29 janvier 2010

Un an après, l'odeur persiste

Quand je suis rentré dans le métro, à Bicêtre, ce matin, j’étais content, j’ai pu m’asseoir immédiatement sur un strapontin alors que, souvent, il faut que j’attende que la rame arrive à la Place d’Italie. Néanmoins, au bout de quelques secondes, j’ai commencé à me trouver oppressé sans savoir pourquoi. C’est à l’approche de la station suivante que j’ai compris. Un type s’est levé précipitamment en agitant sa main devant son nez, l’air franchement écœuré.

C’était simple. Ca puait. Abominablement. Si fort que je ne pouvais y croire. Pendant une ou deux minutes, je me demandais si je n’avais pas un problème cardiaque, excluant de le mettre sur le dos d’une soirée arrosée, la veille, elle avait été calme. Avant que je ne comprenne que l’odeur était très forte, je me demandais si je n’allais pas devoir faire demi-tour à Maison Blanche et foncer chez le toubib.

Sur le strapontin en face de moi, gisait un clochard dégueulasse, le pantalon blanc couvert de trainées marron. Quand j’ai compris, l’odeur est devenue prenante mais, comme un con, j’ai immédiatement pensé à mon blog bistro, je voulais prendre une photo. Je voulais donc résister pour prendre une photo à un moment propice mais je n’ai pas tenu. J’ai foncé à l’autre bout du wagon où un autre strapontin m’attendait patiemment.

Je n’écris pas ce billet pour faire dans le gore, mon cadavre d’hier suffira pour la semaine. Juste pour parler de la connerie humaine, la mienne en premier.

L’odeur était infernale, même à l’autre bout. J’observais mes voisins. Chaque place assise était occupée mais personne n’attendait debout. J’ai regardé les wagons voisins, ils n’étaient pas surchargés. Mes covoituriers étaient amusants à regarder. On les voyait respirer par la bouche, jeter des yeux au ciel pour montrer qu’ils espéraient que le clochard sorte, agitaient des mains, des journaux gratuits, des écharpes, … devant leur nez pour que l’odeur fasse le tour…

Arrivé à Palais-Royal, ca a été un vrai bonheur de pouvoir quitter cette pestilence, retrouver un air normal avec juste l’odeur de l’urine des clodos, la transpiration des andouilles et les parfums pourris des pouffes matinales.

Je me pose une question bête : pourquoi personne n’est sorti du wagon pour rentrer dans un autre ou attendre la rame suivante. Les gens – moi compris – sont-ils résignés à ce point ?

C’est arrivé au bureau que je me rends compte que ça fera un an, dimanche, que je fais ce trajet tous les jours. Quelques minutes de marche, 20 minutes de ligne 7, trois minutes de changement, 20 minutes de ligne 1, 10 minutes de marche. Pile poil une heure. 52 minutes quand je marche vite et que je n’ai pas à attendre les rames.

A l’époque, ça m’avait fait un choc. Pendant cinq ans, j’avais eu la chance de bosser à dix minutes de chez moi. J’avais donc eu l’occasion d’oublier le quotidien d’un Parisien. Des vagues soucis personnels en plus (changement de patrons de bistro, changement de boulot, …), ça m’avait épuisé. J’en avais fait un billet pour décrire l’horreur de ce quotidien.

Depuis, je me suis habitué, j’ai trouvé mon rythme. Je pars un peu plus tôt ce qui augmente la probabilité de voyager confortablement (et me laisse du temps de blogage avant de commencer le taf). J’en parle souvent avec des collègues qui me demandent comment je fais pour arriver si tôt.

Métro, boulot, métro, bistro, dodo. C’était le titre de mon billet.

On s’habitue. Ca devient une rengaine. Heureusement qu’un clochard merdeux vient parfois nous distraire. Mais comment peut-on être assez cons pour ne pas changer de voiture ?


22 commentaires:

  1. Tu changes de manière décrire, c'est très sympa. En tout cas dans ce billet, tu as changé de manière d'écrire je trouve.

    RépondreSupprimer
  2. Seb,

    Merci !

    Mais tu devrais me lire plus souvent, j'en fais plusieurs par mois, des comme ça. Et surtout, tu devrais lire "Partageons mes âneries"...

    RépondreSupprimer
  3. « et les parfums pourris des pouffes matinales » :

    Superbe alexandrin ! La journée commence fort...

    (Il faudra tout de même m'expliquer le rapport entre les odeurs de merde et un éventuel problème cardiaque.)

    RépondreSupprimer
  4. Didier,

    C'est simple : ça puait tellement que vous ne vous en rendez pas compte tout de suite par contre votre corps s'en rend compte et vous respirez à peine, d'où une sensation bizarre.

    RépondreSupprimer
  5. Je viens justement de changer de voiture... La neuve est dans ma cour. Drole de résonance avec ton billet... Drole...

    Comme Seb, j'adore cette manière d'écrire...

    RépondreSupprimer
  6. Qu'est-ce que je suis soulagé ne n'avoir pas lu ce chant héroïque de la vie parisienne avant de petit-déjeuner (il n'était pas encore publié). Dans mon souvenir, un wagon de métro bien rempli pue l'enfer, clodo ou pas, mais il est vrai que même en enfer on peut être plus ou moins proche de la culotte du diable.

    RépondreSupprimer
  7. Moi, c'était juste après ! Je sortais de la Comète.

    RépondreSupprimer
  8. Je passe ici dès qu'un billet (plus de 5 lignes) :) est écrit. Ne m'en demande pas trop tout de même de tout lire.

    RépondreSupprimer
  9. Seb,

    Je plaisantais... Et je ne lis moi-même pas tous les billets de tous les blogs que je suis.

    RépondreSupprimer
  10. Finalement le clodo qui pue c'est moins dangereux à dénoncer que le punk à chien :o)

    Par ce que ceux là aussi, ils peuvent polluer olfactivement.

    RépondreSupprimer
  11. Dagrouik,

    Celui là était particulièrement gratiné ! (je ne suis pas particulièrement fragile du nez, c'est quand la vue et l'odeur se mélangent que je pars en couilles).

    RépondreSupprimer
  12. Nicolas, tout a l'heure je vais prendre la ligne 9 de chez moi jusqu'au bout pour aller voir les gauchistes de meudon.

    Et bien un drame olfactif est toujours possible. Dès qu'on passe dans la zone CSP+++ fin de race, c'est à dire le 16e.

    Là on peut tomber sur la vieille trop parfumée en haut avec odeurs secondaires (les pieds).

    RépondreSupprimer
  13. C'est un quartier dangereux...

    Tu les vois ce soir ET demain midi ?

    RépondreSupprimer
  14. Comme j'ai lu le billet du cadavre après celui là, juste une suggestion imagine "un accident de personne" comme on dit pudiquement avec vous enfermé dans le wagon du clochard puant !!! ça ça fou vraiment les jetons !

    Okay je sors

    RépondreSupprimer
  15. J'y pensais pas... La prochaine fois, je descends à la station suivante.

    RépondreSupprimer
  16. C'est une belle réflexion que tu fais là.

    C'est vrai que ça me semble être un exemple plus flagrant que les autres de notre "résignation" de citadins. On est là, assis dans ce métro, comme tous les jours, et il y a cet évènement qui voudrait nous bousculer, mais pour rien au monde on adapterait notre routine. Il y a là comme une lutte débile contre nous-même, pour paradoxalement affirmer notre autonomie.
    Mais en l'occurrence, je pense qu'il y a aussi une sorte de désir égoïste de ne pas paraître indigne. Rester là, pour ne pas humilier cet homme, et surtout ne pas avoir à l'assumer devant les autres.

    Bon, c'est de la psycho de contoir, mais on est là pour ça :p

    RépondreSupprimer
  17. MG,

    Merci.

    Ce n'est pas de la psycho. Enfin si (de comptoir, hein !) peut-être mais ce n'est pas ce que je voulais. C'est plus un bête constat.

    RépondreSupprimer
  18. Les gens ne changent pas de rame tout simplement parce que c'est lui, l'autre là, celui qui sent la misère, la mort et la merde qui vient emprunter LEUR métro !!!

    [Tiens ça me rappelle que dans mon quartier de St Cyprien, à Toulouse, ils avaient transformé les bains publics en commissariat. C'est un signe de l'époque aussi ! :-)) ].

    RépondreSupprimer
  19. Poireau,

    Oui, c'est la réflexion que je me faisais en racontant l'anecdote au Vieux Joël et à Nadia, hier...

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires est activée. Je publie ceux que je veux c'est-à-dire tous sauf ceux qui proviennent probablement d'emmerdeurs notoires.