17 janvier 2013

Accord sur l'emploi

On pense ce qu'on veut (heureusement !) de l'accord machin truc pour l'évolution du droit du travail. Mon pote Romain se montre enthousiaste et mon copain Melclalex est plus circonspect comme moi, avant hier. Gabale aussi est pour mais je ne vais pas faire la tournée des blogs...

Le constat au bistro hier soir était implacable : les gens n’y comprennent pas grand-chose. Par exemple, mon pote Martial est intermittent du spectacle. Il travaille uniquement pour des entreprises privées, surtout des chaînes de télé et des organisateurs de salon. Il installe des décors. Il a des petits contrats avec une boite qui l’emploi quand elle a des besoins pour un client. Il ne se plaint pas : il gagne bien sa vie et a un boulot assez varié, toujours dans la création, …

On parlait de l’accord au bistro et il s’en foutait (tout en commentant…). Dans ma discussion, j'ai évoqué le statut d'autoentrepreneur. Il est horrifié. Ce statut est bien pire que le sien, intermittent.

Je ne sais pas si je suis pour ou contre la future loi. Je me suis exprimé contre. Mais au fond, je suis un salarié privilégié (dans une grosse boite stable). Je ne sais pas quelle est la proportion de salariés dans ce cas.

Il y a des points très positifs comme la taxation des CDD, la prise en charge de 50% de la complémentaire par l’employeur, la période de mobilité volontaire, la conservation des droits au chômage acquis avant la reprise du travail (en cas de retour au chômage), … On pourrait ajouter les aspects liés à la formation (mais je n’ai pas été formé pour en parler) ou la représentation des salariés dans les conseils d’administration (mais dans les très grosses boites, seulement).

Néanmoins, les points doivent être mieux étudiés. Par exemple, la prise en charge des 50% de la complémentaire est aussi utile pour compenser les baisses de remboursement par la sécu… Et le pognon ira à des boîtes privées… Par ailleurs, c’est ajouter des « charges » sur les salaires alors qu’on nous expliquait récemment qu’il fallait baisser le coût du travail…

D’autres points sont plus positifs pour les employeurs… et aboutiront – pour résumer – à une baisse des revenus en cas de baisse de la production. Je suis le premier à dire qu’il faut une réforme du marché de l’emploi mais que c’est aussi à l’entreprise et à la Société (l’ensemble des producteurs de richesses) de faire face aux variations de production.

Un autre point très positif doit être signalé : la négociation a abouti. La CGT et FO sont conformes à leurs habitudes… Par contre, il y a un truc qui me gène et qui a fait l’objet d’un débat dans les commentaires de mon billet d’avant-hier. Le Gouvernement invite le Parlement à retranscrire fidèlement les termes de l’accord dans la loi. Le Parlement servira donc de chambre d’enregistrement sans pouvoir modifier le contenu, sans débat politique. Néanmoins, la méthode est la bonne : si le Parlement (ou le Gouvernement) modifiait des termes du texte, la négociation n’aurait servi à rien.

A l’origine, Michel Sapin avait donné une mission aux organisations assises autour de la table, à l’occasion de la grande conférence sociale de juillet.

Mon confrère Melclalex s’interroge : « A première lecture on pouvait penser que les thèmes fixés par Michel Sapin étaient plutôt favorables aux salariés mais à y regarder de près il n'en n'est rien », l’accord semble plutôt favorable au patronat.

Je partage ses doutes…

11 commentaires:

  1. Ce que les commentateurs oublient de dire c'est que ce n'est pas l'accord qui est favorable aux employeurs, mais la situation actuelle. Aujourd'hui un employeur peut déjà user comme il l'entend de la modération salariale, de la réduction du temps de travail sans contrepartie, sans maintien de l'emploi. L'accord permet d'encadrer ce fonctionnement en obligeant les partenaires dans les entreprises à négocier le moment venu.

    Ça c'est pour tout le volet "flexibilité". Certains diront que l'accord ne fait qu'encourager la précarité, moi je dis qu'il ne fait que constater une réalité économique très difficile. Des secteurs d'activité disparaissent, d'autres se développent. Il faut accompagner cette transformation de notre société par une réelle mobilité. Dans l'accord il y a d'ailleurs un dispositif dont pourront s'emparer les salariés désireux de bouger: celui qui permet d'aller occuper un emploi dans une autre entreprise, tout en conservant son contrat de travail et un droit au retour pendant deux ans dans l'entreprise initiale. C'est assez révolutionnaire.

    Et pour ce qui concerne les mutuelles, je suis vraiment étonné du positionnement de certains représentants syndicaux. Allez demander aux salariés qui n'en ont pas aujourd'hui ce qu'ils en pensent ! Ça concerne quand même 30 à 40% des travailleurs. Les chômeurs pendant une durée d'un an pourront aussi être couverts. Et les mutuelles ne sont pas que des assurances privées. Il y en a encore qui jouent leur rôle mutualiste. Aux salariés et à leur représentant de se battre pour les imposer dans les entreprises.



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    1. François,

      Oui, le droit du travail est favorable aux employeurs mais doit néanmoins évoluer pour favoriser les mutations de la société.

      Pour les mutuelles, je suis un cas à part, j’ai toujours considéré que « la santé » ne devait pas peser sur « le travail » et qu’il faut renforcer la part de la sécurité sociale tout en réformant complètement son organisation.

      Et oui, il y a bien une corrélation entre précarité et tout ça. Les pays a plus faible taux de chômage sont ceux à plus forte précarité. C’est une variante de ce que dis à la fin du billet : c’est à la société d’assumer. Par exemple, il aurait fallu pouvoir diminuer le temps de travail et le coût pour l’entreprise en cas de baisse d’activité sans risquer de mettre le salarié en précarité, ce qui aurait pu se faire par un système d’assurance.

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  2. Les 9965 articles du code du travail figent tout et expliquent les délocalisations.

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  3. Pourrait-on arrêter d'utiliser le mot "salarié" à la place de "travailleur" comme s'ils étaient équivalents et interchangeables ?
    il y a des travailleurs pas salariés, il y a des travailleurs salariés, et il y a même des travailleurs employeurs.
    Tant pis si je casse l'ambiance, mais quand "un secteur d'activité disparaît" c'est toutes sortes de travailleurs qui disparaissent, et méritent d'être recasés.

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    1. Oui. Mais les négociations concernent les salariés essentiellement.

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    2. Ah ? C'est pour ça, alors, que je ne me sentais pas concernée. Sinon il se peut que j'aie une information suivant ce que me dira mon fils (salarié par un petit patron cuisiniste) à la prochaine visite : s'il ne dit rien ça va, s'il me dit "merci Hollande !" ça craint.

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  4. Non non et non l'accord ne doit souffrir d'aucunes modifications par les députés !!! S'ils se sentent frustrés qu'ils votent au plus vite l'égalité hommes femmes sur les salaires et le non cumul des mandats réclamés depuis longtemps par l'ensemble des électeurs là il feront oeuvre utile !!! S'assurer la bonne grâce du front de gauche ne sert à rien!!! et si d'aventure ils devenaient majoritaire à gauche ?.. Ce sera sans moi.

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  5. Et un accord signé par des syndicats qui ne réprésentent que 35% des voix aux dernieres elections ? avec le seul MEDEF comme représentant du patronat et pas d'autres..
    bref, un gros probleme de représentatitivé dans cet accord et personne n'a vu l'attaque contre les prudhommes et la dérégulation partielle du licenciement avec troll sur forme/fond qui est passé comme une lettre à la poste.

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  6. La méthode n'est pas bonne. Elle le sera lorsqu'un accord ne sera valide que s'il engage au moins 50% des mandataires de chaque parties, ainsi que c'est prévu pour cette année. Pourquoi ne pas l'avoir fait ici ?
    Même au regard de la méthode foireuse, la négo est un échec : la loi sarkozy stipule qu'un accord est validé si les syndicats signataires pèsent plus de 30% (c'est le cas) ET si les syndicats opposants pèsent moins de 50% (ce n'est pas le cas). Est-ce que je me plante quelque part, ou on nous vend comme réussite un échec ?
    La proposition initiale d'une négo est prépondérante dans son résultat. C'est le biais d'ancrage. Dans ces négo, c'est le texte du medef qui a servi d'ancrage. Pour avoir un accord majoritaire, il eût fallu partir du texte CGT ou FO, ou du moins issu de l'intersyndicale. Le résultat eût été bien différent et personne ne se prendrait le chou.

    Quoi qu'il en soit, la négo est un échec, d'une manière ou d'une autre. Conformément aux déclarations d'Hollande, c'est donc le gouvernement et le Parlement qui doivent faire la loi.

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  7. Geneviève,

    On est TOUS concernés. Je me suis mal exprimé (il faut dire que je commente la plupart du temps avec mon iPhone, ce qui n’incite pas à papoter). Il s’agit de la sauvegarde de l’emploi en France, de notre niveau social et tout ça. Je voulais dire que l’accord est conclu entre le patronat et les salariés… C’est pour ça qu’on parle des salariés. Mais il est évident que tous ceux bossent ne sont pas salariés.

    Par contre, tu as la même difficulté que moi et que beaucoup : tu ne te sens pas concerné par nombre d’aspects. Je ne bosse pas dans le secteur industriel et j’ai une activité à peu près constante.



    Politeeks,

    Oui, il reste un certain nombre de problèmes dont celui de la représentativité que tu évoques. Seul le Parlement pourrait avoir le droit de faire un truc qui engage tout le monde…



    Vincent,

    L’accord aura des modifications à la marge mais sa substance restera, ne crie donc pas. Par contre, d’autres lois seront faites, en complément. La loi sur l’égalité de salaires entre les hommes et les femmes n’est probablement pas possible et celle sur le non cumul, 95% de la population n’en a rien à foutre.

    Ce n’est pas une question de Front de Gauche mais de recul social.

    Par ailleurs, je suis un démocrate et c’est bien au Parlement de voter les lois qui s’appliquent à moi, pas à des gens que je ne connais pas et pour qui je n’ai pas voté.

    J’ai voté pour Hollande (et pour un député qui soutient la majorité), il a choisi la méthode. Il n’empêche que j’ai le droit de dire que le résultat n’est pas satisfaisant. La loi sera votée parce le contraire torpillerait les relations sociales en France mais il faut s’interroger sur le fonctionnement de ces relations.


    Shaher Gamal,

    Je suis partagé sur cette notion de réussite ou d'échec. La négociation a réussi dans le cadre d'une loi qui est mauvaise. Point barre. Si les syndicats de salariés avaient plus de représentativité, le résultat aurait été différent.

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