant s’adresser directement au patron.

Il y a un autre titre relevable : une opération de police aux Mureaux. Mais je ne vais pas commencer à relever chacune des opérations de police jusqu’à mai prochain, ça fera trop de boulot.

Vite ! Les pages « économie ».

Premier article : La Bourse de New York a battu mardi son record historique atteint il y a six ans et demi, profitant d'une nouvelle baisse des cours du pétrole, qui laisse entrevoir de plus gros bénéfices pour les entreprises et atténue les craintes d'inflation.

Deuxième article : Le calendrier de livraisons de l'avion géant A380 d'Airbus va subir un troisième retard "en moyenne d'un an", soit un décalage du programme de près de deux ans comparé au plan initial, poussant l'avionneur à lancer un vaste programme d'économies et de réorganisation industrielle.

Troisième article : Les députés ont adopté mardi, lors d'un vote solennel à l'Assemblée nationale, le très sensible projet de loi sur l'énergie qui privatise GDF afin de permettre sa fusion avec Suez.

Quatrième article : Le gouvernement s'attend à une forte augmentation des dividendes touchés par l'Etat actionnaire et à des recettes fiscales en hausse, notamment au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en 2007, selon les "bleus budgétaires" communiqués à l'Assemblée nationale.

Cinquième article : Les prix du pétrole ont reculé sous les 59 dollars mardi, sur un marché peu soucieux du regain de violence au Nigeria, et rassuré au contraire par l'ampleur des stocks mondiaux et la possibilité d'une issue à la crise avec l'Iran sur le nucléaire.

Nous allons donc maintenant pouvoir passer à l’exercice pratique annoncé un peu là-haut si vous vous rappelez…

Première question : Quels enseignements pouvons-nous tirer de ces quelques informations (toutes vérifiables) et comment pouvons-nous lier ces trucs entre eux ?

Deuxième question : Peut-on rire de tout ça ?

A vos stylos…


Bon.

Je subodore que vous n’êtes qu’une bande de fainéants puisque vous être présentement en train de lire des bêtises sur les blogs pendant les heures de boulot, je vais apporter quelques éléments de réponse. Ca vous évitera de réfléchir et vous pourrez ainsi voter UMP en toute impunité.

Constatons d’abord que la bourse américaine va bien. Amis de gauche, c’est une bonne nouvelle, ça veut dire que l’économie américaine se redresse, ça devrait avoir de bonnes répercussions chez nous. Qu’importe si pour aller bien il a fallu licencier des dizaines de milliers de salariés improductifs ! Amis de droite, notez bien qu’une des raisons pour laquelle l’économie américaine va bien, c’est parce que le gouvernement américain utilise à fond la dette. En résumé, on s’endette sur le dos du contribuable et on licencie à fond pour permettre aux entreprises de faire un maximum de profits. Profits qui seront immédiatement utilisés pour racheter les fleurons de notre économie que nous privatisons de tout coeur.

Voilà la morale de l’économie.


Le quatrième article nous apprend que l’économie française va bien aussi puisque les entreprises rapportent beaucoup de dividendes à leur actionnaire, en l’occurrence l’état. Comme l’état c’est nous, je subodore qu’on va se mettre plein d’oseille dans les fouilles. J’aime bien.

Le troisième article nous informe que le gouvernement va pouvoir enfin privatiser GDF. C’est logique de vendre GDF maintenant puisque les entreprises gagnent plein d’argent ces temps-ci et rapportent des dividendes. Vous pouvez acheter des actions de Suez, après la fusion ça va rapporter un maximum de pognon.

Pognon qui n’entrera pas dans la poche de l’état mais dans celle des futurs actionnaires. Le gouvernement français est sûrement un excellent gestionnaire puisqu’il se débarrasse vite fait, à la sauvette, d’un truc qui est exceptionnellement rentable. Ca me rappelle quand j’ai commencé à boursicoter et que j’accumulais les bourdes.

Le deuxième article nous confirme que le gouvernement français est un excellent gestionnaire puisque c’est le principal actionnaire de ce bazar qu’on appelle EADS, maison mère d’Airbus, et qui en nomme les dirigeants. Nous allons assister ce matin à un effondrement du cours d’EADS en bourse (à moins que l’annonce des restructurations provoque une hausse du cours : les mécanismes boursiers sont parfois impénétrables). On vend GDF et se gargarise d’EADS. Bravo.

Le cinquième article, qui explique probablement ce qui est raconté dans le premier, est une excellente nouvelle. Le pétrole baisse. Ca va permettre à l’industrie aéronautique de prospérer. Surtout Boeing, si j’ai bien compris. EADS est à la ramasse et les vols de Boeing entre la Turquie et l’Italie sont à la mode.

Je vous laisse maintenant vous dépatouiller avec ça. J’espère que vous avez compris où je voulais en venir, parce que pas moi.

J'ai oublié de répondre à la deuxième question.

8 commentaires:

  1. Quel beau titre à ce billet ! Je ne sais pas ce qui me l'a inspiré...

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  2. Sans doute le dernier billet de feu Sarkoprout: "crasse dans l'immediat".

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  3. Pour information, le cours d'EADS chutait de 10,8% à l'ouverture et remonte un peu depuis.

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  4. Oui, ton analyse semble se tenir. Elle est anti-décliniste au possible. Et j'en concluerai que si l'économie va assez bien autant voter pour la gauche. Elle redistribuera un peu et ça ira mieux.

    Mais il y a quand même une limite à se limiter aux grands indicateurs, aux gros chiffres. Les chiffres des inégalités ont au moins autant de sens.

    Tu aimes l'économie: voilà un sujet en or. Laurent Guerby parle d'un long billet de Denis Robert sur Agoravox (DR, le spécialiste de clearstream):
    http://guerby.org/blog/index.php/2006/10/03/114-10-ans

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  5. Eric,

    "Les chiffres des inégalités ont au moins autant de sens."

    Mais les inégalités ne sont pas chiffrables !

    "Mais il y a quand même une limite à se limiter aux grands indicateurs, aux gros chiffres."

    Je suis tout à fait d'accord avec, mais ce sont les seules données que l'on puisse comparer entre les pays. Je les utilise donc dans ce sens.

    Par contre, ces comparaisons ont elles de vraies limites.

    Par exemple, on peut avoir un pays avec un faible taux de chômage, mais avec 10% de la population en situation précaire (embauches à la journée...) avec des salaires dérisoires. Donc peut-on comparer le taux de chômage dans ce pays et celui chez nous ?

    Non.

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  6. Mouaih ou comme les British où ils ont moins de chomeurs parce qu'ils ont inventé le "handicap social". C'est comme le RMI, mais sans l'illusion de l'Insertion…
    :-)

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  7. Si, justement, les inégalités ça se mesure. Cherche de la doc sur le sujet et tu trouveras (OCDE et compagnie...). En France, il y a moins d'inégalités qu'aux USA ou en GB.

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  8. Filaplomb, Eric,

    Chaque pays a ses indicateurs. Chaque problème se mesure indépendamment.

    Ce que je veux dire c'est qu'il n'y a aucun indicateur universel.

    On peut tirer tous les fils, on découvira qu'il fait bon vivre en France...

    Mais chacun, en sortant "son" indicateur trouvera le moyen de dire une bêtise.

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