04 août 2010

Gand de l'amer

Quand on est Français, on regarde toujours avec bonhomie la vie de vos frères Belges et on aurait presque tendance à sourire en voyant les bisbilles entre les Flamands et les Wallons. Pour ceux qui comme moi sont nuls en géographie, je vais résumer la situation… La Belgique est séparée par une ligne horizontale (parallèle à l’équateur, quoi !) à peu près en deux. Au nord, vous avez la Flandre, au Sud la Wallonie. Cette ligne est environ à la hauteur de Lille (un peu au nord).

Les Wallons parlent français. Les Flamands parlent néerlandais ou presque.

Bruxelles, la capitale, est une enclave francophone en territoire Flamand.

Voir la première carte, là en haut à droite. Je l’ai piquée ici.

Je savais par des copains bruxellois que la situation était très tendue entre Flamands et Wallons, notamment à proximité de Bruxelles.

Mais je ne vais pas faire un billet sur le sujet, en cherchant un peu, vous trouverez toute la documentation nécessaire sur le web.

Ceux qui lisent mes blogs le savent : j’ai passé trois jours en Belgique. C’est la quatrième fois de ma vie « adulte » que j’y vais, la troisième que je prends Bruxelles comme point d’ancrage pour naviguer ensuite. J’y retournerai.

Cette année, j’ai décidé d’aller une journée à Gand. On m’avait dit que c’est une très belle ville et je ne peux qu’acquiescer. Gand se trouve en  Flandre, au nord ouest de Bruxelles. Voir la deuxième carte, à gauche, là, piquée ici.

Contrairement à Bruxelles et à Bruges (où je vais souvent), on a l’impression de se retrouver à l’étranger alors que Gand est à 70 km de Roubaix. Il n’y a strictement aucune indication capable de satisfaire le touriste Français. Je me rappelle par exemple qu’à Bruges, il y avait des panneaux indiquant « Centruum » (de mémoire) qui permettaient de deviner assez facilement où était le centre historique de la ville. Ce n’est pas l’objet de mon billet, j’en avais déjà parlé la dernière fois, en 2007 : Bruxelles a le même problème, c’est un vrai bazar pour vous y retrouver (mais j'imagine un touriste perdu à Paris...).

De la gare, j’ai fait, à pied, les 2,5 km qui séparent la gare de ce que je croyais être le centre ville à l’observation d’un plan délavé, j’ai ensuite marché une heure dans la ville à admirer ce qu’il y avait à admirer puis j’ai commencé à avoir soif.

Alors je me suis arrêté à une terrasse, sur une grande place. La jeune serveuse, physiquement sympathique, s’approche de moi et me demande, dans sa langue, ce que je voulais : « Une bière » « Yes ! One beer ! » m’a-t-elle répondu. J’étais surpris. Bosser dans la restauration et ne pas parler « l’autre langue » du pays était surprenant. Après m’avoir servi, elle m’a sortir une phrase qui se terminait par « Euro ». J’ai compris qu’il fallait que je paye. Je lui ai demandé « Heu… Pardon, combien ? » « Two Euros ». Ah ! Bon.

Je bois ma bière et poursuis ma promenade en observant les cartes de restaurant en cherchant un coin agréable. Je ne voulais ni d’une gargote ni d’un grand resto, juste un truc où un touriste puisse manger, tout seul, pas trop cher, avec vue sur les passantes.

Partout les noms des plats étaient affichés en néerlandais, parfois en anglais, jamais en Français (sauf un resto qui ne me plaisait pas). Je voulais bouffer un truc local mais je tenais à savoir de quoi il s’agissait, histoire de ne pas se taper des harengs saurs alors que j’attendais un steak…

Rien.

Je passe par le syndicat d’initiative, dans l’espoir de trouver un plan (j’avais erré pendant deux heures et n’était pas sûr de retrouver la gare). Impossible de me faire comprendre en français par une petite dame, à un guichet.

A un moment, je vois une terrasse vide avec un serveur. Il y avait une carte et mais personne ne déjeunait alors qu’il était 13 heures. Je demande au serveur : « C’est possible de déjeuner ? » Il me regarde avec des grands yeux. L’air de ne pas comprendre. Je repose la question : « On peut manger ? ». Pas de réponse.

Je passe mon chemin.

J’avais à nouveau soif. Je m’assois dans une nouvelle terrasse et le cirque recommence avec un nouveau serveur, beaucoup plus âgé que ma serveuse. Au moment de payer, il me dit un truc qui résonnait « twee euro ». Pensant qu’il m’avait répondu en anglais, je lui tends trois euros. Il me rend une pièce d’un euro en haussant les épaules, l’air de haïr les étrangers, surtout les Français.

Il y avait un Mac Do, au bout de la place. La dernière fois que j’avais bouffé dans un de ces machins, c’était en 93, sur les champs. J’ai regardé le loufiat. Je lui ai dit « T’as vu mon cochon ? ». J’ai bu ma bière. J’ai bouffé au Mac Do.

Avec pour seule satisfaction ne pas avoir versé un centime à un restau du coin : chez Mac Do, ils n’avaient même pas de bière pression, juste de la Jupiler en boite. A la guerre comme à la guerre.

Alors je suis retourné vers la gare (vive le GPS de l’iPhone) en faisant un détour par les bords d’un canal.

Il n’y avait pas de train pour Bruxelles avant une vingtaine de minutes. J’en ai profiter pour faire le tour de la gare, fouillant partout. Pas une indication en Français.

Arrivé à la gare de Bruxelles, j’étais à nouveau dans la civilisation.

Je ne vais pas en tirer de conclusion. Ces braves gens peuvent être nationalistes s’ils le veulent mais je n’aime pas cette sensation de me retrouver au milieu d’un territoire hostile.

Et je n’aime pas qu’un patron de bistro ne tente pas de développer son commerce de tolérer des serveurs qui refusent de parler la langue d’une contrée à quelques kilomètres au sud.

31 commentaires:

  1. Au moins, on se sent à l'étranger, ça change. Mais la francophobie se rapproche aussi des frontières. J'étais allé manger dans un estaminet près de Bailleul, on sentait que l'on ne faisait pas partie de la "communauté". Mais ils ont quand même fait l'effort de causer en Français.

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  2. Tu ne stigmatises pas un peu comme on dit chez nous?

    Autrement j'ai apprécié cette chronique de voyage dans un pays exotique

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  3. No comment...

    m'enfin quand même hein ! Ces flamingands !!

    ...

    Enfin... no comment quoi...

    Sinon, tu reviens quand tu veux chou ! (et Tonnégrande aussi, c'est quand tu veux ! ;-))

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  4. Je peux comprendre qu'on veuille défendre sa culture, c'est même plutôt une belle idée. Mais le faire à coup de haine et de ne vouloir QUE sa propre culture, n'est ce pas...
    Il me semble idiot de la part de ces flamands-là (mais certains sont sympathiques) de se comporter ainsi. Ils finiront, une fois la Flandre devenue indépendante, par rester tout seuls entre eux !
    :-)

    (Au vu des négociation en cours, il serait étonnant que la Belgique survive en tant qu'Etat. :-) ).

    Sinon, il y a les wallons qui sont très bonhommes et très accueillants ! :-))

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  5. Clic (En plus je ne suis pas sur mon Mac ! ).
    :-)

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  6. Un conseil, pour la prochaine fois : essayez de glisser d'entrée de jeu que VOUS ÊTES FRANÇAIS. Car leur détestation (que je comprends parfaitement, mais c'est une autre question) va avant tout aux Wallons, pas spécialement aux Français dont ils n'ont, je crois, pas grand-chose à battre.

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  7. D"accord avec Mr Goux.

    Les français, les vlaams s'en foutent.

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  8. +1 avec M. Goux et Elmone, sur la base de ma propre expérience (qui date un peu, je l'admets): s'ils savent que vous êtes un touriste francophone non wallon, ils feront un effort linguistique.

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  9. C'est désagréable et compliqué tout ça… La prochaine fois essaie de te faire passer pour un touriste Suisse.

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  10. Avec mes parents on a fait un tour à Bruges et si je me trompes pas Anvers. C'était pareil, dès qu'on a dit qu'on était français on nous a répondu en français. Le plus étonnant c'est qu'à Bruxelles il y a obligation pour les postes à responsabilité de parler les deux langues.

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  11. Ton récit me parle particulièrement, parce qu'il n'y a qu'à Gand que j'ai ressenti cette hostilité anti-francophone, alors qu'à Bruges, j'étais accueillie les bras ouverts. Mais à Bruges, c'était plus manifeste que j'étais une touriste.

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  12. J'aurais pas imaginé que c'était à ce point-là.
    Evidemment, les deux langues, évidemment les nationalismes ambiants, le vlaams block, tout ça, mais cette sorte de guerre larvée...
    Chaleureuses vacances, je vois. Je sens que je vais me mettre à parler Breton, rien que pour faire chier les francophones de ma contrée.
    (en plus les touristes vont trouver ça sympa et exotique...)

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  13. Du nationalisme ou du racisme anti wallon, ce n'est donc pas grave temps que ça ne concerne pas les français. Bien, bien, je le note. C'est d'une logique qui m'échappe mais bon...

    (Pour info, les emplois à Bruxelles sont quasi tous obligatoirement bilingues, même sans responsabilité. Etonnant pour une ville à 85% francophone ! :-)) ).

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  14. Naon 'meus
    Sec'hed meus.
    Yech'ed mad.

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  15. Didier, Elmone, DF,

    D'une part, ça ne change rien au problème du nationalisme.

    D'autre part, je n'en suis pas sûr. Rien qu'à ma voix, ils peuvent reconnaitre que je ne suis pas du coin... En outre, j'ai fait l'essai avec une petite dame qui "faisait dans l'humanitaire" en taxant les gens à la gare, je lui ai dit : "Désolé, je suis français". Elle m'a regardé comme un chien.

    Homer,

    S'ils font l'effort...

    Nico,

    Merci. J'aime bien partir d'une journée comme ça pour arriver à une conclusion vaguement politique.

    Cigüe,

    Je reviens, je reviens, ... Mais je crois que si je prends une journée comme ça, j'irai voir plus loin, vers Anvers, si c'est pareil.

    Poireau,

    Oui, c'est ce que j'avais envie de leur "crier" : "vous finirez seul". D'ailleurs, j'ai supprimé la fin de mon billet où je parlais de l'Europe et tout ça : finalement, c'est leur problème. Mais bon...

    Le Coucou,

    Quand la Suisse sera à 1h30 de Paris...

    Hio,

    Vive Bruxelles !

    Clum,

    Oui, je connais bien Bruges. A Gand, il y a une atmosphère particulière. D'ailleurs, je parlais dans mon com, plus haut, d'aller faire un tour à Anvers, une autre fois, pour voir...

    MPHA,

    Si, c'est à ce point. Un climat affreux.

    Christine,

    Heu...

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  16. Eh bien, moi, je trouve que des gens qui collent une telle claque au sempiternel "vivrensemble" ont droit à un certain respect...

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  17. salut nicolas !je ne pensais pas non plus que la rivalité en était à ce point ! evidemment ils ont bien compris que tu es français, l'accent n'est pas le même je pense, alors pourquoi ?

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  18. Didier,

    Non.

    Scourti,

    Bêtise naturelle !

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  19. Didier : les fascistes aussi détestent le "vivre ensemble". Ca n'en fait pas des gens amusants et sympathiques ! :-)

    Scourti : ce que j'en comprends en tant qu'expatrié à Bruxelles est que depuis 1963 et l'obtention par les flamands de la frontière linguistique (la mère des problèmes d'aujourd'hui), on enseigne à tous les petits nenfants flamands combien la Flandre a toujours été un très grand pays dont la wallonie empêche le développement. Quelques faits d'Histoire habillement déformés et montés en épingle et d'autres faits d'Histoire passés sous silence construisent une sorte de Flandre idéale dont la Belgique serait le frein.
    Nous avons même à présent en Flandre et à l'intérieur de cette population, un mouvement qui consiste à qualifier de "bon" ou de "mauvais" flamand les personnes en fonction de leur degré d'adhésion aux thèses révisionnistes avancées par les partis du même bois.
    Tout cela sent très mauvais.
    :-)

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  20. "Quand la Suisse sera à 1h30 de Paris..."

    @Nicolas et Le Coucou:
    Pour le moment, c'est trois bonnes heures en train (Vallorbe-Paris, pour l'exemple). Il n'y a plus qu'à doper le TGV...

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  21. Monsieur Poireau : cela sent très mauvais en effet. J'ai bien sur lu ou vu des articles sur cette rivalité. Ce que je ne comprends pas c'est qu'ils ne font pas la différence entre français et wallons ; on ne leur rien fait nous et surtout pas nicolas !

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  22. si j'ai bien compris , les flamands sont plus nationalistes que les nationalistes quoi ! ils ne pourraient pas nous en prendre quelques uns des notres ça nous débarrasserait !

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  23. Oui, enfin, bon : je vous rappelle quand même que les Flamands ne nous ont rien demandé – les Wallons non plus, du reste. Donc, pourquoi ne pas les laisser régler leurs affaires entre eux ? Et qui sommes-nous, à la fin, pour juger constamment de ce qui est bien ou mal, bon ou mauvais pour nos voisins ? Et ça rime à quoi, de trépigner en criant "ça sent mauvais ! ça sent mauvais !", et de rameuter ce bon vieux fascisme, disparu de nos horizons depuis près de 70 ans mais toujours si pratique ?

    Et, au fond, pourquoi les Flamands n'auraient-ils pas le droit d'être indépendants, s'ils le souhaitent ? Après tout, la Belgique n'est pas un pays millénaire, n'est-ce pas ? Pas plus que ne l'étaient la Yougoslavie, l'URSS ou la Tchécoslovaquie. On connaît la suite.

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  24. Didier : tout à fait d'accord avec vous, les flamands décident eux-mêmes de leur indépendance, c'est la moindre des choses.
    Mais il existe par ailleurs une base de droit international qui, par exemple, permet en cas d'arrestation par la police en bord de route ou même de passage en justice de pouvoir le subir avec l'aide d'un traducteur. Ce n'est même pas du droitdelhommisme mais le minimum de la politesse. Quitte à se faire taper dessus qu'on en comprenne au moins la cause.
    La Flandre conchie d'ores et déjà ce droit des minorités ce qui m'amène à les qualifier de fascistes.
    On s'oriente vers une sorte d'épuration de tout ce qui est non-flamand ce qui inclue les "flamands déviants" qui n'auraient pas l'idée d'adhérer à ce joyeux programme.
    Maintenant, Didier vous pouvez aussi ne rien en penser, ça ne change rien à la face (la farce) du monde, évidemment !
    :-))

    [Un pouvoir central qui impose ce qui est de la culture nationale et ce qui ne l'est pas, c'est pourtant un sujet que vous maîtrisez et que vous dénoncez par ailleurs. On y est à plein, Didier ! :-)) ]

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  25. Didier,

    Ils font ce qu'ils veulent, ils nous ont rien demandé à part de payer mes consommations.

    Il n'empêche qu'entretenir un tel climat de haine me parait complètement con, comme tout nationalisme, d'ailleurs.

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  26. Bonsoir,
    Pour moi, Belge de naissance - bilingue français/Néerlandais - ce genre de situation fait encore plus mal. Car il y a la sensation d'injustice en plus. Nous ne sommes pas étrangers en Belgique, nous sommes Belges et la moitié du pays, nous enlève le droit d'être chez nous...C'est un peu comme si on nous chassait de notre propre maison! C'est très dur! Et, je dois dire que je respecte énormément les francophones, qui restent paisibles, parfois même sereins face à cette violence larvée, face à cette haine séculaire.

    Cela fait 40 ans que je vis ça, autant vous dire que j'aimerais qu'on se sépare, ne fût-ce que pour avoir la paix. Même s'il faut pour cela que nous devions reconstruire et vivre une période très difficile.
    A bientôt Ema

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  27. Autre délice d'antan... Se perdre en pays flamand, chercher Lille et ne trouver que De Rijsel, maintenant ça va mieux quand même ou je me suis habituée...
    C'est dommage d'avoir raté le waterzoï et autre potjevleesch.
    Mag

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  28. -> Nicolas -> Bah ! Un pays où la bière est à 2 euros ne peut pas être totalement hostile... A propos, pour une fois que je passais à la Comète, il a fallu que je te rate : on est donc obligé de prévenir ?
    -> Monsieur Poireau -> "les fascistes aussi détestent le "vivre ensemble"" : pourquoi "aussi" ? Tu aurais pu te contenter d'un "en effet".

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  29. Ema,

    Merci pour votre témoignage.

    "Malheureusement", la séparation ne changerait rien... L'heure est l'ouverture des frontières et en tant qu'Européen, ce que j'ai vécu me fait mal...

    Mag,

    Mais non, je n'ai rien loupé ! Je vais souvent en Belgique.

    Oh!91,

    A propos de bière, elle a drôlement augmenté, en Belgique, depuis mon dernier passage.

    Pour ce qui est de la Comète, il vaut mieux, effectivement, demander (un petit mail, maintenant que j'ai l'iPhone, je réponds généralement dans le quart d'heure).

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  30. Je reviens d'Angleterre. gens super-sympas! L' Angleterre si proche et ... pas un mot de français ... pourtant j'ai essayé ... en rue, dans les pubs, etc. Certains s'excusaient benoîtement ou en rigolant, un peu gênés, qu'ils ne parlaient pas un traitre mot de français. C'est fou, non?

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