11 juin 2013

Droit de retraite

Mon billet d'hier soir portait sur les retraites mais avec un angle très précis : je ne vois pas comment je pourrais défendre une augmentation de la durée de cotisation alors que je la combattais lors des réformes précédentes. Ma mission de blogage gouvernemental pourrait très bien se tarir. Mes commentateurs sont néanmoins partis dans des débats passionnants à différents sujets.

Petit 1 : le chômage

Réduire sensiblement le chômage ne permettra pas de remettre le régime des retraites à l'équilibre. Il n'empêche que... D'une part, plus de gens bossent plus d'argent rentre dans les caisses. D'autre part, faire travailler des gens plus longtemps est idiot si des jeunes qui veulent travailler peuvent faire le job.

L'arithmétique n'est évidemment pas simple mais refuser de voir le problème dans la globalité est une hérésie.

Petit 2 : augmentation de la durée de cotisation
Je l'ai dit : je suis contre. On trouvera toujours d'excellents motifs pour être contre. N'en oublions pas un : ça fait 20 ans qu'on nous annonce des augmentations de durée pour sauver le système et qu'on constate que ça ne fonctionne pas. Il faut arrêter. Il faut jouer sur les autres paramètres.

Je vais encore faire de l'arithmétique idiote (et bien arrondie) mais si on bosse 40 ans et qu'on passe 20 ans à la retraite, mathématiquement, il faut qu'un mois de travail puisse servir à payer un mois de travail et un demi mois de retraite.

Il faut donc jouer aussi sur le niveau des cotisations (salariales et patronales).

Nous laisserons de côté le troisième paramètre : le niveau des pensions. Mais il y a bien trois paramètres : les pensions, la durée de cotisation et leur montant.

Petit 3 : alignement public privé

C'est un argument qu'on entend souvent : il faut aligner les paramètres entre les gens du public et du privé pour des raisons de justice. Quand certains brandissent ce mot, je me méfie toujours.

Le salarié du public n'a pas le même statut qu'un salarié du privé. Il passe un concours qui lui permet de signer un contrat avec l'État pour un travail puis une pension. Il est donc payé avec nos impôts (et les siens) jusqu'à la mort. Taxer cette paye revient à taxer des impôts. Parler d'alignement devient grotesque.

Encore une fois, il faut regarder ça de manière globale mais, par pitié, arrêtons de brandir des chiffons rouges, que l'on soit un vil libéral ou un méchant syndicaliste. Laissons les syndicats négocier avec leur employeur de manière globale : niveau des rémunérations et durée de travail pendant la carrière.

Ne mélangeons pas les retraites du public et du privé. D'un côté comme de l'autre.

Petit 4 : répartition et capitalisation

On trouve toujours des braves gens qui nous sortent la nécessité d'introduire une dose de capitalisation. Ça ne veut pas dire grand chose et, surtout, tant que notre système n'est pas à l'équilibre, ça ne peut pas fonctionner. La capitalisation a ruiné des gens et la solidarité ne fonctionne qu'avec la répartition. Si les gens veulent capitaliser pour améliorer leurs revenus quand ils seront à la retraite, ils le peuvent. Mais ce n'est plus du ressort de la solidarité, donc l'État n'a rien à foutre dans cette histoire.

Il faut arrêter de raconter n'importe quoi : on cotise aujourd'hui pour payer les retraites des anciens. Pas pour nous. Le fait de cotiser nous accorde des droits pour qu'on puisse bénéficier d'une retraite payée par les travailleurs quand on aura pris de l'âge.

Petit 5 : autres voies

Compte tenu de l'évolution des paramètres (date d'entrée dans la vie active, chômage,...), l'équation est de plus en plus difficile à résoudre. Il faut peut-être étudier d'autres solutions éventuellement plus personnelles pour déterminer les deux sujets qui nous intéressent : âge de départ et niveau des cotisations, tout en prenant en compte toutes les particularités comme le chômage des vieux, la durée des arrêts de carrière (pour élever les mômes ou autre).

C'est l'affaire de spécialistes. Voyez ça sans moi.

Petit 6 : la pénibilité

Ce mot ne veut pas dire grand chose. Il y a de toute évidence des métiers qui sont plus pénibles que d'autres mais arrêtons de nous renvoyer des mots à la tronche. Quand je fais une journée de 9h à 23h, c'est pénible mais je suis payé pour (et ce sont surtout des heures de présence…). Et il ne sera jamais aussi pénible que celui d’une caissière qui bosse de 12h à 14h et de 18h à 21h pour une bouchée de pain.

Petit 7 : concluons


Je ne sais pas où nous entrainera ce débat et quels seront les arbitrages faits par Jean-Marc Ayrault voire François Hollande, ce qui sera soumis aux syndicats et ce qui sortira des négociations. Le jour où l'on commence les cérémonies pour la mort de Pierre Mauroy, n'oublions pas les propos qu'il a tenus et ce qu'a représenté la retraite à 60 ans...

Mes commentateurs pourront toujours faire des circonvolutions pour expliquer que je tiens un discours simpliste, que ce n'est pas si simple, ... Il n'empêche que s'il faut passer de 41,5 ans à 42 ans, je le veux bien mais n'oublions pas qu'un type qui partira à la retraite dans deux ou trois ans a commencé à bosser avant la crise économique qui nous occupe ! 

Modifier une virgule dans un texte de loi pour sauver un système à horizon 2025 n'a pas beaucoup de sens. Ce qui importe est d'équilibrer durablement le système mais le plus tôt possible parce que personne ne peut prévoir comment tournera l'économie en 2025. 

Ne jouons pas aux apprentis sorciers : les gens qui travaillent aujourd'hui cotisent pour ceux qui sont à la retraite maintenant. Pas dans 15 ans.

27 commentaires:

  1. il y a un paramètre que tu n'as pas évoqué

    arrêter de faire reposer les régimes sociaux sur les seuls salaires
    faire cotiser TOUS les revenus

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    1. Pas les retraites. Ça n'aurait pas de sens.

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    2. oui mais les salaires ont été amputés de 20% de leur part de gain productif au profit du capital
      ce qui explique beaucoup de choses sur la crise

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    3. Oui. C'est aussi je rôle de la CSG.

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  2. Abroger le statut des fonctionnaires
    Pour en finir
    Avec cette definition idiote

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  3. "On trouve toujours des braves gens qui nous sortent la nécessité d'introduire une dose de capitalisation."

    Oui, on va dire que je suis bien brave...

    Je pense que tu confonds différentes notions de ce qu'on appelle "retraite par capitalisation" qui vont de placements boursiers type fonds de pension à l'américaine jusqu'au cotisations salariales gérées par les partenaires sociaux, à prestations définies (comme aux Pays-Bas).

    Mais puisque tu ne veux pas en parler, n'en parlons pas.

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    1. Ils ont un des systèmes les plus fragiles. Je veux bien parler de tout mais tu m'expliqueras comment on peut proposer ça en France tant qu'on a un lourd déficit et comment assurer la migration.

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  4. Les retraites par capitalisation sont forcément déposées sur des placements divers. Ces placements peuvent toujours se casser la figure, même ceux qui sont apparemment les plus sûrs. Dans ce cas on a économisé pour rien.

    La chose ne peut tout simplement pas arriver avec la retraite par répartition, puisque l'argent récolté aujourd'hui sert au fur et à mesure à rendre au retraité un équivalent des droits qu'il a acquis avec le temps. Les droits et l'argent, ce n'est pas la même chose.

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    1. "La chose ne peut tout simplement pas arriver avec la retraite par répartition"

      HEu.... et le fait que le système soit en faillite ? Ou qu'il est financer par la dette ?

      Ca reste de l'argent qu'il faudra rembourser à un moment ou un autre.

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    2. Il n'aurait pas du l'être. Les gouvernements de droite l'ont toujours laissé filé. Il fait ajuster les paramètres et notamment le montant des cotisations. Le déficit est important mais en pourcentage est de l'ordre de 5%. Il fait donc d'avoir les couilles d'augmenter les recettes de 5%.

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    3. Ça s'arrose. Cela étant évite de trop squatter mon blog. Tu as déjà été viré une fois. Un commentaire ou deux pas jour devrait suffire.

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  5. Prenons la SNCF, le régime spécial des cheminots qui est en déficit chronique puisqu'il n'y a plus assez de cheminots cotisants pour payer les excellentes retraites de ce régime (comparer au reste des retraités). Au final, c'est le privé qui payent pour le publique. C'est une mutualisation des déficits et des pertes pure et simple en revanche ce régime ne bénéficie qu'à une minorité.

    Mutualisation des pertes, privatisation des bénéfices, cela ne vous rappel rien ?

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    1. Quelle privatisation des déficit ? On appelle ça de la solidarité. Un tas de métiers disparaissent on continue à payer des retraites aux anciens concernés.

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    2. Pas d'accord avec votre définitoion de la solidarité.

      Pour moi, la solidarité, c'est lorsque la majorité des gens acceptent de payer pour que les droits dont ils bénéficient soient aussi accordés à une minorité qui n'en bénéficient pas.

      Dans le cas des régimes spéciaux des retraites (pas seulement celui de la SNCF), c'est exactement le cas de figure inverse: la majorité des gens doivent payer pour qu'une minorité continue à bénéficier d'avantages dont eux-mêmes ne bénéficient pas: c'est la définition exacte du privilège.

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    3. Oui et non. Ce qui ne va ce sont certains avantages (notamment l'âge de départ en retraite). Par contre, Skandal faisait référence au fait qu'il reste moins de cheminots : là il faut être solidaire.

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    4. Il faut être solidaire pour qu'ils bénéficient des mêmes avantages de retraites que les autres salariés, pas pour qu'ils continuent à bénéficier d'avantages qu'ils ne peuvent plus se payer, et les autres non plus.

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    5. Oui. Mais il fait prendre en compte tous les paramètres, y compris le fait qu'ils ont signé un contrat de travail.

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  6. Mais il y a bien trois paramètres : les pensions, la durée de cotisation et leur montant.
    Je pense qu'il y en a un quatrième : l'assiette
    En effet les cotisations retraites sont basées sur les salaires et dans le même temps des "machines" ont remplacés le travail humain. Pourquoi ne pas élargir la base des cotisations aux "machines" ?

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    1. Parce que ça n'est pas possible (ou du moins ça revient à augmenter la TVA). Et c'est bien le travail qui doit payer la retraite.

      Par contre, les autres branches peuvent être payées par autre chose. C'est quand même délirant que les entreprises qui embauchent payent plus pour le chômage.

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  7. moi je propose un truc simple : quelque soit la nature du contrat de travail, ou fruit d'un travail entre un individu et une entreprise ou autre, que 100€ de revenu de ce travail cotisent pour N euros dans les caisses de retraites.

    Donc primes et autres intéressements, actions gratuites ou pas : cotisation ! et privé et public : même taux de cotisation sur les salaires, donc même taux et conditions de pension ensuite.

    Et système de bonus/malus et donc retraite à points : le jour cotisé (et non pas le trimestre) sera l'objet d'un BONUS en cas de job qui use, job qui tue, job qui épuise et ne donne que 5 ou 8 ans d'espérance de vie à 60 ans. Ces gens là doivent partir à 55 ans ce n'est que justice, et y'en a de moins en moins. Demandez à l'INED, aux biologistes et médecins : la liste des métiers est connue.
    MALUS pour les jobs non épuisants ou qui épuisent les autres : DRH et autres donneurs de leçons.

    On doit aussi se poser la question du rabot a mettre sur les grosses retraites payées à ces gens qui restent plus longtemps envie que les pauvres à petite retraites et sont donc financées par de moins en moins de salariés avec des salaires qui eux aussi baissent.

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    1. Oui il fait rétablir de la justice mais aussi assurer le financement à long terme. Ok pour le truc à points.

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  8. "Nous laisserons de côté le troisième paramètre : le niveau des pensions. "

    Mais non, on ne peut pas le laisser de côté! Si les salariés acceptent de partir à la retraite avec une pension équivalente à 5% de leur dernier salaire, il n'y a plus de problème pour la retraite à 60 ans, et même à 55!

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    1. Certes ! Ce que je voulais dire c'est qu'on ne peut pas réellement baisser les pensions.

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  9. capitalisation ou répartition la richesse est créée par ceux qui créent donc qui travaillent, l'avantage de la répartition c'est la mutualisation des risques.
    La difficulté provient de la multitude de statuts et donc des intérêts corporatistes qui empêchent une véritable évolution : un système unique pour tous, comptes notionnels, liberté individuelle quant à l'âge de la retraite, choix collectif entre taux de cotisation et taux de retraite.

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