12 avril 2013

Quels scénarios pour une affaire d'état ?

L’affaire Cahuzac continue à agiter les médias. J’ai un copain du PS qui est passé près de Bercy, hier (probablement sur le métro aérien qui passe à côté). Il est arrivé à la Comète et m’a dit : « Il y avait plein de camions des médias avec des grosses antennes autour du Bercy, tu sais ce qui se passe ? » « Oui, les charognards attendent que Mosco tombe ». Il avait rendez-vous avec un autre lascar, nous n’avons discuté que quelques minutes et on s’est rendu compte qu’on ne savait quasiment rien de cette histoire. L’occasion de faire un point, d’autant que deux rumeurs (au moins…) sont parties, dont celle à propos de Pierre Moscovici qui aurait été au courant depuis décembre.

J'ai relayé l’autre dans mon blog, une "information" d'un hebdomadaire suisse : les services secrets seraient à l'origine de l'affaire Cahuzac pour faire pression sur Hollande afin qu'il ne réduise pas le budget des armées. Rappelons que la baisse envisagée était très importante. Elle a très peu été reprise par la presse française ce qui m’a étonné vu qu’elle a généré des articles dans les grands médias suisses.

L'hypothèse est saugrenue mais elle m'amuse beaucoup (dans le cadre de l'affaire Cahuzac seulement parce que dans l'absolu, savoir que n'importe quelle entité disposant d'un peu d'information puisse faire pression en plus haut lieu est terrifiant).

Le Parisien du 18 mars titrait sur la vente possible du Charles de Gaulle. Le 19 mars, Jérôme Cahuzac démissionnait suite à l'ouverture d'un machin par la justice. François Hollande a repoussé ses annonces concernant le budget de l'armée à septembre. C'est rocambolesque et pourrait faire un bon scénario. L'histoire est-elle aussi ridicule que ça ?

Je vais écrire la trame de ce scénario :

Des fonctionnaires des services de renseignement enquêtent en Suisse dans le cadre normal de leur travail de lutte contre la fraude fiscale. Ils tombent par hasard sur le compte d'un ministre. Ils reportent à leurs autorités de tutelle (la Direction de la DCRI qui dépend du Ministère de l'Intérieur mais reste proche de la Défense puisqu'une partie y était rattachée avant la création de la DCRI sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy). 

Des rigolos imaginent qu'ils tiennent un moyen de pression sur le Gouvernement et font en sortes que Mediapart commence son enquête. Cahuzac est la cible idéale. 

La pression se fait de plus en plus forte sur l'armée et son budget (j'en ai fait deux billets : le sujet m'intéresse parce que j'ai un copain militaire inquiet). En mars, je ne sais quel service qui dépend du ministère de l'intérieur authentifie la voix. La des services de la Défense donnent des informations au Parisien. Des services quelconques font savoir à la Présidence qu'ils ne rigolent pas. Le reste se passe : la justice ouvre une information judiciaire contre le ministre qui est obligé de quitter le Gouvernement. La pression de descend pas et il passe aux aveux.

Hop ! Fin du scénario. Si vous êtes sages, je vous en sors une variante. 

Je vais raconter une autre histoire maintenant :

C'est celle d'un journal en ligne dont le patron est réputé être très à gauche qui reçoit des informations sur un ministre qui le poussent à ouvrir une enquête. On découvre des rapports louches d'inspecteurs des impôts en délicatesse avec leur administration, une bande enregistrée obtenue dans des conditions rocambolesques avec une des voix qui est authentifiée par un détective privé ayant travaillé pour l'ex femme du ministre dont l'avocat est la sœur du chef du plus grand parti d’opposition.

J’ai raconté deux histoires.

Laquelle ferait le meilleur scénario pour un prix de crédibilité ? Les deux ne sont pas incompatibles et la deuxième est vraie. On ne peut pas suspecter Médiapart de donner des « informations » qu’ils n’ont pas. Est-t-elle crédible sans la première ?

Allez ! Je rajoute un détail à la deuxième. Le ministre de tutelle du ministre concerné voit les informations du journal on line et décide de faire une enquête pour les vérifier. Il envoie 15 fonctionnaires en Suisse qui reviennent avec la confirmation. Le ministre a l’information mais ne prend pas la décision qui s’impose car il s’imagine qu’avec le barouf fait par les 15 fonctionnaires, l’information ne fuitera pas.

Je peux aussi ajouter un détail à la première. Un hebdo Suisse sort donc une information que ses confrères français voient immédiatement vu qu’elle est reprise par les quotidiens suisses. Les services secrets seraient impliqués, les conséquences seraient très graves pour l’Etat. Ils décident de ne rien sortir sauf quelques rédacteurs en chef stagiaire de service de nuit…

Stop ! Arrêtons de déconner…

Pour l’instant, nous savons quoi de cette histoire ?

Petit 1 : il y a une bande enregistrée qui est prise au sérieux par la justice.
Petit 2 : l’avocat de l’ex ministre dit que le ministre a avoué avoir un compte en Suisse avec 600 000 euros dessus qu’il n’a pas déclaré et le ministre a fait un billet sur son blog.
Petit 3 : les enquêteurs cherchent à savoir s’il y a eu des mouvements sur ce compte dans une période récente (avant 2006, je crois, il y a prescription).
Petit 4 : les « autorités » du ministre nient avoir eu vent de quelque chose.
Petit 5 : ces autorités prennent l’affaire suffisamment au sérieux pour déclencher des opérations de grande ampleur. C’est directement le président de la République qui est intervenu pour faire des annonces.
Petit 6 : le ministre a tenu plusieurs mois avant de démissionner (ou d’être démissionné) et il a nié avoir un compte en Suisse devant les parlementaires.

Que pouvons-nous en déduire ?

Du petit 6 : soit qu’il n’a pas de compte soit qu’il est persuadé que personne n’arrivera jusqu’à ce compte soit qu’il est complètement con et a espéré que ça ne fera pas de scandale.
Du petit 5 : qu’il n’y a pas de fumée sans feu.
Du petit 4 : soit qu’ils n’étaient pas au courant, soit que l’affaire est très grave à un point qui nous échappe peut-être, soit qu’ils sont complètement cons et pensaient que ça n’allait pas faire scandale.
Du petit 3 : pas grand-chose, sauf que l’affaire n’est pas vraiment importante au niveau de la justice ou du fisc. Elle est politique.
Du petit 2 : pas grand-chose non plus. Au fait, a-t-on une confirmation des aveux ? A-t-on autre chose que les propos de l’avocat et le billet de blog de Cahu (j’ai peut-être loupé une étape, tellement il y a de rebondissements) ?
Du petit 1 : pas grand-chose à part qu’il y a réellement une bande enregistrée avec une forte probabilité pour que ça soit bien Cahuzac dessus.

Il y a des rumeurs :

Petit a : les deux que j’ai déjà évoquées dans ce billet et qui sont forcément niées.
Petit a1 : le ministre de tutelle a lancé une enquête en décembre et a eu confirmation.
Petit a2 : c’est une histoire de barbouzes qui font chantage sur l’Etat.
Petit b : les services du ministère du travail et probablement ceux du fisc étaient au courant depuis très longtemps, avant l’élection de François Hollande.
Petit c : la clinique de Jérôme Cahuzac était une usine à cash.
Petit d : le petit c est de notoriété publique dans « ces milieux », y compris à l’Assemblée.

En parallèle à ces rumeurs, on a tous des a priori divers, le plus répandu étant qu’il n’était pas possible qu’Ayrault, Hollande et Mosco n’aient pas été au courant dès décembre. C’est un point qui pourrait être très important s’il apparaît qu’ils ont couvert Cahuzac pour des mauvaises raisons (vous me direz qu’il ne peut pas y avoir de bonne raison mais je n’en sais rien, on en est à imaginer une histoire de barbouzes).

Pour mon histoire de barbouzes, il faudrait faire jouer Francis Blanche, Lino Ventura et Bernard Blier…

N’hésitez pas à ajouter en commentaire ce que j’aurais pu oublier parmi les rumeurs ou les choses que nous savons.

11 commentaires:

  1. Juste CARREZ et MARINI qui remplissent leur mission.
    MARINI est le nouveau Président de la Commission des Finances du Sénat ... N'a rien à dire sur les opérations de Woerth and C°. Est membre de la droite populaire qui prône quand même le rapprochement UMP-FN.
    Que du beau monde qui justifie le déplacement des TV de France et de Navarre : n'empêche qu'ils sont repartis bredouille : Mosco n'a rien à se reprocher !

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  2. Mosco cuit? Cette affaire aura tout de même eu une retombée positive...
    (et il se voyait déjà président de l' Eurogroup!)

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  3. Qui dans le rôle de la femme à Mosco?
    1. Audrey Tautou
    2. Marion Cotillard

    Pour moi, Marion Cotillard.

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  4. Mosco devrait penser au foot... il pourrait alors se la jouer à la Canto... "les mouettes suivent le chalutier etc.. etc.."

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  5. Pour mon histoire de barbouzes, il faudrait faire jouer Francis Blanche, Lino Ventura et Bernard Blier…

    "Alors, y dort le gros con ? Ben y dormira encore mieux quand il aura pris ça dans la gueule ! Il entendra chanter les anges, le gugusse de Montauban ! Je vais le renvoyer tout droit à la maison mère, au terminus des prétentieux…"

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  6. Mais je n'ai répondu à personne ici !

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