04 mai 2011

Des déficits dans une constitution

Cette information pourtant essentielle m’avait échappé. On va dire que c’est de la faute de la reine d’Angleterre, d’Obama et de Ben Laden. Toujours est-il qu’une réforme qu’est en cours, à l’Assemblée Nationale, « l'examen d'un projet de réforme constitutionnelle sur l'équilibre des finances publiques ».

Je ne suis pas un spécialiste de ces machins. Je vais donc vous le résumer rapidement tout ce que j’ai cru comprendre sur le site de l’Assemblée. Il s’agit d’une part de créer des « lois cadres » sur trois ans prévoyant les efforts à faire pour assurer l’évolution des comptes. Il s’agit d’autre part de transférer le monopole des décisions de prélèvements obligatoires aux lois de Finance (je ne m’étends pas, je pense que cela devrait sauter). Il s’agit enfin de transmettre au Parlement les machins de stabilité avant de les envoyer à la Commission Européenne (là, je n’y comprends rien).

Toujours est-il que ça ressemble à du pipeau et à du grand guignol : les législatures sont sur cinq ans, les lois peuvent se modifier et un gouvernement d’une couleur ne va pas imposer un cadre budgétaire au gouvernement suivant.

Je me doute que ce sujet ne passionnera pas les foules et moi et encore moins. Laissons nos députés en causer mais faire une énième évolution de la constitution pour ce pataquès est évidemment une mesure de communication pour que la droite fasse croire aux foules qu’elle a enfin pris à bras le corps le problème du déficit.

Nous ne serons pas dupes. « En retour, le ministre du Budget, François Baroin, a prévenu la gauche que "ceux qui voteront contre auront la responsabilité" d'une mauvaise gestion des finances publiques, alors que la France s'est engagée à ramener son déficit public de 7 à 3% du PIB d'ici à 2013. »

Nous allons simplement rappeler à M. Baroin que la France s’est engagée, par le funeste traité de Maastricht, à ramener son déficit à moins de 3% du PIB. La droite n’y arrivant pas, M. Chirac a provoqué une dissolution en 1997 pour permettre à la gauche d’y arriver (je résume !), ce qu’elle a fait puisque les déficits étaient ramenés dans les seuils admis quand elle a quitté le pouvoir.

C’est depuis que deux législatures de droite ont plombé le budget de l’état. Un bon schéma vaut mieux qu’un long discours, je pique celui-ci sur le site du Sénat. Regardez surtout la courbe rouge. Et je suis gentil, elle s’arrête en 2009. Faisons table rase du passé, de la bulle internet et de la croissance qui a favorisé la gauche, de l’éclatement de cette bulle qui a lésé la droite du temps de Jean-Pierre Raffarin.

Monsieur Baroin pourra-t-il en tirer la seule conclusion qui vaille : depuis quand les comptes sont-ils réellement dans le rouge ?

Est-ce bien la peine de continuer à donner des leçons ?

C’est sous la Présidence de Nicolas Sarkozy que les déficits ont atteint des sommets. Mettre sur le dos de la gauche une politique désastreuse ("ceux qui voteront contre auront la responsabilité") dépasse l’entendement.

11 commentaires:

  1. J'espère que cette réforme, qui augmentera encore le pouvoir des banques sur les choix de sociétés, ne passera pas.

    Ils font croire (et ça paraît naturel pour tout le monde ne connaissant pas le mécanisme de création monétaire) qu'il ne faut pas dépenser plus que ce que l'on a, au risque de faire augmenter la dette publique.
    Mais mécaniquement, par le système monétaire, la dette publique ne peut QUE augmenter.

    C'est bien exploité à la TV (TF1 par exemple) lorsqu'on voit un nombre qui augmente très vite qui représente le montant de la dette nationale. Les téléspectateurs doivent se dire "oh là là, il faudrait peut-être la rembourser et accepter une politique de rigueur". Sauf que si on la remboursait, il n'y aurait plus d'argent : l'argent provient de la dette. Au seul bénéfice des banques.

    Lorsqu'un client fait un crédit (par exemple pour acheter une maison), la banque ne lui prête pas l'argent qu'elle a : elle le crée (par une opération comptable). Le client va ensuite lui rembourser, en plusieurs années, grâce à sa dure labeur, l'argent qu'elle lui a « prêté », avec des intérêts. Au fur et à mesure du remboursement du principal, l'argent est « détruit » (de la même manière qu'il a été « créé », c'est la raison pour laquelle il n'y aurait plus d'argent si l'on remboursait la dette), mais il reste les intérêts, qui eux, sont au seul profit de la banque (qui sont des intérêts sur de l'argent qu'elle n'avait pas!). Ces intérêts, il n'est d'ailleurs possible de lui payer qu'en récupérant, grâce à son travail, l'argent issu d'autres prêts effectués (indirectement), puisque (presque) tout l'argent vient de la dette. Déjà, l'injustice est flagrante : une banque privée crée de l'argent à son profit à partir du travail des autres, sans rien faire (à part écrire un numéro dans une base de données).

    Mais ce n'est pas tout, en créant de l'argent, la banque augmente la masse monétaire, donc dévalue la monnaie déjà en circulation. L'important, ce n'est pas la valeur que l'on possède en €, c'est la part que cette valeur par rapport à tout l'argent en circulation. Si on multipliait l'argent de tous par 100, cela ne changerait rien (c'est d'ailleurs ce que l'on a fait lorsqu'on est passé des anciens francs aux nouveaux francs, on a divisé par 100, les gens n'étaient évidemment pas 100 fois plus pauvres). Ainsi, augmenter la masse monétaire (inflation) à son seul profit équivant à « voler » une (toute petite) part de l'argent que possède chacun. La population, qui ne profite pas de cette création monétaire, doit donc travailler toujours plus pour « récupérer » cet argent et payer les intérêts toujours plus importants à ceux qui le leur prend.

    Et globalement, cela pose un problème de remboursement : lorsque tout l'argent provient du crédit (en réalité, 90~95%), le total prêté à tous vaut P (le principal), et il faudra rembourser P+I (avec les intérêts). Sauf que l'argent des intérêts n'existe pas, il serait impossible de les rembourser maintenant. Ce qui le rend possible, c'est simplement le décalage dans le temps du remboursement, rendu possible grâce à la croissance (c'est-à-dire lorsqu'il y a plus de nouveaux prêts effectués pour rembourser les anciens). Sans croissance ce système inique s'écroule. Il faut donc une production toujours plus importante uniquement pour « rembourser » (en fait, « donner » serait plus juste) les richesses créées aux banquiers. Après, beaucoup s'étonnent des inégalités qui augmentent, et s'en prennent soit aux entreprises, soit aux « assistés ». Mais la cause des inégalités, c'est le mécanisme de création monétaire. Ce qu'il faut, c'est que la création monétaire soit distribuée à chacun.

    http://www.dailymotion.com/video/xhiymd_entretien-avec-etienne-chouard-1-l-argent-dette_news
    http://www.dailymotion.com/video/x75e0k_l-argent-dette-de-paul-grignon-fr-i_news

    RépondreSupprimer
  2. bah, ton machin, là, c'est juste le début de la traduction en droit national du fameux Pacte Pour l'Euro (j'avais fait un billet chez Rumi sur le sujet, mais comme tu ne vas pas là-bas...;-)
    Et tu te plantes si tu crois que ce sont des prêchi-prêcha qui passeront lors de la prochaine législature. La manœuvre a pour but de nous lier encore plus étroitement à l'Europe bureaucratique et toute puissante. Et pour récupérer tous les petits bouts de souveraineté qu'on cède discrètement depuis des années, je te garantis qu'il va falloir non seulement un bout de temps, mais surtout une sacrée volonté politique ! et tout ce que la gauche (si elle revient au pouvoir et surtout si c'est DSK - désolée, pas pu m'en empêcher)pourra dire c'est : on ne peut rien faire, c'est comme ça, TINA...

    RépondreSupprimer
  3. De toute façon, ce n'est pas parce que la constitution va interdire (ou cadrer) les déficits que la constitution sera respectée. Si un budget est contraire à la constitution, quel sera le recours ?

    RépondreSupprimer
  4. @om,

    Ton commentaire est quasiment hors sujet : je parle ici de la communication du gouvernement. Je suppose qu’il n’intéressera pas mes lecteurs. Je le laisse néanmoins n’étant pas spécialement de mauvaise humeur aujourd’hui.

    LaetSgo,

    Je me fous de la perte de souveraineté, le problème est qu’elle se fait au profit d’un machin qu’on ne contrôle pas et qui ne se fait pas dans l’intérêt des peuples. Je ne sais pas si TINA mais je ne sais pas qu’elle alternative on a, si ce n’est intervenir à un niveau politique pour faire bouger ce bordel et réorienter cette Europe.

    Il n’empêche qu’une loi cadre ne changera pas grand-chose : une loi se modifie. Une constitution aussi, d’ailleurs, la preuve. Ce qui a de désolant, à la limite, c’est qu’on continue à mettre dans la constitution des orientations politiques (c’est ce qui a fait échouer le referendum de 2005, d’ailleurs).

    Tizel,

    La constitution ne cadre pas le déficit mais uniquement les règles d’établissement du budget, notamment via cette loi cadre (qu’évoque LaetSgo dans son billet).

    RépondreSupprimer
  5. @Nicolas
    J'ai bien compris que tu parlais de la communication du gouvernement. Mais je ne pense pas pour autant qu'il est hors-sujet de parler du fond de la réforme.

    Interdire un déficit budgétaire lorsque le système mis en place l'oblige (l'obligation pour l'État d'emprunter son propre argent avec intérêts aux acteurs privés), c'est finir de donner tout le pouvoir aux banques, et c'est la mort de tout ce qui est public au profit du privé. C'est une perte importante de souveraineté.

    RépondreSupprimer
  6. On en a rien à foutre du déficit à 3 %, on en a rien à foutre de Schengen, on en a rien à foutre du traité de Maastricht, de l'euro et de tout ça.
    Marine Le Pen a choisit le bon créneau.

    RépondreSupprimer
  7. Excellent billet, jeune homme.

    RépondreSupprimer
  8. Super d'avoir été cherché ce graph' que je ne connaissais pas.
    Cela dit tu as oublié de citer un argument que le gouvernement ne manquera pas d'évoquer - à raison d'ailleurs - c'est la crise de 2008/2009 qui a eu un impact sur la croissance, l'emploi, les exportations et tout ce que tu veux, et donc un budget moins équilibré que les prévisions.
    Dans le même temps, leurs prévisions basées sur une croissance à 2% c'était ridicule aussi.

    L'argument de Baroin est naze. La proposition, probablement une rustine tout aussi naze.
    Bref, on n'est pas près de résoudre cette question des déficits, et ils peuvent se renvoyer la balle dans tant qu'ils veulent, ce n'est pas ca qui va nous sortir la tête de l'eau.

    RépondreSupprimer
  9. j'ai pas tout compris... mais apparemment c'est pas grave parce ce qu'apparemment c'est une usine à gaz shadock qui ne s'appliquera jamais... ou bien ?

    m'enfin, et après on se demande pourquoi les gens se détournent de la politique...

    @+

    RépondreSupprimer
  10. Une nouvelle façon pour le politique de se lier les mains face à la finance et tutti quanti ... Bravo, continuons ainsi !

    RépondreSupprimer
  11. @om,

    Si quand le commentaire est trop long.

    Rimbus,

    reste calme.

    Dedalus,

    Merci,

    Romain,

    Oui, c'est ridicule.

    Nap,

    Y'a un peu de ça.

    Romain,

    On est au bord du gouffre, on va faire un grand pas...

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires est activée. Je publie ceux que je veux c'est-à-dire tous sauf ceux qui proviennent probablement d'emmerdeurs notoires.